Le Joyau de Nostraria, tome 3 : la naissance d'une légende

Chapitre 50

— Tu sais que c'est un vrai régal de profiter de tes pouvoirs faes. La création de portails c'est la meilleure chose que tu saches faire, me lance Alex.

Je me tourne vers mon ami et lève les yeux au ciel en entendant ces mots. Mon regard tombe sur son col de chemise qui est relevé à droite, je le replace en lui faisant les gros yeux. Il est vraiment élégant dans son costume, mais c'était voulu, il représente Edryae avec moi aujourd'hui. C'est bien la première fois que je me rends en Pleydor, mais je ne pouvais aucunement refuser à Alora de venir à la fête de naissance en l'honneur de son fils. Milo a quelques semaines et va déjà subir une cérémonie de présentation.

— Merci de me résumer à un moyen de transport pour toi.

Alex m'observe avec de grands yeux ébahis alors que je lui lance un regard mauvais.

— Mais ce n'est pas...

Je ne peux retenir mon sourire plus longtemps alors qu'il se décompose devant moi. Comme si j'avais mal pris une si petite boutade. Il exprime gaiement sa désapprobation avec un « tsss » sonore. Les gardes se trouvant dans le hall du palais d'Alora se redressent et je donne un coup de coude à Alex pour qu'il les imite.

La reine et le roi de Pleydor font alors leur entrée. J'offre mon plus beau sourire à Alora. Ça fait plus d'un an que nous ne nous sommes pas vus, mais je n'oublie aucunement tous les moments passés ensemble. Elle ne réfléchit pas plus et court vers moi. Je remarque la surprise d'Alex quand la reine de Pleydor se jette dans mes bras.

— Ooooooooooh ! Je suis si contente que tu sois là ! Tu vas voir. J'ai prévu plein de trucs pour ton séjour !

Nous avons décidé avec Alora qu'il serait bien que je reste une semaine afin que nous puissions profiter un petit peu l'une de l'autre. J'ai donc fait en sorte de me dégager du temps pour lui en offrir. Son excitation commence à me gagner et un léger cri suraigu que je n'avais jamais fait m'échappe. Nous nous mettons à rire en cœur. Elle m'attrape par le bras et commence à me raconter tout ce qui lui vient à l'esprit.

Les yeux d'Alex papillonnent alors qu'il essaie d'assimiler ce qui vient de se passer, je vois que Chris s'approche de lui et se présente. Alex reprend de la contenance et lui serre la main.

— Aucune inquiétude à avoir. Ma femme est comme ça, sans compter qu'elle attendait la visite d'Hestia avec impatience.

Chris remarque mon regard porté sur eux alors que sa femme me tire vers l'intérieur du palais pour me faire visiter. Il me sourit et m'offre un petit geste de la main, que je lui rends avec un sourire.

Le palais du roi et de la reine de Pleydor est à leur image, chaleureux et élégant. Il est composé de nombreuses boiseries taillées avec soins et finesses. Il y a beaucoup de fenêtres qui permettent à la lumière d'entrer dans l'édifice. Il est certes moins grandiose que le palais de Nostraria, mais il n'a pourtant rien à lui envier.

❋

Alora parle de son fils avec une telle admiration que c'en est attendrissant. Elle et Chris l'aiment d'un amour profond et je n'ai aucun doute qu'il grandira dans un cocon familial aimant et stable. Ce petit prince a beaucoup de chance.

Mon amie porte Milo dans ses bras. Il a déjà été vêtu en blanc pour la cérémonie qui aura lieu plus tard dans la journée.

— Après la cérémonie, nous avons donc prévu une fête. Elle se penche vers mon oreille comme pour épargner ses paroles à Milo. Évidemment, le bébé dormira.

Chris lève les yeux au ciel avec un sourire en entendant les mots de sa femme.

— En parlant, de la cérémonie... commence Chris. Alora t'a dit que...

— Je t'ai parlé du traiteur ?

Elle lance un regard sévère à son mari avant de se retourner vers moi un sourire aux lèvres. Je fronce les sourcils en observant mon amie.

