Crazy!

Chapitre 10

NASH

Mes nerfs sont à vifs, je suis à deux doigts de retourner à l'intérieur de cette baraque pour lui faire comprendre qu'Holly n'est pas elle. Holly n'est pas celle de mon passé.
Ma colère se transforme en regret à l'instant où je me rends compte qu'elle me fait face. Ces cheveux virevoltent face au vent nocturne, elle frissonne. Ma main endolorie tremble dans les siennes, elle observe chaque écorchure, attentivement.

— Bon sang, Nash, qu'est-ce qu'il te prend ?

Je détourne mon regard du sien dans l'espoir de dissimuler le seul secret que je lui cache encore, honteux de ma réaction.

— Cette enflure ne te mérite pas, declaré-je fermement.

Elle secoue la tête, un pli se forme entre ses sourcils.

— Ce n'est rien de sérieux. C'est simplement... Du flirt, prononce-t-elle en espérant que sa voix s'essouffle.

— Du flirt ? l'interrogé-je, légèrement froid.

Elle hausse les épaules.

— Je ne veux rien de sérieux, alors si je veux juste flirter avec lui, ou est le problème ?

Cette fois, je rencontre ses yeux, ils expriment toute sa perplexité.

— C'est pas un mec bien Holly, lui apprends-je.

— Pourquoi ? me questionne-t-elle, dans l'incompréhension.

Je secoue la tête en cherchant les mots qui pourrait la dissuader de passer ne serait-ce qu'une minute de plus en sa compagnie, mais rien. Rien, si ce n'est un passé que je ne veux plus évoquer.

— Nash, tu me caches quelque chose, et je n'aime pas ça.

Je soupire, alors que son expression trahis la déception qu'elle ressent envers le meilleur ami que je suis en cet instant pour elle.

Mes phalanges me font souffrir, mon cœur se comprime au fur et à mesure que je vois sa confiance qu'elle a envers moi, faiblir petit à petit.

— Je te demande juste de me faire confiance Holly.

Elle reste confuse face à ce que je lui dis.

— Je dois, sous prétexte que tu me dises que ce n'est pas un mec bien, sans que je sache pourquoi, suspendre ce qu'il se passe entre lui et moi ? me lance-t-elle, soupçonneuse. Nash, je ne comprends pas.

Ma main se dégage des siennes.

— Parce que si je te le dis, ce n'est pas pour rien ! m'exclamé-je, à bout de nerfs.

Elle marque un recul, ses yeux m'analysent comme à l'affût de la moindre information qu'elle pourrait y détecter.

— J'ai du mal à te cerner depuis quelque temps, m'avoue-t-elle enfin.

Je fronce soudainement les sourcils.

Pas ça.

Pas encore.

Pas maintenant.

Pas elle.

— Tu t'es mis à me mentir, à m'inventer des excuses pour m'éviter...

Son regard est désormais orienté vers le sol, comme si elle ne voulait plus affronter le mien.

— Le jour où tu as déserté le terrain de basket en prétendant rejoindre des amis, alors que quelques minutes plus tôt, tu avais accepté de manger un bout avec moi. Il y a aussi le fait que tu ne m'aies pas dit que tu étais en essai pour un job... m'énonce-t-elle.

— Holly, ça n'a rien à voir.

— Ç'a tout à voir, Nash. Pourquoi me mentir, pourquoi ne plus tout me dire comme avant ?

Je reste de marbre, sans pouvoir mettre de mots sur ce que je ressens. Je l'évite parce que mes sentiments dépassent ma raison. Je lui mens parce que j'ai tendance à croire que l'espace que ça instaure entre nous, me permettra de mettre un terme à ces foutus sentiments que je ne suis même pas sûr de comprendre moi-même.

Notre amitié, c'est ce que j'ai de plus sincère, de plus important dans ma vie. Elle me permet d'oublier un peu le reste. Alors pourquoi prendre le risque de tout réduire à néant pour quelque chose d'incertain ? J'ai pourtant tendance à pouvoir mettre des mots sur ce que je pense ou ce que je ressens d'habitude, mais quand ça concerne Holly, tout devient soudainement compliqué.

Dan est un sujet sensible, et plus particulièrement quand il s'agit d'Holly. Je sais de quoi il est capable, et ce qu'il est prêt à faire pour voir ce que j'ai de plus précieux, disparaitre sous mes yeux.

— On devrait y aller, la soirée est en train de s'éterniser de toutes manières, déclare Holly, déçue.

J'opine d'un signe de la tête. Elle part devant sans me laisser le temps de dire quoi que ce soit. Je marche silencieusement à ses côtés jusqu'à l'arrêt de tram. Elle aussi ne prononce pas un mot, sûrement contrariée par ma présence, qui l'accompagne.

— Holly ? tenté-je de briser le silence.

— Je n'ai pas envie de parler Nash, j'ai simplement envie de rentrer.

Coupable, je m'immobilise, en la rattrapant doucement par le poignet, afin qu'elle ne s'éloigne pas.

— Holly, attends.

Elle se retourne pour me faire face. Son regard manifeste son agacement.

— Il y a des choses pour lesquelles je ne suis pas doué, et t'expliquer certaines choses en font partie.

— Je suis ta meilleure amie, tu sais que peu importe ce que tu me dis, ça ne changera rien entre nous.

C'est justement ça le problème.
Ça changerait tout.

Comme pour lui faire comprendre que ça m'est impossible, je secoue la tête.

— Je ne te mens pas parce que je le veux... avoué-je. Je ne ferai jamais rien qui pourrait te blesser.

— Je sais, soupire-t-elle. J'ai juste l'impression que plus ça va et plus ce qu'il y a entre nous n'est plus comme avant, Nash.

Mon palpitant rate un battement.

— Ne dis pas ça... soufflé-je.

Elle oriente son visage vers le sol, comme si elle en avait assez de s'attarder sur le sujet. Elle n'est pas du genre à se prendre la tête, Holly est cette fille sans prise de tête, qui aime profiter plutôt que de s'éterniser sur des choses futiles.

Nous reprenons notre route sans un mot, et moi, je m'inquiète déjà du tournant que pourrait prendre notre amitié.