- Comment as-tu pu commettre un tel acte, Lilya ? s'exclame ma mère, sa voix empreinte d'indignation alors qu'elle accompagne ses mots d'une gifle cinglante. Instinctivement, ma main se porte à ma joue, mais je demeure silencieuse.
Calmez-vous je vous prie ! intervient Dimitri, essayant d'apaiser la situation alors que nous nous tenons à l'entrée.
Elle le pointe du doigt.
- Vous, vous allez dire à votre patron qu'il est tout aussi coupable que ma fille. Qu'il devrait avoir honte ! Cette jeune femme est venue me voir, en larmes. Ils ont grandi ensemble et avaient le projet de se marier depuis des années maintenant ! Sa voix est glaciale, teintée de sévérité.
- Mon chef et votre fille...
- Sortez de chez moi, ordonne-t-elle sèchement.
- Monsieur Dimitri, vous pouvez partir, et merci pour tout, articulé-je d'une voix rauque.
- Êtes-vous sûr ? demande Dimitri.
J'acquiesce d'un signe de tête.
- Comment as-tu pu, toi qui as toi-même souffert d'infidélités ! poursuit-elle alors que nous pénétrons dans le salon.
- Maman... c'est compliqué...
- Cela n'a rien de compliqué, Lili. Tu ne peux pas te permettre d'être dans cette situation, pas toi ! Elle s'effondre en sanglots.
Je m'approche de ma mère et l'enlace doucement.
- Ton beau-père me trompe, laisse-t-elle échapper entre deux sanglots.
- Je sais.
Elle se recule légèrement pour me fixer du regard, et je peux voir la colère s'ancrer dans ses traits.
- Pourquoi ne m'as-tu rien dit ? demande-t-elle, sa voix imprégnée de frustration.
- Par crainte de te blesser, de te voir t'effondrer. Je n'aurais pas pu le supporter. Et surtout, parce que je connais cette douleur.
- Alors pourquoi, Lili ?
Je déglutis, cherchant mes mots avec précaution.
- Nous faisons semblant, maman. Sacha voulait mettre fin à ses fiançailles, il m'a demandé mon aide et j'ai accepté.
Je préfère qu'elle croie que je fais partie du plan, plutôt que de me considérer comme une simple marionnette utilisée pour atteindre ses fins.
- Lily, ce n'est pas ton genre, réplique-t-elle, essayant de comprendre.
- Quel est mon genre, au juste ? La fille docile qui ne commet aucune erreur, aucune folie, celle qui doit endurer en silence ?
- Non, non... Lily, je veux ton bonheur, déclare-t-elle d'une voix empreinte de tendresse, et cet homme semble te manipuler pour se débarrasser d'un problème encombrant, ce qui n'est pas normal.
- J'étais d'accord, j'ai voulu l'aider, je dis sans fléchir.
- Alors il est temps d'assumer les conséquences, et tu ne dois pas être la seule à les subir.
- Oui, je vais régler ce problème comme une grande. Et toi ?
- Je demande le divorce.
- Vous devriez envisager de consulter un thérapeute, il serait dommage de tout abandonner après tant d'années de mariage.
- Je ne peux pas, Lily. Je ne pourrai pas lui pardonner.
- Quoi qu'il arrive, je te soutiendrai.
- Allez, va te reposer, elle me propose, déposant un baiser sur mon.
- Encore un scandale, tu ne peux pas t'en empêcher, hein ?me lance Ethan, se tenant devant la porte de ma chambre.
- C'est typiquement moi, je rétorque d'une voix faussement joyeuse.
- Écoute, je me fiche de ta vie. Il me plaque contre le mur, son ton devenant menaçant. Mais conseille à ta mère de ne pas demander le divorce.
- N'est-ce pas ce que tu voulais ?
- Avant de découvrir que mon crétin de père n'a pas fait de contrat de mariage, il en a fait un avec ma mère, bordel ! s'exclame-t-il en frappant le mur avec rage.
- Tu veux dire que tu es tombé dans ton propre piège ? dis-je sarcastique.
- Ta gueule, Lilya. Pourquoi ne peux-tu pas disparaître pour toujours, bordel !
Il serre sa prise autour de mon cou.
- Vas-y, tue-moi, Ethan.
- Tu aurais dû crever.
- Quoi ?
- Rien. Il me relâche enfin et s'éloigne, les poings serrés.
Je reprends ma respiration et entre dans ma chambre, puis je verrouille la porte derrière moi.
- Putain, quel taré celui-là.
Je m'assois un moment sur la chaise de mon bureau pour laisser mes nerfs se calmer, puis je me remets au travail. Je termine mon texte accompagnant mon projet et l'envoie à ma prof. Je ne révise pas tous les détails de peur de me perdre dans la recherche de la perfection et de finir déprimée et incapable de le terminer. Malheureusement, c'est quitte ou double chez moi.
Je m'allonge ensuite sur le lit et me laisse emporter par le sommeil. Mais ce papillon de malheur vient se poser à nouveau sur mon visage, plus précisément sur mes yeux. Mon corps s'engourdit peu à peu et ma respiration ralentit considérablement. J'ai envie de m'échapper de son emprise, de me libérer, mais je n'y arrive pas. Quand je me réveille, je suis désorientée et plongée dans l'obscurité totale. Je m'assois pour reprendre mon souffle, puis je rentre sous la douche pour me débarrasser de la transpiration.
Un mois plus tard, les rumeurs sur Sacha et moi commencent à se calmer. Les magazines people n'ayant plus d'infos ou de photos à publier semblent avoir passé à autre chose. C'est pourquoi je reprends peu à peu une vie presque normale et m'autorise à sortir de temps en temps faire des courses avec ma mère.
Il m'arrivait même de faire un détour en vélo devant son imposant manoir, espérant apercevoir ne serait-ce qu'un fugace aperçu de lui, mais en vain. Il me manque terriblement ! Pourtant, il m'a utilisée pour se libérer de ses fiançailles, érigeant ainsi un mur infranchissable entre nous. Comment pourrais-je lui accorder à nouveau ma confiance ?
- Mademoiselle Lilya... me dit la voix au téléphone.
- Oui, c'est moi.
- Je suis la doyenne de la faculté des arts, Madame Taylor Brooks.
- Enchantée.
- J'avais envie de vous annoncer personnellement que votre projet sur le rêve et le cauchemar a attiré notre attention.
- Votre attention ?
- La commission chargée de dénicher les talents de demain.
- Une telle commission existe ?
- Oui, cela fait des années. D'ailleurs, nous fêtons nos dix ans le samedi prochain. Nous exposerons alors les œuvres de toutes les personnes désignées par notre jury. Et vous faites partie de la sélection.
- Oh, je suis vraiment honorée, balbutié-je, peinant à trouver mes mots.
- Nous serons très heureux de vous voir parmi nous et aussi d'entendre un petit discours de votre part.
- Les discours, ce n'est absolument pas mon truc, je réponds sans réfléchir.
- Ce sera nécessaire pour introduire votre expérience.
- Mon expérience ?
- Chaque projet artistique est une expérience, n'est-ce pas ?
- Oui, en effet.
- Je peux compter sur vous ?
- Oui.
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Tu diras oui
Roman d'amour- Vous, vous restez. Ordonne-t-il. - Je... Mon regard va entre lui et le directeur. Mes collègues s'arrêtent dans le couloir pour observer la scène. - C'est une assistante en stage, je ne vois pas... Prononce enfin le directeur. - Je sais, j'aimera...