Mr. & Mrs. Spike (Tome II)

Mission 34 : Me séparer de toi

Je me réveille en sentant un bras enroulé autour de moi. Je n'ai pas besoin de me retourner pour savoir que ce n'est pas celui de Scott, mais bel et bien celui de l'assassin qui agite mon cœur par sa seule présence. Ses poils sont plus clairs, son muscle plus développé.

Je me sens en sécurité.

Lorsqu'il commence à remuer, je roule pour lui faire face et suis immédiatement assaillie par une vague de son parfum enivrant. Il grogne tout en caressant tendrement le bas de mon ventre. Je me fige, surprise par ce geste qu'il réalise de manière inconsciente.

Il a la main posée sur le... bébé.

Enfin, pour l'instant, ce n'est qu'un fœtus, dont le premier battement de cœur ne dépend que de moi. Ai-je envie de renoncer à ce cadeau du destin, sans savoir si une nouvelle opportunité se représentera ? Vais-je laisser la peur me voler une nouvelle partie de moi ?

Après la discussion que j'ai eue avec Erik, je ne sais plus trop. J'aimerais tellement envisager cette grossesse sereinement, mais chaque fois que j'imagine garder cette petite graine, je sens un nœud se former dans mon estomac et mes poumons se vider de leur oxygène.

Je ne serai pas une bonne mère.

Et franchement, je n'ai aucune envie de mettre au monde un enfant qui sera malheureux. J'ai connu dix-huit années de manipulation, où je ne représentais que déception aux yeux de ma mère, où j'avais l'impression de ne jamais suffire. Ce genre de choses laissent des traces. Hors de question d'imposer ça à un enfant si je peux l'éviter.

Mais il y a Erik... Erik qui est heureux de voir ce que la fusion de nos corps amoureux a créé. Erik qui fera assurément un bon père. Si moi, je ne suis pas à la hauteur, lui le sera, je n'ai pas le moindre doute là-dessus.

Absorbée par mes pensées, je ne remarque pas tout de suite qu'il a ouvert les yeux et qu'il me fixe à présent avec amour.

— Bonjour, souffle-t-il, les cheveux en bataille.

Je fonds devant ce tableau. Son bâillement me tire un large sourire amusé.

— Bonjour, mon amour, susurré-je.

Ce surnom que j'utilise rarement l'interpelle. Il darde aussitôt un regard féroce sur moi.

Déjà émoustillée par ce corps chaud que je sens contre moi, par ces larges épaules que la couette dévoile, je m'empresse de quitter le lit avant de succomber.

— Je vais préparer le petit déjeuner, annoncé-je en dépit de ses râles de protestation. Tu me rejoins ou tu te rendors ?

— Je suis là dans quelques petites minutes, m'assure-t-il en fermant déjà les paupières.

Je ris, le cœur plus léger que ces derniers jours.

En veillant à ne pas faire trop de bruit, j'enfile une petite robe noire et m'éclipse. Seulement, ce que je découvre dans la cuisine me pétrifie sur place. C'est comme si je ne savais brusquement plus comment respirer, comment faire bouger mes jambes, comment articuler un mot. Il me faut deux bonnes minutes pour comprendre que je ne suis pas en plein cauchemar. C'est bien réel.

Scott est avachie sur la table, une bouteille de vodka presque vide devant lui.

Je commande à mon cœur fou de se calmer, puis m'avance discrètement vers le meuble qui renferme verres et autres récipients. J'ai besoin d'un thé pour me remettre les idées en place. Ça devient urgent.

Malheureusement, la tasse tinte contre une autre, ce qui sort Scott de sa brume alcoolisée.

— Waouh, ma tête... Qu'est-ce que j'ai mal... se plaint-il dans une grimace.