Chapitre 20 - I

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Mon esprit refusait de croire ce que je venais de formuler, la lycanthropie était une légende, un mythe. Mais j'avais vu Robin sous sa forme de loup. J'avais beau être cartésienne, je ne pouvais plus nier l'évidence.

Il ôta lentement ses paumes de mon visage et baissa la tête, l'air anxieux, presque honteux. J'attrapai ses mains pour le forcer à croiser mon regard, à m'expliquer.

— Oui, c'est ce que je suis. Je suis vraiment désolé de faire entrer ça dans ta vie, tu n'en avais sans doute pas besoin. Mais c'est un fait, c'est une part de moi qui sera toujours là.

Il me regardait maintenant droit dans les yeux. Pourquoi souffrait-il autant ? Était-ce par ma faute ?

— Je suis le chef de notre meute, le loup alpha de la vallée de l'Aube. Et tu as rencontré d'autres membres de mon espèce depuis ton arrivée dans ma vallée. Tu ne dois pas avoir peur, ça ne change rien entre nous. Je suis toujours le même, je suis toujours Robin.

Sa voix s'était adoucie à ses paroles. Il était toujours lui. Je hochai la tête, mais mon esprit était étrangement vide, peut-être le contre coup de cette atroce journée. Il me caressait agréablement les doigts pour me rassurer, inquiet à l'idée que je m'enfuie en courant.

— Ça me faisait du mal de te le cacher, mais j'ai une position compliquée. Je dois montrer l'exemple, il est interdit de dévoiler notre nature, surtout pour un alpha. Si les humains connaissaient notre existence, on serait des bêtes de foires, puis on finirait sans doute par être éliminés, les différentes périodes de l'histoire nous l'ont bien prouvé. Malgré ça, beaucoup d'hommes le révèlent à la femme qu'ils choisissent, heureusement d'ailleurs, car sinon tous les loups-garous seraient destinés à la solitude. Mais, c'est aussi que... Je ne souhaitais pas t'enchaîner à moi, ni à la vallée. Ma mère est partie, elle ne supportait pas tout ça, je ne voulais pas reproduire la même erreur que mon père. Il aurait été égoïste de te l'avouer pour que tu restes, il était hors de question que je t'impose quoi que ce soit.

Je comprenais qu'il ait gardé son secret. Comment pouvait-il savoir si j'allais tenir ma langue ? On ne se connaissait que depuis trois semaines seulement. Moi-même je ne lui avais rien révélé sur la mort de mes frères, alors que les enjeux étaient bien moindres. Et quelques heures plus tôt, je lui avais dit clairement que je ne voulais pas rester, avec ou sans secrets. Ne voyant aucune réaction de ma part, il reprit.

— Tu es encore glacée, je vais te réchauffer, viens par là.

D'un geste souple, il m'attrapa par les hanches et me tira jusqu'à lui. J'entourai son corps de mes jambes et profitai de son torse brûlant. Il referma ses bras sur moi, je posai mon visage dans son cou et me concentrai sur les battements de son cœur apaisants.

Il frotta son nez contre mes cheveux et soupira.

— J'ai eu tellement peur de te perdre Alex...

Je frémis. J'avais eu peur moi aussi, j'avais fait le mauvais choix en partant sans lui dire adieu. J'aurais pu mourir sans le voir une dernière fois...

Je profitai de ces quelques instants de répit avant de reprendre la discussion. Il fallait qu'on en parle. Que tout soit mis au clair, maintenant, afin de faire table rase pour notre possible futur.

— Qu'est-ce que c'est d'être un loup-garou ? Explique-moi.

— C'est comme si mon âme avait deux facettes. L'une d'elles est un « moi » humain, avec des sentiments humains, des réflexions humaines elles aussi. L'autre est un loup, plus bestial, plus sauvage, plus dangereux. Malgré ça, c'est une partie de moi. C'est assez complexe en faite. Depuis ton arrivée, j'ai tenu mon loup en cage, car il se fait assez... bruyant en ta présence.

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