Mission 32 : Revenir à la vie

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L'obscurité.

La peur.

Le vide.

Je m'y noie pendant de longues heures, ce qui paraît des jours, avant que, sous mes paupières, le noir ne cède la place à la lumière. Une lumière dérangeante, aveuglante.

Aucune chance que je sois au paradis après tout ce que j'ai fait. Est-ce que ça veut dire que je suis vivante ?

Petit à petit, ma perception me revient. Mon corps semble être fait de coton, mes sens sont émoussés. Malgré tout, je sens que je ne suis pas seule, perdue dans le néant. Autour, la vie grouille.

Le bip constant que j'entends est comme un repère pour mon esprit errant ; je m'y accroche de toute mon âme. À force de me concentrer dessus, je perçois d'autres bruits : des conversations, des pas, des sirènes. Puis des odeurs, en particulier celle du désinfectant.

Au moment où j'ouvre finalement les paupières, une douleur fulgurante assaille mon crâne. Un bourdonnement l'accompagne. Je fronce le nez et me masse les tempes dans une grimace. C'est là que mes doigts rencontrent une bande de tissu enroulée autour de mon front.

Où suis-je ?

Une main vient soudain presser la mienne, me ramenant définitivement à la réalité. Mes yeux papillonnent, se fixent sur ce contact qui fait pétiller mon cœur.

— Amanda !

Lorsque je reconnais cette voix grave et puissante, une immense vague de soulagement déferle en moi.

Erik.

Je ne mets pas longtemps à comprendre que je suis dans une chambre d'hôpital. Si les murs blancs et cette odeur aseptisée ne m'avaient pas mise sur la piste, la perfusion plantée dans mon bras aurait suffi. Or, peu importe combien j'aimerais me précipiter vers la sortie en claquant la porte derrière moi, mes muscles ankylosés m'en empêchent.

J'ai mal partout.

Erik s'empresse de prévenir les infirmières que je suis réveillée. Elles l'informent que le médecin va venir nous voir. En attendant, il est préférable que je reste tranquille. Un verre d'eau est à ma disposition sur la table de nuit.

Alors que je me penche pour l'attraper, l'assassin me devance et le porte à ma bouche. J'en bois quelques gorgées pour calmer ma gorge sèche. Puis je lie mes doigts à ceux d'Erik avec tendresse.

Inutile que je lui demande ce qu'il s'est passé, je m'en rappelle plus ou moins. Nous étions dans l'appartement de Calvin. J'ai essayé de raisonner Spencer, en vain. Il a enclenché la minuterie. J'ai couru pour éloigner la bombe le plus possible, mais le souffle de l'explosion m'a projetée contre un meuble. Un bruit de craquement est le dernier souvenir qu'il me reste.

J'étudie l'assassin qui me fait face. Ses beaux yeux verts sont dévorés par l'inquiétude. Il a l'air de s'en être plutôt bien sorti. Il n'a que quelques coupures sur la joue.

J'ai accompli ma mission.

— Depuis quand suis-je ici ? lui demandé-je d'une voix râpeuse.

— Hier, souffle-t-il.

Je ferme les yeux pour encaisser la nouvelle. Je hais l'idée d'être restée si longtemps inconsciente.

— Qu'est-il arrivé aux autres ?

Il accentue la pression sur ma main.

— Spencer est inconscient. Il sera entendu par la police à son réveil. Nul doute qu'il va être placé en garde à vue pour tentative de meurtre. Calvin est indemne. Il est déjà reparti travailler.

Mr. & Mrs. Spike (Tome II)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant