Chapitre 14 : De la chaleur à la peur

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Mes yeux sortent de leurs orbites.

Je ne m'attendais pas à ça. Je ne m'attendais pas à ce qu'il fasse ça !

            — Qu'est-ce que tu fais ? lui crié-je en le regardant déambuler dans la salle de bain avec ses fesses rondes à l'air.

            — Tu m'as dit de m'habiller, alors c'est ce que je fais !

J'avais oublié qu'il prenait toujours tout au pied de la lettre. Il m'énerve !

Face au miroir situé devant le lavabo, il récupère son caleçon noir et de dos, ses fesses dans mon champ de vision, l'enfile avant de se retourner avec ce sourire satisfait sur le visage. Il le sait, malgré ma volonté, je n'ai pas pu m'empêcher d'observer l'entièreté de son corps. Ma volonté de ne plus jamais laissé mon cœur entre ses mains est puissante, mais l'amour que j'ai pour lui qui ne disparait pas l'est d'autant plus.

Persuadé d'avoir gagné une manche, persuadé que je baisse peu à peu mes barrières, il me dépasse sur le pas de la porte, déposant un baiser furtif sur ma joue que je n'ai pas le temps d'esquiver avant de déclarer :

            — Bonne douche mon petit diable !

Et il ferme la porte derrière lui.

Qu'est-ce qu'il vient, encore, de se passer ?

***

Après son départ, je m'empresse d'aller fermer la porte qu'il a simplement claquer. Il ne manquerait plus qu'il ait l'idée d'échanger les rôles.

Me déshabillant à la hâte, je ne prends même pas la peine de placer le thermostat sur "chaud". Au contraire, j'ai besoin que mon corps se refroidisse ; et ce n'est pas la course qui me fait cet effet-là. Le voir nu devant moi, son humour parfois culotté mais qui m'a tant fait rire, a rappelé en moi tous les moments que j'ai passé avec lui. Pour être honnête, si je n'avais pas eu à vivre mon début de grossesse ainsi que son arrêt sans lui, j'aurais peut-être pu le pardonner. Quand on y réfléchit bien, il avait peur d'encore me perdre, il préférait ne pas m'avoir dans sa vie que de me voir mourir par sa faute. N'est-ce pas une preuve d'amour plus grande que celle de vivre avec la personne qu'il aime en sachant pertinemment qu'il l'aurait mise en danger ? De plus, je suis persuadée que Jordan le tenait régulièrement au courant de ma vie, je me demande même si ce n'est pas lui qui lui demandait de me voir chaque mois. Surtout que, le temps que j'étais à l'hôpital, Jordan venait me voir presque chaque jour, et, j'en suis désormais persuadée, c'était pour Matthew.

D'autre part, je ne parle même pas de l'effet que ma procuré ce baiser sur ma joue, l'odeur masculine de son parfum boisé que j'ai tant reniflé m'a rappelé tout ce temps passé dans les bras l'un de l'autre. Et ce baiser, cette décharge qu'il a entrainée, je ne me souvenais même plus de cette sensation. Je pensais que depuis qu'il était parti mon cœur était fermé, à tout homme, et que je ne pourrais plus jamais ressentir ça. À cet instant, j'ai eu la sensation d'être brulée, consumée de l'intérieur. Et je le sais, même si je ne l'avouerai jamais, à cet instant j'aurais pu craquer. Les sentiments que j'ai pour lui ne sont absolument jamais partis, j'en suis convaincue. Même si je suis profondément furieuse qu'il m'ait laissé de cette manière, savoir qu'il l'a fait pour me protéger, dans une intention plus qu'honorable, apaise ma colère. Surtout que, j'ai l'étrange sensation que quoi que je fasse, la vie me ramène continuellement à lui.

Sortant de la salle de bain au bout d'une demi-heure, je dépose mon téléphone à charger dans la chambre avant de descendre dans la cuisine, mon ventre gargouillant de n'avoir avalé qu'une part du brunch de ce matin. Passant devant le bureau qui se trouve au fond de l'entrée, près de l'escalier, j'entends la voix grave et autoritaire de Matthew mais je ne m'arrête pas. À mon arrivée dans la cuisine, Jordan est encore là lui aussi :

            — Alors cette course ? me demande-t-il pour relancer notre discussion après notre dispute de tout à l'heure.

            — Écoute Jordan, je suis désolée pour ce que je t'ai dit par rapport au sport tout à l'heure, c'était gratuit, je suis furieuse que tu m'aies menti pendant tout ce temps par rapport à Matthew mais je comprends pourquoi vous l'avez fait. Pourtant, même si ça ne passe pas, je n'avais pas à te parler comme ça... m'excusé-je platement.

Je suis énervée contre lui, certes, mais ça ne devrait pas me pousser à être méchante avec lui. Je ne suis pas ce genre de personne qui blesse les autres pour défouler sa haine, je ne l'ai jamais été.

            — Je comprends Elyssa et je ne t'en veux pas. Je sais que tu aurais voulu que je t'en parle et que c'est pour ça que tu m'en veux, j'agirais sûrement de la même manière à ta place [...]

            — Alors pourquoi tu ne me l'as pas dit ?! m'emporté-je de nouveau.

            — Tu sais très bien que ce n'était pas possible. Et, je te connais suffisamment pour savoir que tu aurais agis de la même manière à notre place.

Cette phrase me met presque une claque dans la figure. Est-ce que je n'aurais pas fait la même chose si c'était Matthew qui était en danger ? Est-ce que s'il pouvait être en danger par ma faute je n'aurais pas fui plutôt que de savoir que je pouvais le perdre ?

Néanmoins, des éclats de voix provenant du bureau de Matthew nous parviennent ce qui met fin à mes interrogations.

            — Il y a un problème ? demandé-je à Jordan, n'étant pas habituée à entendre Matthew hurler de la sorte.

L'air grave, Jordan m'informe :

            — Il devait avoir des nouvelles de la police et du détective privé qu'il a engagé pour retrouver notre père. Mais apparemment, les nouvelles ne sont pas bonnes...

Dans un silence de mort, tous les deux inquiets de la raison qui a poussé Matthew à sortir de ses gonds, nous restons sans bouger dans la cuisine, tandis que je n'ai même pas ouvert le paquet de gâteau au chocolat que j'avais pris dans l'armoire comme encas.

Au bout d'une quinzaine de minutes, et toujours dans un silence glacial, Matthew revient dans la cuisine. Son attitude ne laisse rien présager de bon, ses sourcils sont froncés, son visage fermé, des auréoles arborent la chemise blanche qu'il a enfilé. Mon cœur s'accélère. Arrivé face à nous, Jordan qui ne peut plus attendre, persuadé que cet appel n'allait pas nous apporter de bonnes nouvelles, lui demande :

            — Alors ?

Matthew croise les bras, fixe un point dehors par la baie vitrée située derrière nous, avant de nous informer, la voix tremblante :

            — Le policier qui a tué Sarah par accident. Sa femme. Elle vient d'être retrouvée assassinée. Une balle dans la tête...

Mon détestable ex-patron (Tome 2)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant