34. 𝕯𝖊𝖆𝖗 𝕹𝖊𝖛𝖆

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ℕ𝕖𝕧𝕒 𝕎𝕙𝕚𝕥𝕖

Est-ce qu'on était trop jeune pour ça ? 

– The Neighbourhood

Un an avant...

Une violente gifle brûle ma joue droite et les larmes elles, me brûlent les yeux. Je fixe devant moi, les lèvres pincées pour ne pas riposter. Ma patronne continue de me hurler dessus et mes oreilles commencent à siffler. 

La peur m'envahit peu à peu et le fait de ne servir à rien sur cette terre me revient en tête. Mon cœur se soulève dans ma poitrine tandis que je me sens m'enfermer sur moi-même. Mon corps entier tremble, n'étant plus en mon contrôle. 

J'ai cette impression qu'en dessous de moi, le monde se sépare en deux et que je suis bloqué. Au lieu de m'enfuir, je reste au milieu du chaos. 

Une deuxième gifle me brûle la joue gauche. 

Pas de jaloux... 

Je baisse la tête, les poings crispés jusqu'à former des demi-lunes sur mes paumes.

— T'as de la chance d'être handicapé. Je t'aurais déjà viré sinon.

Puis elle s'en va, me laissant seule face à moi-même dans le placard à balais. 

Et c'est maintenant que je lâche tout ce qui s'est perdu dans mon cœur ces derniers temps. Mes larmes déferlent sur mes joues et ma main sur la bouche bloque le bruit de mes plaintes transformées en pleurs. M'écroulant à terre, je m'abandonne à la tristesse que j'ai essayé de cacher depuis quelque temps. 

Il est facile pour certains de mettre de côté ce sentiment angoissant qui vous oppresse la poitrine, mais pour moi, ce n'est pas le cas. 

Alors de la poche de ma blouse blanche, je récupère les cachets contre l'angoisse que les psychiatres m'ont prescrits. Ma vision floutée m'empêche d'inspecter la boite que je tiens dans la main, l'envie de prendre tous les cachets en même temps. 

Qu'est-ce qui m'en empêche après tout ? Le monde n'a pas besoin de moi... 

Le bip d'urgence sonne et contre moi et mes sentiments, je me relève en fourrant la boite dans ma bouche sans avoir pris aucune pilule et sèche mes larmes avant de sortir du placard à balais. 

Saphir dit que pleurer peut m'aider à aller mieux, que rien ne sert d'accumuler son mal-être avant qu'il n'explose et qu'on fasse quelque chose qu'on regrette. Et en parler, c'est ce qu'il y a de mieux à faire.

—Neva ! On a besoin de toi pour des points de suture en salle de chirurgie, m'indique une collègue.

Je renifle une dernière fois et mets de côté justement ce mal-être. 

Pleurer ne sert à rien dans mon cas, je me sens toujours aussi inutile. 

Les portes coulissantes s'ouvrent, je lève mes mains pour que l'on puisse m'enfiler une blouse bleue, un masque, des gants et une charlotte sur ma tête avant que je change de chaussure. Puis mon pied appuie sur un bouton et les portes de la pièce chirurgicale s'ouvrent. On m'installe des lunettes avec loupe intégrée alors que je m'approche du patient sur la table. Assez jeune et en piteux état.

—Accident de voiture, plaie profonde de cinq centimètres soignés. Est-ce que tu penses pouvoir fixer et terminer le travail Neva ?

En face de la table, mes yeux divaguent vers mes mains tremblantes.

—Ouais, je peux le faire...

Non, c'est faux... 

Et ça se confirme lorsque j'essaye de rentrer le fil dans l'aiguille. Si ma tristesse ne me permet pas d'effectuer mon travail correctement alors vraiment, à quoi je sers ? 

𝐓𝐡𝐞 𝐃𝐞𝐯𝐢𝐥'𝐬 𝐒𝐰𝐚𝐧Où les histoires vivent. Découvrez maintenant