Chapitre 26

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Il fait froid. Les couloirs sont froids, alors le fait que nous soyons au mois de décembre n'arrange rien. Je crois que je n'ai jamais marché aussi vite de ma vie, j'en entends même mon cœur battre la chamade. Hormis hier, la dernière fois que je suis rentrée dans un hôpital, c'était il y a deux ans après l'accident. Un frisson de stress et de peur me traverse tout le corps pendant que je longe ces longs couloirs renfermants une odeur de Betadine.
Au bout de quelques minutes, je parviens à trouver la chambre de Dylan. Je pousse la porte et le découvre endormi, des lunettes à oxygène et quelques patchs sur son torse ont été rajoutés. Le voir comme ça, affaibli dans ce lit, me procure une sensation d'angoisse que je ne saurais expliquer, comment est ce que son état a bien pu se dégrader à ce point...
Je m'avance doucement et arrive désormais face à lui. Je m'assieds sur une petite chaise qui était dans un coin, que je ramène près de lui pour lui tenir sa main glacée. Bizarrement, aujourd'hui je remarque tout les détails de ses traits du visage : des cernes violacées sont apparus sous ses petits yeux, sa peau est pâle à en faire peur, il a perdu ses petites joues qui étaient autrefois rebondies, et sa respiration devient bien trop différente même quand il dort.
Je pose mon front sur nos deux mains entrelacées, je prie chaque jour depuis que nous nous sommes mis ensemble pour qu'il y est une infime amélioration dans son cancer... mais rien ne se passe.

-Anna...

Je lève ma tête et le découvre encore les yeux endormis. Il tente tant bien que mal de me regarder mais la lumière du jour l'aveugle un peu.

-Je suis là. Je lui répond d'un sourir rassurant, pendant que je carresse délicatement ses doux cheveux châtains.

-Qu'est ce qu'il s'est passé ?

-Tu as perdu connaissance. Je lui répond pendant que je me redresse.

Je n'ose pas lui révéler ce qui lui est réellement arrivé. Je préfère que ses parents s'en chargent ou que se soit les infirmiers qui le lui annoncent. Moi, je n'en aurait pas le courage, et je ne veux pas le brusquer avec ça alors qu'il vient à peine de se réveiller.
Il me regarde sans rien dire, l'air un peu douteux, comme si il savait que je lui cachait quelque chose d'important, mais fini par hocher la tête.

-Tu as mal quelque part ?

-Non. Il dit d'une voix fragile.

-Tant mieux. Est ce que tu te rappelle de quelque chose ?

A ce moment là il remarque nos deux mains jointes, je ne voulais plus le lâcher. Il utilise le peu de force qu'il a pour les ramener à sa bouche et y déposer un doux baiser sur celles-ci. Après ce geste attentionné, il fixe le mur face à lui et décide de ne plus le lâcher du regard.

-Je me suis énervé sur Noah... et je suis tombé. Puis... plus aucun souvenir, à part un trou noir et ta voix qui m'appelait. Dit-il comme ci il était essoufflé.

Je commence à trembler, je suis à deux doigts de vider toute la pression qui se trouve en moi. Je serre un peu plus fort nos mains et commence à parler avec une voix enrouée :

-Ce n'est pas comme ça que j'imaginais notre premier Noël. Tu méritais...

-Dernier. Il dit tout bas, croyant peut être que je ne l'entendrai pas.

-Quoi...?

Il pose cette fois-ci ses beaux yeux verts sur les miens, je sens dans son regard de la peur qu'il tente de cacher. Sa main qui se trouvait dans la mienne, se dégage de celle-ci et vient toucher ma joue tout en la caressant.

-Ce n'est pas notre premier Noël, Anna. Mais notre dernier Noël, pour moi en tout cas.

-Tu n'as pas le droit de dire ça. Je m'empresse de dire dans un souffle, pendant que je secoue ma tête de droite à gauche.

Seulement, à ce moment précis, c'est qu'en lisant dans ses yeux que j'ai compris... il sait. Il sait qu'il ne le lui reste plus beaucoup de temps à vivre, que d'ici peu ses magnifiques iris couleurs de jade, plus personne ne pourra les admirer.

-J'ai une question, Dylan, mais ce n'est pas pour le devoir. Dis-je prête à assumer sa réponse sans piquer une crise. Est ce que tu le savais ? Est ce que tu savais pour ton état ?

Il baisse les yeux, ce silence resonne comme une réponse. Je décide tout de même d'attendre, pour écouter ses paroles, mais je sais déjà d'avance que ce que je vais entendre ne me plaira pas.

-Je le sais depuis quelques jours avant les vacances. Me répond-t-il en soupirant.

Je le regarde, sans savoir quoi dire, mes yeux deviennent larmoyants. Je ne suis pas en colère, il avait probablement peur de ma réaction. Ou tout simplement peut être ne voulait-il pas nous inquiéter davantage, même si nous l'aurons su de toute manière. Je suis à deux doigts de craquer pour la centième fois, mais je me force à ne rien laisser paraître, il n'a pas besoin de ça... et moi non plus.

-Je suis désolé. Reprend-t-il me coupant de mes pensées.

-Pourquoi ?

-Je ne t'offre pas la vie que tu mérites d'avoir.

Je le regarde sérieusement en fronçant les sourcils. Je n'aime pas quand il dit ça, je n'aime pas du tout.

-Dylan, je marque une pose en posant délicatement ma main sur sa mâchoire, le forçant à me regarder. Nous en avons déjà parlé plusieurs fois, ce n'est pas ta faute et je ne reste pas par pitié. Je resterait jusqu'à la fin, je reste parce que je t'aime.

Je l'ai dis... j'ai dis pour la première fois que je l'aimais. J'ai dis ce que j'aurai du dire à mon frère avant son accident, à mon père avant qu'il parte. Je l'ai dis.
Il plonge ses yeux grands ouverts dans les miens, un sourire s'affiche sur son visage, ce sourire qui n'était pas apparu depuis quelques temps, ce sourire qui me manquait terriblement.

-Je t'aime Anabelle.

Je ris et vient l'embrasser comme ci nous nous étions pas vu depuis des années. La peur que je ressentais au fond de moi commence à disparaître, parce que quelque chose vient de me traverser l'esprit. Il m'a choisi moi parmis toutes ces filles qui bavaient quand elles le voyaient passer près d'elles, toutes celles qui ont tenté en vain de faire chavirer son petit cœur malade, c'est moi qu'il a choisit pour rester à ses côtés quand ses beaux yeux se fermeront à jamais. Parce que c'est son je t'aime qui le prouve...

Nous nous éloignons mais nos fronts restent collés. La respiration haletante, je lui dis la voix basse :

-Quand les gens me demanderont ce que nous avons vécu ensemble, je leur répondrai que j'ai connu tout ce qu'une personne doit connaître de l'amour en seulement quelques mois. De la douceur et de la passion.

Il me regarde tendrement, tout en caressant ma joue. Quelques larmes coulent sur ses joues tandis que son beau visage commence à chauffer, signe qu'il doit avoir un peu de fièvre.
Au bout de quelques minutes, ses paupières se mettent à papillonner. Je le regarde s'endormir, alors que je lui caressait ses cheveux pour l'aider à plonger dans son sommeil.

-Je vais t'aider à te battre le plus longtemps possible, je te le promet. Je dis en chuchotant.

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