Chapitre 14

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Déjà une semaine de passée.

Avec Robin, nous nous étions vus tous les jours, sans exception.

Paradoxalement, lorsque nous étions ensemble, je me sentais tellement... Légère, insouciante. Nous profitions de chaque minute, conscients que le temps était contre nous. Tout était simple avec lui, il s'assurait toujours de mon bien être, et dès que son regard croisait le mien, mes idées noires fuyaient se terrer dans les profondeurs de mon esprit, me laissant enfin respirer. Si je mettais de côté les secrets, les difficultés qui nous entouraient, être ensemble nous suffisait. Dans une autre vie, tout aurait pu être tellement différent...

Nous nous retrouvions tous les après-midis, dès qu'il finissait sa journée de travail : il passait me prendre à l'hôtel, et nous allions chez lui pour qu'il puisse se doucher. Ensuite, il m'accompagnait dans les montagnes où je faisais quelques photos du crépuscule, ou nous restions à profiter des derniers rayons du soleil d'automne sous son porche en bavardant. Nous avions également passé une nouvelle soirée Chez Ed, avec le reste de la bande. Matt, Conor, James, Ted, Jared, et Richard, le mari d'Hélène, que je rencontrais pour la première fois, étaient des hommes accueillants et pleins d'entrain. En leur compagnie, j'avais bizarrement l'impression d'être avec de vieux amis. James était le frère de Matt. Il était âgé de tout juste quinze ans. Il suivait son ainé partout, il vivait seulement tous les deux d'après ce que Robin m'avait expliqué. Il était très timide, et osait à peine croiser mon regard.

Je m'entendais particulièrement avec Conor, père d'une petite fille nommé Juliette. Il était un peu plus vieux que Robin et moi, très cultivé, et très intéressant. Un ou deux soirs par semaine, sa fille de quatre ans dormait chez Hélène et Richard. La médecin était sa marraine, et elle aimait beaucoup passer du temps avec l'enfant. Robin m'avait confié que la femme de Conor l'avait quitté trois ans plus tôt, et qu'il s'était battu pour récupérer la garde de Juliette. Ce fut une période compliquée, mais tout le monde à Aston s'était serré les coudes afin qu'il reprenne du poil de la bête, ce qui ne m'étonna guère.

Je me demandai comment ils me considéraient : je n'étais pas sa petite amie, mais tout son temps libre, il le passait avec moi. Je ne savais pas ce qu'il leur avait raconté à mon sujet, mais maintenant que je le connaissais un peu mieux, j'imaginais qu'il ne leur avait strictement rien dit.

Une complicité que je n'avais jamais espérée nous liait, et elle était visible aux yeux de tous, j'avais surpris certains regards approbateurs. C'était comme si je le connaissais depuis des lustres. Comme s'il avait toujours fait partie de moi. Lorsque je m'autorisais à penser à tout le bien qu'il me faisait, ma raison me rappelait à l'ordre. Il avait un secret, mais surtout, je n'étais pas prête. Pas prête à guérir mes maux, à faire mon deuil. Nourrir l'affreuse bête sombre en moi ravivait la présence de mes frères, les faisait exister. Tandis que Robin la faisait fuir, la terrorisait.

Notre attirance flottait constamment dans l'air, ce qui ne me facilitait pas la tâche. Dès que nous étions un peu trop près l'un de l'autre, ma peau se couvrait de chair de poule, et mon cœur s'emballait. J'avais constamment la sensation que mon corps était contre moi : mes réactions physiques étaient à l'opposé de ce que je voulais qu'elles soient en sa présence.

Quant à Robin, je surpris plusieurs fois son regard sur mes lèvres. Il retenait ses gestes avec application, s'empêchait de tendre la main vers moi, et préférait détendre nerveusement ses doigts.

Nous savions l'un comme l'autre que nous ne gagnerions rien à jouer à ce jeu dangereux, hormis de la souffrance lors de mon départ.

Malgré cela, nous vivions intensément ces quelques heures passées ensemble. Nos moments étaient ponctués de rires, de légèreté. Dès que je l'apercevais à m'attendre sur le parking de l'hôtel, une flamme semblait crépiter en moi : Robin était vraiment le meilleur remède à ma peine, je devais lui reconnaître.

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