Chapitre 30

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Quelques jours plus tard, le 11 juin 2035.

Les derniers jours ont été mitigés. Déjà, très stressants de par l'échéance d'aujourd'hui. Il y a également eu énormément de colère, à cause de Louisa et de son comportement lors de nos deux dernières entrevues. Elle faisait tout pour ralentir les débats et me faire rentrer le plus tard possible. Heureusement, quand j'arrivais à la maison, la douce Océane était à mes côtés. D'ailleurs, elle, continue son apprentissage, en assimilant comment bien concilier vie de couple et BDSM. Pour certains, il peut être très compliqué de passer d'un rôle à un autre, mais chez nous, ça se fait très naturellement. Il me tarde d'ailleurs de lui apprendre de nouvelles choses, mais la période ne s'y prêtait pas vraiment.

Aujourd'hui c'est le grand jour, le jour de la grande audience, l'audience finale, l'ultime procès. C'est aussi et surtout la fin de cette affaire. Après ça, je n'aurai plus jamais affaire avec Louisa et Flavie, et pourrai les tenir loin de ma vie, aussi bien privée que professionnelle.

La journée a bien débutée. Océane, toujours si attentionnée, et sachant que cette journée va être affreuse pour moi, m'a réveillé avec de délicieuses caresses de ses ongles sur mon dos, et le petit-déjeuner au lit : deux croissants. Pour elle, du café, et pour moi, du chocolat chaud.

Une bonne douche chaude, une préparation expresse, puis il est déjà temps de se mettre en route. Pour me mâcher le travail jusqu'au bout, Luc m'a proposé de nous prendre pour que je n'ai pas à conduire.

Au bout d'une trentaine de minutes, nous arrivons devant la Cour de cassation. Elle n'a rien à voir avec le tribunal des deux premières audiences. Elle est si impressionnante. Je pense qu'elle ferait frissonner n'importe quel avocat. Il y a quelques années, seuls des avocats spécialisés avaient le droit d'exercer près la Cour de cassation, comme la loi le prévoyait. Mais depuis peu, tous les avocats peuvent y défendre leur client. Ça a constitué un tournant majeur dans l'évolution de cette institution.

Le bâtiment n'a pas l'allure d'un tribunal, mais plutôt d'un château. On comprend de suite en le voyant que c'est la juridiction française suprême, aucune ne la surpasse. A l'intérieur, les énormes piliers, les multiples dorures et les peintures sur les plafonds ne font qu'accentuer le mythe.

C'est à la fois une fierté et une grande source d'inquiétude de pouvoir y plaider. Surtout que mon concurrent n'en est pas à sa première fois.

Tout le monde prend place, et la salle est noire de monde, encore plus que lors des deux premières audiences.

A l'entrée des juges, le vacarme infernal s'apaise immédiatement, instaurant un calme plat. Puis dans ce silence ahurissant, ils s'installent lentement et charismatiquement.

Puisque c'est moi qui ai formé le pourvoi en cassation, c'est à moi de parler en premier. Je m'avance, et le silence est transpercé par une certaine clameur, de petits rires disséminés partout dans la salle, de personnes qui pensent déjà se délecter de mon humiliation.

Je demande autoritairement le silence, puis débute ma plaidoirie finale. Celle-ci dure bien dix bonnes minutes, dans lesquelles je fais valoir de solides arguments juridiques ainsi que de nombreuses valeurs de la société, avant de sortir ma pièce maîtresse. A la fin, je me retourne pour regagner mon pupitre, puis je me nourris du spectacle qui se joue devant moi. Les rires ont été remplacés par de l'incompréhension. Quant à l'avocat adverse, il n'a jamais eu la mine aussi pâle et fermée.

C'est là que j'ai compris que j'avais réussi mon coup. Puis il s'avance à son tour, et parle. Il est beaucoup moins éloquent et confiant que d'habitude, vraisemblablement perturbé. Dans un dernier espoir, il essaye de contrer mon argument final, mais n'y étant pas préparé, c'est très confus.

MienneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant