Loin de tous (Les Animaux Fantastiques)

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Norbert mangeait son petit-déjeuner dans l'atmosphère bruyante de la Grande salle. Les quatre filles de Poufsouffle avaient insisté pour qu'il se joigne à elles, voyant son air triste, et il n'avait pas eu la force de protester. Il se trouvait donc assis au milieu d'elles, en faisant vaguement semblant de suivre leur conversation animée.
Mais en réalité, il était perdu dans ses pensées sombres. Quatre jours s'étaient écoulés depuis sa dispute avec Leta. Durant ces quatre jours, elle ne lui avait pas adressé une seule parole ni un seul regard, et elle le fuyait comme la dragoncelle. Il se sentait incroyablement mal, seul, et triste. Il ne pouvait pas s'empêcher de culpabiliser alors même qu'il avait seulement voulu aider son amie. Les paroles de la Serpentard tournaient en boucle dans sa tête depuis la seconde où elle les lui avait jetées à la figure. Froides. Tranchantes.

Arrête d'être tout le temps gentil avec tout le monde, arrête d'être timide et de n'oser rien faire !

Il le savait, au fond. Il savait bien que son caractère réservé et timide ne lui plaisait pas. Il ne pouvait pas lui plaire, à elle, si courageuse, si déterminée, si puissante, si... Serpentard. Il avait bêtement eu l'espoir d'avoir une place particulière à ses yeux, mais à l'intérieur de lui, il savait qu'il n'était pas à la hauteur. Cette douche froide avait au moins servi à le faire redescendre sur terre.

Si tu étais mon meilleur ami, tu saurais quand tu dois te taire.

C'était cette phrase qui lui faisait le plus mal, la seule, pourtant, que Leta n'avait pas criée. Il aurait même préféré qu'elle le fasse. Car le ton cassant et glacé qu'elle avait employé était bien pire que la colère pure. C'était de la déception.

Cette déception, Norbert l'avait envers lui-même également. La seule vraie amitié qu'il avait pu avoir au cours de sa vie... il l'avait gâchée. Il ferait mieux de rester avec ses créatures et de ne plus tenter de relations avec les autres. Il n'était pas fait pour ça.

Après un an de progrès dans la sociabilité et la confiance en soi, Norbert retombait à son point de départ. Il se refermait sur lui-même.

- Norbert, tu m'entends ?

La voix d'Eniris le tira de ses pensées et le fit replonger dans le monde présent.

Il regarda autour de lui. Faïne, Venda et Lena étaient parties. Seule la Poufsouffle brune était assise à côté de lui, en le regardant avec une compassion évidente.

- Ça fait longtemps que je ne t'ai plus vu avec Lestrange. Vous vous êtes disputés, c'est ça ?

Norbert acquiesça et tenta un regard du côté des Serpentard. Leta était assise seule en bout de table, le plus loin possible de lui, et mangeait penchée sur son assiette.

- Elle est en colère, observa Eniris. Laisse lui le temps de se calmer, et elle reviendra vers toi. Si ce n'est pas le cas, elle ne te mérite pas.

Le Poufsouffle ne dit rien, mais intérieurement, il criait : "C'est moi qui ne la mérite pas !"

En tout cas, il était reconnaissant envers Eniris qui, finalement, se souciait vraiment de lui. Elle aurait pu enfoncer Leta, en profiter pour le garder pour elle, mais non. Elle voulait l'aider.

Mais il ne méritait aucune aide. Ni aucun attachement. Trop tard. Il s'était refermé sur lui-même.

- Si tu te sens seul... tu seras toujours le bienvenu avec les filles et moi.

Il acquiesça en signe de remerciement, tout en sachant qu'il n'en ferait rien.
Eniris finit par le laisser.

La journée se passa comme les quatre précédentes. Il se sentait tellement seul, comme s'il avait perdu une partie de lui-même. Il n'était plus qu'une ombre, présent sans l'être vraiment. Le soir, il alla s'enfermer dans le fameux placard, celui où tout avait commencé. Peeves avait décidé de mettre sa précieuse réserve de farces et attrapes dans un endroit plus sûr, alors Norbert se l'était réappropriée pour s'occuper de ses animaux.
Après la dispute, alors qu'il errait dans le parc pour oublier sa peine, il avait découvert près d'une rive du lac, celle la plus opposée au château, une île minuscule ne comportant qu'un unique arbre. Mais un arbre merveilleux.