7 -Giulian-

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Il est des regards qui vous percutent de plein fouet. Qui vous transpercent jusqu'à l'âme, s'imprimant en vous à jamais. Pourquoi ? Par quelle alchimie ?

A partir de ce jour, de ce foutu jour-là dans ce parc misérable, sa vie entière avait basculé. Cupidon l'avait dégommé et la blessure ne s'était jamais vraiment refermée. Il l'avait aimé, autant qu'il était possible d'aimer. Il l'avait fait rire, pleurer aussi. Et chacun leur tour, ils avaient toujours fini par tout faire foirer. Plusieurs fois Giulian avait abandonné, baisser les armes. Il avait comblé ses vides ailleurs, avec d'autres, dans le travail ou encore remit sa vie en jeu dans les bras de l'adrénaline et du danger. Il avait échoué plusieurs fois, la voyant s'en remettre à d'autre cœurs plus méritants, plus fidèles, plus sages surement. Ces multiples échecs avec elle enterraient toujours un peu plus profondément son estime de lui-même.

Pourquoi sa vie n'était qu'enchainement de batailles ?

Apparemment, dans leur cas, l'amour ne suffisait pas. « Ils vécurent heureux et eurent beaucoup d'enfants » n'était pas la destinée de chacun, même dans les contes de fée modernes. C'était un luxe, un honneur.

Et pourquoi ne répondait-elle pas à son dernier message ?

Était-ce le choix des anges ? D'une fameuse intervention divine qui se jouerait à ce moment où, ce n'est plus la nuit, mais pas encore tout à fait le jour. À mi-chemin entre les songes et la conscience... Était-ce à ce moment-là que se jouait l'écriture d'un destin ? Le choix d'un début, ou d'une fin ?

Dans tous les cas, ce que Giulian savait lui, c'est que parfois le destin, il fallait lui forcer la main... Comme il y a 20 ans... quand déjà la menace planait au-dessus de leur couple qui n'en était même pas encore un...

« Allez mec, ça fait des jours que tu lui tourne autour faut y aller là. Elle attend que ça. J'en peux plus de t'entendre parler d'elle toute la journée. Hey, tu sais quoi, si ce soir tu fais rien gars, c'est moi qui le fait à ta place. Après tout je suis « seultout » en ce moment. Il y a pas de raison. », l'avait mis en garde Youss.

« Sur ma vie, tu la touche je te tue », lui avait-il répondu en se levant, mettant ainsi fin à leur partie de Fifa avant même la première mi-temps.

Son père une fois de plus était hospitalisé et ils étaient libres de squatter chez lui. Du canapé élimé Pedro relançait un match, énervé par cette perte de temps.

« Ba vas-y alors, arrête de parler. Youss a raison », lui conseilla simplement cet ami d'enfance en qui il aurait confié jusqu'à sa vie.

Il aurait aimé le croire, l'écouter, mais c'était compliqué. Déjà, car elle l'impressionnait. Depuis le début il avait l'impression qu'elle l'attirait comme une sirène dans ses filets. Elle l'hypnotisait pareil à la danse d'une flamme sur laquelle il avait peur de se bruler. Et dès qu'il s'approchait un peu trop prêt, elle fuyait, se refermait complètement. Elle le désarçonnait... Et ça, il détestait. Mais en vrai, il avait peur. Et ça, il détestait encore plus.

« Ok, ce soir je viens. Ce soir, Sarah ne sera plus qu'à moi. »

Car Giulian, les défis, il connaissait. Rien de sa vie n'était pas un combat.

« C'est bien gars. Putain penalty ! Djéè y a penalty là ! »

Ce soir-là, pour la dernière soirée de l'année 2002, une fois leur session Fifa terminée, il avait commencé à prendre les rênes de son destin en main.

Et il y a une semaine, cherchant parmi les milliers d'Agathe au monde, la seule et la plus précieuse à ses yeux, il tomba sur sa dernière publication.

La vie lui avait aussi appris qu'aux travers de la brume, on y découvre parfois des impasses couvertes d'espoir, une étoile que l'on pourra suivre sans se retourner, la douceur d'une nacre qui pensera les plaies, tout comme la chaleur d'une flamme jumelle qui comblera nos peines.

La jeune avocate était plus que présente sur les réseaux sociaux, alors il avait provoqué une nouvelle fois sa chance. Il lui avait quémandé des infos et, surement touchée par ses mots et leur histoire de toujours, elle lui avait appris pour son divorce récent avec ce médecin que tous deux n'avaient jamais pu encadrer, et surtout, elle lui avait donné son numéro.

Déterminé, Giulian s'empara de nouveau de son téléphone. Il effaça toutes les notifications en attentes d'ouverture qui lui encombraient l'écran, et appela Sarah.

Flammes Jumelles, putain de Karma ! (En Cours)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant