Chapitre 39

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RUBY

Cinq ans plus tôt.

Mes dessins sont éparpillés sur la table de la cuisine, et je ne saurais dire combien de temps je suis là.

Thomas ne vas pas tarder à rentrer et je ne sais pas si je ne ferais pas mieux de tout ranger avant qu'il n'arrive, après tout, il n'a jamais vraiment compris mon amour pour le dessin, et je ne peux pas lui en vouloir, il le vois simplement comme un hobby ou quelque chose qui me fait passer le temps.

Mais récemment je me suis mise à beaucoup dessiner, et particulièrement des plans, j'ai quelques croquis sur des maisons que j'aimerais beaucoup montrer à Thomas. Je sais qu'ils ne sont pas parfaits mais j'ai vraiment l'impression de m'améliorer avec le temps, peut-être que j'ai enfin trouver ce que je voulais faire finalement ?

De toutes ces années qui ont passées, pas une ne s'est écoulée sans que le dessin ne fasse partie de ma vie, et c'est étonnant, surtout quand on sait que je me lasse très rapidement de tout.

Mais il y a ce quelque chose qui se passe quand je tiens un crayon, mon cerveau qui se met en mode "off" et laisse toutes les commandes à ma main, une sensation étrange me parcourt et je ne vois jamais le temps passé.

J'hésite à en parler avec Thomas, après tout il est toujours du genre à affirmer qu'il ne faut pas trop s'emballer et qu'il faut toujours réfléchir à toutes les conséquences avant de prendre une décision.

J'entend la porte s'ouvrir et il est trop tard pour moi de ranger mes croquis.

Une fois de plus, j'ai perdu la notion du temps.

Je n'ai pas envie d'être présente au moment où il rentre, Thomas est toujours de mauvaise humeur quand il rentre du travail et ça se répercute sur moi, à chaque fois.

Alors même quand il entre dans la cuisine et lance un regard las à mes feuilles, je lui souris et lui dis un petit bonsoir avant de les réunir et d'essayer de m'échapper.

J'arrive à la porte quand sa voix m'arrête.

– Encore en train de dessiner ?

– Oui, je n'ai pas vu le temps passer.

Un rire moqueur échappe de ses lèvres et mon sourire disparaît un peu. Je comprend que l'on puisse avoir eu une dure journée, ou bien qu'en rentrant du travail, on est beaucoup trop fatigué pour discuter, mais ce genre de comportement qu'à Thomas, c'est vraiment quelque chose que je déteste.

Il prend place sur l'une des chaises et se passe les mains sur le visage avant de tirer ses cheveux.

– Donc pendant que moi je travaille dur pour nous ramener de l'argent, toi tu dessines ?

J'ai complètement remarqué le dégoût avec lequel il a prononcé ce dernier mot, et ça fait monter un pic d'adrénaline en moi.

– Je travaille aussi je te signale.

– Oui, mais pour combien de temps encore ?

Sa remarque pique, c'est clair. Thomas à ce défaut de toujours vouloir faire mal à la personne en face de lui quand il est énervé, je ne comprends pas comment est-ce qu'on peut penser comme ça, surtout quand tu aimes cette personne.

Mais la vraie question là c'est, est-il vraiment énervé ? J'ai l'impression qu'il a plus l'air désespéré de ma passion, et quelque part, ça me fait mal de savoir que même mon copain ne me soutient pas là-dedans.

– J'ai pensé que je pourrais peut-être en faire mon métier, j'avoue avec un sourire à cette pensée.

– Ton métier ? Il répète, comme si je venais de l'insulter. Tu sais qu'il faut avoir de vrais talents pour ça, et un diplôme, et pour l'instant, j'ai l'impression que tu n'as ni l'un ni l'autre.

Il secoue la tête et se sert à boire pendant que je le regarde, totalement éberlué par ses propos.

– Non mais tu t'entends parler ? Je lui demande en fronçant les sourcils.

– La vérité blesse, ma chérie.

– Oui mais il y a une façon de le dire, Thomas.

Il lève les yeux au ciel et se rapproche de moi.

– Oh ça va, tu ne vas pas me faire la tête pour un petit commentaire vrai tout de même, hm ?

Il pose ses mains sur mes joues et me regarde dans les yeux en haussant les sourcils, comme s'il attendait confirmation de ma part, mais ça ne risque pas d'arriver.

Je me dégage de son emprise et lui tourne le dos, mais ses bras s'enroulent autour de moi, la sensation de sécurité et de chaleur qu'elles m'apportent il y a encore quelques mois à complètement disparu, et je ne veux qu'une chose : qu'il me lâche.

Alors je me dégage à nouveau et lui lance un mauvais regard tout en me dirigeant vers la chambre. Il me suit.

– Ruby, bébé, je ne voulais pas le dire comme ça.

Je range précieusement mes croquis dans mon tiroir et hésite sérieusement à acheter un cadenas.

– Mais tu ne peux pas être énervé contre moi pour te dire la vérité quand même.

Je croise les bras sur ma poitrine, regardant ailleurs. Sa phrase était à moitié vrai, il est vrai que je ne possède pas de diplôme, mais je suis presque sûr que le talent, je l'ai.

Je suis rarement sûre de quoique ce soit dans la vie, surtout quand il s'agit de moi, mais le dessin m'est toujours apparu comme quelque chose de logique.

– Hein ?

Il tend la main vers moi et évidemment je ne la prend pas, je sais que ce n'est qu'une façon à lui que je le rejoigne dans ses bras, parce que si je venais à prendre sa main dans la mienne, il l'a retirerait de dégoût, comme à chaque fois.

– Tes mots blessent, Thomas.

– Je suis désolé bébé, j'ai eu une longue journée et je suis vraiment fatigué.

Et voilà les mêmes mots qu'il me sort à chaque fois et dont je suis tellement habituée maintenant. J'ai appris avec le temps à mettre mes émotions en "off" à chaque fois qu'il rentre du travail, pour ne pas à subir ses mots à chaque fois, mais ça devient vraiment lassant à la longue.

Alors c'est pour ça que je traverse le couloir et vais m'enfermer dans la salle de bain, me demandant si, finalement, ça vaut vraiment la peine que je continue le dessin si même Thomas, la personne qui est censé m'aimer et me donner confiance n'arrive même pas à faire semblant de me soutenir.

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1075 mots.

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De tout mon coeur,

-albatross

The destiny of soulsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant