Chapitre 42 : La cavalerie

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— Tu vois que tu ne te débrouilles pas si mal quand tu veux ! me félicite-t-il en coupant la vidéo et en reprenant sa caméra.

— Qu'est-ce qu'il a fait pour mériter ça ? l'interrogé-je quand il se dirige vers la porte.

— Rien qui ne te concerne, me répond-il la main déjà posée sur la poignée.

— Vous ne pensez pas que justement si, ça me concerne, vu que je partage sa vie ?

Il semble réfléchir un instant, la porte ouverte vers l'escalier qui monte vers la maison, puis se retourne vers moi :

— Par sa faute quelqu'un qui m'était proche est mort, me confie-t-il alors que j'aurai pensé qu'au vu de son attitude dominante il m'aurait claqué la porte au nez.

Mon sang ne fait qu'un tour de cette révélation, et une hypothèse qui avait été réfuté par les garçons me revient :

— Vous êtes de la famille de Sarah ?

— Ne t'avise pas de prononcer son prénom, me défend-il en se rapprochant de moi et en me rappelant la présence de son couteau.

Je frissonne, mais ça ne l'empêche pas de continuer. Au vu de la lettre qu'il m'a fait lire, il a besoin de moi vivante. Alors quite à rester enfermée ici, autant que j'obtienne des réponses.

— Vous étiez qui pour elle ? Son frère ? Un cousin ?

Un sourire tendre cette fois s'échappe de ses lèvres.

— Son mari, m'avoue-t-il après hésitation.

Je fronce les sourcils. Comment est-ce possible qu'il soit marié à cette femme si le père de Jordan et Matthew était aussi avec elle ?

— Alors pourquoi était-elle depuis plusieurs année avec Brandon ? Le père de Matthew et Jordan ? m'impatienté-je, persuadée qu'il me ment.

— Nous étions dans une relation libre et je n'étais que rarement en ville avec mon travail. Tout ce que vous devez savoir c'est que c'est à cause de ce Matthew qu'elle est morte. Et il va payer.

Il a remis sa carapace et éprouve une grimace de dégoût en évoquant Matthew.

Ce soir-la, quand il quitte enfin le sous-sol non sans m'avoir déposé une bouteille d'eau, la peur me paralyse le corps. Que va-t-il arriver à Matthew s'il vient au rendez-vous ?

***

Ça y est, c'est le jour du rendez-vous avec Matthew, le jour où nous saurons enfin ce qu'il compte faire de lui. Et de moi aussi accessoirement.

Quand cet homme dont je ne connais toujours pas le nom entre de nouveau dans ce que j'ai nommé « ma cellule » je suppose qu'il doit approcher l'heure du midi car il m'amène mon seul repas journalier : une conserve qu'il a préalablement chauffé. Le pire c'est que même pour l'eau il me restreint, malgré mes supplications, à un demi-litre par jour, ce qui révolterai n'importe quel médecin.

Hier soir, avant de quitter la pièce et quand il est passé à côté de moi, j'ai pensé pendant un court instant à lui dérober les clés qu'il accroche à la ceinture de son pantalon et de m'enfuir. Mais, je me suis vite ravisée. Même si j'arrive par miracle à lui dérober, il faudrait en plus que j'arrive à mettre K.O, et qu'aucune autre personne ni aucune autre porte fermée ne se trouve dans la maison. Vu comme ça, ma vision pourrait être très pessimiste, mais je n'oublie pas que cet homme, quel qu'il soit, n'hésite pas à tuer. Et, si pour l'instant il a besoin de moi en vie pour conclure son échange avec Matthew, si je m'enfuie ou tente quelque chose, il n'hésitera pas. Je le sens.

Mais lorsque je suis en train de manger alors qu'il me donne la becquée, incapable de manger seule avec les liens, un bruit sourd retentit. Le visage de l'homme se contracte aussitôt et il se redresse en collant sa main contre ma bouche. Incapable de parler, j'essaie de protester en prononçant quelques vocalises, mais il sort de nouveau son couteau, et je comprends que j'ai intérêt à me faire. Au bout que quelques secondes sans aucun nouveau coup provenant de l'étage j'en viens à me persuader que ce n'était rien. Ces derniers jours, je rêvais chaque jour que la police débarquait et venait me sauver, et j'entendais le bruit du défoncement de la porte d'entrée. À chaque fois je me réveillais en sursaut, l'espoir niché au creux de ma poitrine.