— Qu'est-ce qu'il a de particulier ce traiteur ? demande Alex.

Il a l'air vraiment intéressé par la chose et le regard d'Alora s'illumine quand elle observe Alex. Elle commence à lui parler en long et en large du traiteur, mais j'ai été intriguée par l'intervention de Chris. Je lui lance un coup d'œil insistant et il hausse les épaules comme si de rien n'était. J'insiste et Chris fronce les sourcils en secouant la tête. Je relève le menton d'un coup sec l'invitant à en dire plus. Il pince les lèvres et lève les mains comme s'il ne voyait pas où je voulais en venir. J'articule en silence :

— C'est toi qui as abordé ce sujet.

— Tu verras ! articule-t-il à son tour.

Je ne veux pas attendre. Ce comportement m'intrigue. Je veux savoir de quoi il parle, du moment où ça arrivera et je me contrefiche du traiteur qui a l'air de tellement intéressé Alex. Je lui lance un regard en coin alors que je l'entends parler de gougère. Mon attention revient vite à Chris qui essaie délibérément d'éviter mon regard. Il attrape son fils des bras d'Alora pour ne porter son attention que sur lui. Je m'avoue vaincue et m'enfonce plus profondément dans mon siège.

❋

Nous sommes Alex et moi dans la chambre qui m'a été attribuée pour la semaine.

— Tu as parlé de gougères.

Mon rire ne se tarit pas, alors que je continue de me moquer de mon ami.

— Ouais, bah c'est mieux que ta tête quand Alora a essayé de te mettre Milo dans les bras.

Il m'offre un sourire, satisfait de cette pique. Il est vrai que j'ai eu un mouvement de recul quand on a essayé de me confier un petit être fragile de quelques semaines dans les bras.

— Ça va, je n'ai pas grimacé.

— Tu n'as pas grimacé ? son sourire s'élargit de plus en plus. Tu étais sur le point de vomir. C'en était comique. Tu es plus à l'aise avec une épée qu'avec des enfants, je peux te le dire.

— Et heureusement ! Je n'ai pas d'enfant à ce que je sache.

— Et c'est clair que vu ton aversion, on est mal parti.

Son rire ne fait que s'amplifier au fil de cette conversation.

— Ce n'est pas une aversion.

— Tu m'en vois ravi.

Je pousse légèrement son épaule de la mienne et me dirige vers le coffret à bijoux que j'ai emporté. Je prends une paire de boucles d'oreilles. Je les attache en me dirigeant vers le miroir pour observer ma robe de ce soir. C'est une robe longue en taffetas bleu roi avec quelques couches de tulles qui lui donnent un air printanier. Des fleurs brodées en or parsèment la robe. Le corset est retenu par des bretelles également en tulle au niveau de mes épaules. Elle est jolie et représente parfaitement les couleurs de l'Edryae et le renouveau que je compte y insuffler. Alex arrive dans mon champ de vision et me tend un petit diadème serti de saphir. Je trouve toujours ça extrêmement étrange de porter des diadèmes ou des couronnes, mais je m'exécute parce que c'est la coutume.

Le costume d'Alex est bleu marine pour donner une certaine concordance dans nos tenues et il porte des boutons de manchettes avec les armoiries de la famille royale d'Edryae ainsi qu'une pochette de costume blanche.

— Vous êtes prête, votre majesté ?

Je me retourne et le pousse à nouveau, mais au niveau du cœur. Je fronce les sourcils en sentant quelque chose de dur sous ma paume.

— Ne m'appelle pas comme ça. Tu portes une arme ?

— Euh... Oui. Pas toi ?

— Est-ce que tu me connais un minimum ?

J'ai un poignard coincé dans une sangle accrochée à ma cuisse, mais c'est la seule arme que je me suis autorisée à porter. C'est une fête qui se veut joyeuse et sans trop de risque.

— C'est donc un oui franc.

Nous rions de plus belle et il me prend le bras pour me conduire jusqu'à la cérémonie en l'honneur de Milo.