Mr. & Mrs. Spike (Tome II)

Mission 41 : Te donner la vie

Quatre mois plus tard...

— Qu'est-ce que tu fais ici ? me demande Calvin, étonné de me trouver devant son bureau en cette fin de matinée. La visite pouvait attendre deux mois de plus.

Une fois que je suis entrée, il referme la porte derrière moi, non sans adresser un rictus à Lily, à moitié concentrée sur son appel. Elle lui fait les gros yeux pour le pousser à mettre fin à cet entretien et à me chasser du bâtiment. Elle pense que j'en fais trop, que je devrais entamer une pause de quelques mois. Cependant, mes responsabilités en tant que cheffe des trois agences ne me laissent pas de répit.

Je pose mon sac sur le fauteuil voisin avant de m'installer. Même s'il râle, je sais que ma présence lui fait plaisir. Ça fait déjà quelques semaines que nous ne nous sommes pas vus. Avec l'arrivée prochaine du bébé, je limite mes déplacements au maximum.

Disons surtout que je peine de plus en plus à me déplacer.

Je me cale confortablement dans mon siège avant de lui répondre sur un ton professionnel :

— Tu m'as dit que tu rencontrais des problèmes avec certains producteurs.

À présent assis derrière son bureau, Calvin hausse un sourcil.

— Les problèmes peuvent aussi attendre deux mois de plus. Tu sais ce qui ne peut pas attendre ? Toi. Ce bébé. Il est temps de se reposer avant son arrivée. De profiter de ton fiancé. D'ailleurs, il doit être ravi de te savoir ici, pas vrai ?

Je ne peux retenir ma grimace.

S'il savait que je suis actuellement ici, dans les bureaux de ViSion, pour parler boulot, il me tuerait sur place. Ou il m'enfermerait dans un sous-sol froid avec des menottes. Je deviendrais sans nul doute sa nouvelle victime.

— Il n'est pas au courant, murmuré-je en me mordant la lèvre.

Mon ami écarquille les yeux.

— Quoi ? Amanda, bordel ! Il croit que tu es tranquillement à la maison alors que tu es ici ?

— Il est trop protecteur, riposté-je. Je n'ai plus rien le droit de faire !

Il se passe nerveusement la main sur le visage, conscient des risques que nous encourons tous les deux. Si Erik apprend ma présence dans son bureau, il s'en prendra également à lui. Il m'accusera de vouloir absolument voir Calvin, quitte à nous mettre en danger, le bébé et moi. Et il lui reprochera d'en profiter.

Je roule des yeux intérieurement. Sa jalousie à l'égard de Calvin ne s'est pas vraiment estompée. Il faudra du temps pour qu'il comprenne que je n'ai pas l'intention de m'offrir à un autre homme que lui. J'en ai conscience, je suis à l'origine de cette incertitude qui le tenaille. Et je promets de le rassurer en lui renouvelant ma fidélité chaque jour, mais pas aujourd'hui.

Aujourd'hui, je n'y arrive plus, c'est trop.

— Il angoisse. Tu peux le comprendre, quand même ?

C'est à peine si j'ai le droit de faire pipi tranquillement. Il est toujours caché derrière une porte, dans le coin d'une pièce, à me surveiller. J'ai conscience que c'est le seul mécanisme qu'il connaît pour faire face à la peur. Observer, analyser, contrôler. Sauf que c'est devenu quelque peu lourd à supporter...

— Moi aussi, j'angoisse. C'est pour ça que j'ai besoin de me changer les idées. Alors, dis-moi tout, reprends-je.

Tandis qu'il évoque les problèmes qu'il rencontre avec ses producteurs, qui se battent pour avoir les meilleurs créneaux, animés par une concurrence féroce, un éclair me traverse. Je m'installe dans une autre position pour atténuer la brûlure qu'il vient de provoquer.