L'homme aussi doit penser qu'il a rêvé car quelques secondes après moi, il se détend aussi. Mais, l'espace d'une seconde plus tard, ce sont des pas qui raisonnent dans les escaliers. Je me raidis, tandis que mon agresseur sort de nouveau son couteau qu'il place une nouvelle fois contre ma jugulaire. Ma respiration s'arrête et je me concentre pour ne pas bouger. Le moindre geste peut m'être fatal.

Quelques pas plus tard, la porte s'ouvre avec fracas et c'est un homme armé jusqu'au coup qui fait irruption dans la pièce, où son uniforme présente la mention « gendarmerie ».

— Par ici ! crie ce dernier à ses collègues qui, je suppose, sont en train de fouiller le reste de la résidence.

Je soufflerais presque de soulagement si mon agresseur ne me tenait pas si fermement contre cette arme blanche.

Le reste de la cavalerie arrive à la suite du gendarme pour totalement nous encercler, leurs armes pointées sur nous. L'homme se protège de mon corps et me menace tandis je tremble comme une feuille, peinant à tenir debout.

— Le suspect a une arme blanche qui tient contre le cou de la victime, informe le gendarme pour son micro situé contre son gilet pare-balle.

— Lâchez ce couteau, ou je tire, s'adresse-t-il de nouveau à celui qui me menace.

Mais ce dernier ne semble pas se décontenancer. Il ne veut pas que son plan échoue, c'est plus fort que lui. Il fera tout pour y parvenir, quite à y laisser la vie. Il ressert alors son étreinte et sa prise autour de mon cou, et si avant c'était la peur qui me dominait cette fois je ressens une vive douleur à cet endroit et ne peux me retenir de pousser un cri. Un filet de liquide chaud s'échappe de ma gorge et je prends peur. Et s'il me vidait de mon sang de cette façon ?

— La victime saigne, répète plusieurs fois le gendarme dans son micro, lorsqu'il aperçoit mon cou.

Puis, tout va très vite. Le gendarme doit recevoir l'ordre de son supérieur de tirer car je le vois, sans y croire, appuyer sur la gâchette. Le coup de feu retentit dans mes oreilles et je tombe à la renverse. Je ne sais pas qui est touché, je ne ressens aucune douleur mais je suis incapable de bouger, paralysée. Mes vieux traumatismes me revenant en mémoire. Mon agresseur finit au sol, comme moi, mais je ne sais pas qui a entraîné qui dans sa chute car je suis terrorisée. Je me revois il y a plusieurs mois dans le parking miteux de Clayton Corporation, mon ventre se vidant de son sang, persuadée que j'allais y rester, puis la mort de mon agresseur, sous les yeux. Je ne veux pas revivre ça, je ne peux pas. Alors je ferme les yeux.

Je sens quelqu'un me relever, soulevée de terre par deux individus qui semblent me tenir, mais je n'ouvre pas les yeux. Je ne veux pas savoir, je ne veux pas voir. J'entends un des gendarmes appeler l'équipe médicale, mais je ne veux pas savoir pour qui elle est, ni pourquoi elle est demandée. Quelqu'un dépose une couverture chaude sur mes épaules, et ce n'est qu'à cet instant que je me rend compte que je tremble comme une feuille.

Il faut que je vois. Il faut que je vois si je suis blessée pour partir, partir loin de cet homme qui me veut du mal, et prévenir Matthew.

Mais, quand je me lève et ouvre les yeux, je n'ai que le temps d'apercevoir une orde de gendarmes et de pompiers autour de moi car mes jambes chancellent et je m'écrase avec fracas contre le béton froid de ce sous-sol.

Ça y est, ça recommence.

Mon détestable ex-patron (Tome 2)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant