Niel de Larq n'avait pas fermé l'œil depuis des heures. De trop nombreuses heures à son goût, car chacune qui s'écoulait réduisait ses chances de remettre la main sur deux adolescents totalement écervelés. À chaque bougie qui fondait sur son bureau, il craignait qu'un de ses escadrons reviennent avec deux Corps sans vie.
Mais rien, pas un indice, pas une trace de ce que Milanne et Thilste étaient devenus. Pas la moindre demande de rançon, personne qui les avait vu dans les villages près de Runac. Comme s'ils s'étaient volatilisés. Il fallait dire que le caractère secret des recherches n'aidait pas. Mais Niel ne pouvait pas se permettre de placarder leurs visages dans tout le Larinu, seulement d'envoyer ses troupes enquêter sur son territoire et celles de l'Orem dans les contrées alentours tenus par d'autre Lylluns. Quel désastre.
— Entrez, grogna-t-il lorsqu'on frappa un coup sec à la porte.
Une femme à la peau pâle apparut sur le seuil. Elle s'inclina brièvement. Niel se raidit, ne pouvant s'empêcher d'être sur ses gardes lorsque l'Askanienne était dans la pièce, malgré les armes de son suzerain brodés sur son uniforme.
— Toujours rien, annonça-t-elle.
Le Lyllun grommela un juron tout bas. Le temps pressait, et la nouvelle allait commencer à s'ébruiter – les soldats parlaient toujours trop.
— Nous n'avons plus le choix, soupira-t-il. Vous devez retourner à Rohir pour annoncer la nouvelle à l'Orem. Nous avons besoin de plus de ses forces pour retrouver sa fille.
La garde du corps se raidit. Une pointe de pitié le traversa : elle allait devoir avouer son échec cuisant devant l'Orem. Niel déglutit. Son tour viendrait ensuite bien assez tôt. De plus, il n'allait pas devoir affronter la colère d'un père fou d'inquiétude, mais de deux.
— Partez dès l'aube, indiqua-t-il. Vous pouvez disposer.
L'Askanienne opina du chef. Lorsque la porte se referma, un soupir dédaigneux résonna dans la pièce.
— À la seconde où Thilste remet les pieds ici, grinça une voix féminine, je vais faire regretter à ce morveux de m'avoir volé mon sauf-conduit.
La jeune femme se leva du fauteuil à proximité du bureau, où elle s'était affalée en début de soirée. Elle secoua sa chevelure d'un roux pâle, presque châtain à la faible lueur des bougies, avant de s'étirer longuement.
— Je ne donne pas cher de notre peau.
— L'Orem est un homme clément, répliqua Niel.
— Je ne parlais pas de lui.
Évidemment. Dias de Larinu était le cadet de leurs soucis.
— Laissez-moi aller voir votre frère à Solarina. Je suis sûre que je trouverai un moyen d'apaiser sa colère.
— Tiri, tu n'as pas à...
— Si c'est vous qui venez, il ne va pas se gêner pour laisser éclater son courroux. En revanche, il n'osera pas blâmer une fille pour les manquements de son père, si ?
Si les mots de sa fille lui donnèrent un coup au Cœur, il ne pouvait pas nier qu'elle avait raison. Il avait manqué à son devoir en laissant Milanne et son neveu lui filer entre les doigts. Il aurait dû se douter que Thilste finirait par réussir à sortir de l'université. Le garçon n'était pas heureux à Runac, il n'aurait jamais dû être forcé à venir ici. Niel soupira. Une autre superbe idée de son frère.
— Très bien, merci. Que ferais-je sans toi ?
La moue moqueuse qui plissait le nez aquilin de sa fille disparut. Elle s'approcha, une douceur infinie dans ses yeux ambrés, avant de planter un baiser sur sa joue.
— Ne faites pas cette tête. Tout va s'arranger, ces deux inconscients doivent bien être quelque part. Vous verrez. Songez plutôt au sermon que vous allez pouvoir leur servir à leur retour.
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La Rivière des larmes
FantasyUn ciel qui s'effondre. Deux royaumes en conflit depuis des siècles. Deux Déesses disparues. Deux jeunes elfes ennemies, liées par un secret inavouable. ✷ Enfant illégitime, Karis n'aurait jamais dû faire partie des Gardiens. Mais ils ne peuvent se...