Crazy!

Chapitre 36

NASH

— Holly ? soufflé-je contre toute attente.

Elle reste figée un instant, l'air absente.

— Je vais vous laisser, je dois rentrer de toute façon, annonce Laura, à qui je ne prête même plus attention.

Elle redescend de la rambarde sur laquelle elle s'était assise à mes côtés.

— Au revoir, Nash, souffle-t-elle comme un air d'adieu.

Elle passe devant moi, laissant derrière elle les effluves de ce parfum que j'adorais avant.

Maintenant, je préfère l'odeur de pomme.

Je descends à mon tour de la rambarde et m'approche prudemment de ma meilleure amie.

— Holly ? je répète son prénom, comme pour la faire revenir sur terre.

Elle semble reprendre ses esprits, seulement, elle évite mon regard, son attention rivée sur le sol. C'est seulement maintenant que je remarque que ses cheveux sont négligemment attachés en un chignon désordonné. Je prends délicatement son visage en coupe, afin de croiser ses iris. Je m'en veux dès lors que j'aperçois son regard rougi par les larmes. Ses jolis yeux sont larmoyants.

Cette situation la torture autant que moi, sauf qu'elle a toujours été la plus expressive de nous deux. Sa sensibilité me comprime le cœur lorsque je suis la cause de ses larmes.

— Holly, je suis désolé...

Elle hoche lentement la tête, elle tremble de tout son corps. J'ôte rapidement le pull que je porte pour le lui enfiler sans plus tarder, ébouriffant quelques-unes de ses mèches rebelles. Je me retrouve en manches courtes en pleine nuit et c'est le cadet de mes soucis.

— Dis quelque chose, je t'en prie, murmuré-je presque à son attention.

Ses doigts jouent nerveusement avec les cordons de mon sweat. Elle, qui rayonne sans arrêt, me fait sourire et rire sans même le faire exprès, semble si triste maintenant.

— Nash, je ne changerais jamais ce que tu ressens pour cette fille. s'élève enfin sa voix cassée.

Je crains déjà la suite de ce qu'elle va me dire.

— Tu te rappelles le jour où je t'ai demandé si tu pensais toujours à elle ?

Je hoche la tête. Évidement, comment oublier le jour où je l'ai embrassé pour la première fois.

— Ce jour-là, tu m'as répondu "Toujours". J'ai su ce jour-là, à quel point Laura était importante pour toi.

Elle attrape ma main, même si j'ai l'impression que mon contact la brûle, comme si elle s'infligeait intentionnellement cette douleur.

— Holly, attends une seconde...

— Je ne peux rien contre ce que vous avez vécu, ça a été l'un de tes premiers amours, et ça ne s'oublie pas, me coupe-t-elle.

Une larme sillonne sa joue, je n'ai qu'une envie, c'est de la prendre dans mes bras, de lui dire de se taire, parce qu'elle se brise un peu plus le cœur à chacune de ses paroles.

— Je ne veux juste pas que tu regrettes quoi que ce soit, chochotte-t-elle presque. Si tu dois continuer ton histoire avec elle, alors j'aimerais autant en finir maintenant avec tout ce que l'on a entretenu au-delà de notre amitié, tous les deux.

Elle sonde mon regard à la recherche d'une quelconque réponse, une quelconque parole qui pourrait la rassurer au moins un peu.

— Si jamais c'est le cas, je veux que tu sois honnête, et j'essaierais d'oublier ce que je me suis surprise à ressentir pour toi, Nash.

— Bon sang, Holly, arrête.

Ses sourcils se froncent, la confusion se lit sur les traits de son visage.

— Notre histoire, entre elle et moi est terminée depuis le jour où je l'ai vu dans les bras de Dan, déclaré-je sans passer par quatre-chemins.

J'attrape ses mains gelées dans les miennes.

— Je t'assure qu'il n'y a plus rien entre elle et moi. Et encore moins maintenant...

Je ne résiste pas plus longtemps, j'ai besoin de la réconforter, j'ai besoin de sentir son corps contre le mien. Elle se laisse entraîner dans mon étreinte, elle serre mon t-shirt entre son petit poing. C'est dingue comme elle tremble.

— Ç'a été mon premier amour, c'est vrai, avoué-je le cœur serré. Mais ça n'a pas été le plus fort.

Je sens la joue d'Holly contre mon t-shirt, je sais que dans nos étreintes comme celle-ci, elle écoute les battements de mon cœur. Dès qu'elle en a l'occasion, c'est ce qu'elle fait à chaque fois. Comme pour se rassurer, comme si elle écoutait mon cœur plutôt que ce que je lui dis, comme si c'était la vérité à l'état pur et qu'elle n'écoutait que lui.

— Parce ce que je ressens pour toi est encore plus fort que ce que je ressentais pour elle, ou pour quiconque Holly, continué-je, laissant cette fois mon cœur s'exprimer plus que ma raison.

Elle relève le nez dans ma direction, je croise son regard vert lorsqu'il rencontre le mien. Je suis obligé d'incliner légèrement ma tête vers le bas, pour frôler son petit nez froid avec le mien.

— Je suis fou de toi, et je n'ai jamais été aussi sûr de ce que je ressens, tu m'entends ?

Elle hoche lentement sa tête.

— Je t'aime, Ly.

Ces mots, je sais que je ne les dirais jamais plus sincèrement que maintenant, parce qu'ils sont tout ce que je peux exprimer pour lui montrer ce que je ressens pour elle. Ce sont les mots qui me semblent le plus juste pour lui faire comprendre que c'est une fille qui compte plus que n'importe laquelle pour moi.

Elle se hisse sur la pointe des pieds et me laisse effleurer ses lèvres. Je ferme les yeux, appréciant la chaleur que dégagent nos deux corps lorsqu'ils sont si proches l'un de l'autre.

La pluie qui commence à s'abattre de plus en plus sur nos deux têtes nous importe peu. Elle est d'une douceur sans nom lorsqu'elle happe réellement mes lèvres, cette fois. Je la laisse prendre le contrôle de ce baiser, lui laissant par la même occasion la liberté de s'approprier mon âme.

Parce que je ne l'aime pas simplement de tout mon cœur, mais aussi de tout mon corps.

De toute mon âme.