Le Joyau de Nostraria, tome 3 : la naissance d'une légende

Chapitre 40

J'entre en fracas dans le château de Belseau... Dans mon château. Il fait encore nuit noire et je suis persuadée que je ne vais aucunement dormir cette nuit. Un garde me lance un regard effaré avant d'effectuer une révérence. Je m'avance dans la bâtisse en grimpant les marches quatre par quatre. Il m'emboite le pas.

— Qui de mon cercle proche est encore présent ici ?

— Il y a Gaspard... Et votre sœur.

— Où sont tous les autres ?

— Au front. Nostraria est à nos portes, nous répliquons.

J'arrive devant la porte de ma chambre. Je place ma main sur la poignée avant de me retourner pour conclure.

— Très bien, trouvez-moi leur position exacte, je pars d'ici une heure. Et réveillez Gaspard, je veux le voir avant de partir.

— Ce sera fait...

Je pénètre dans ma chambre alors qu'il continue de parler et constate que mon lit n'est pas vide.

— ... par contre, votre sœur dort dans votre chambre.

Elle lève la tête avec des yeux encore embués. Je me tourne vers le garde et lui offre un léger sourire.

— Merci, je vous retrouve dans trente minutes dans le salon avec Gaspard.

Il hoche la tête et part pour faire ce que je lui ai demandé.

— Hestia, c'est toi ?

La petite voix endormie de ma sœur est douce, mais empreinte d'une pointe de panique.

— Oui, Lua, je suis rentrée.

Je ferme doucement la porte dans mon dos. Le froissement des draps est immédiat et je sens son corps rencontrer le mien avec force.

— J'ai eu si peur. J'ai cru qu'il t'avait tué. On avait aucune nouvelle. Ayden a dit que votre lien de communication avait été brisé. Léandre aussi.

Ses larmes trempent mon vêtement sale. J'ai une légère réticence à salir sa robe de nuit, mais qui est vite balayée par les bras de ma sœur qui me serrent toujours plus fort, alors je me laisse aller à ce câlin. Non seulement je suis heureuse de la revoir, mais j'ai besoin de ce contact qui m'ancre au sol. Je suis rentrée chez moi.

— Je vais bien. Je suis là.

Nous restons de longues minutes durant lesquelles je caresse ses cheveux pour apaiser ses sanglots. Après un moment, elle se détache enfin et m'observe en souriant. J'aimerais rester plus longtemps avec elle, mais j'ai des obligations.

— Je repars, tout de suite.

— Quoi ?

Je me retourne vers mon étagère pour attraper ma tenue de combat aux couleurs de l'Edryae.

— Nous sommes en guerre, Lua. Et je me dois de me battre pour mon pays.

— Mais tu viens de rentrer... Le prince t'avait enlevé. Tu as besoin de repos.

— Non, j'ai besoin de me battre et de soutenir les soldats qui se battent pour l'Edryae.

— Je ne te laisserais pas partir seule.

— Tu ne sais pas te battre.

Je passe dans ma salle d'eau et me débarbouille le visage, alors qu'elle me suit d'un pas déterminé. Je défais les vieux vêtements que je porte depuis maintenant deux semaines. Je n'ai pas de pudeur face à ma sœur, nous avons partagé la même chambre pendant vingt ans. Je me rafraîchis rapidement, même si j'ai dû remettre mes vêtements sales, j'ai pu me laver plus tôt dans la soirée à l'auberge.