Loin de tous (Les Animaux Fantastiques)

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Fébrilement, Norbert se saisit de son carnet. Il le fixa pendant de longues secondes, pensif, comme s'il avait peur qu'il lui explose à la figure s'il s'avisait de l'ouvrir.

Qu'est-ce que Leta pouvait bien vouloir lui dire après lui avoir fait la tête si longtemps ? Voulait-elle se faire pardonner ? Ou au contraire lui dire que tout était terminé entre eux et qu'elle ne lui parlerait plus jamais ?

Ou alors, elle voulait simplement lui dire qu'elle ne viendrait finalement pas avec eux le lendemain. Oui, c'était l'explication la plus logique. Elle devait se dire qu'elle n'avait aucune envie de risquer sa vie pour un garçon qui avait dit n'importe quoi.

Le carnet cessa de briller et l'obscurité de la nuit revint engloutir le jeune sorcier. Leta avait dû écrire un long message, pour qu'il scintille aussi longtemps. Il resta assis à réfléchir pendant encore plusieurs minutes, puis, enfin, il récupéra sa baguette et murmura : "Lumos".

La pointe de sa baguette s'éclaira et il la prit entre ses dents pour garder ses mains libres. Le cœur battant, il ouvrit le livre noir et le feuilleta rapidement, ce qui le laissa entrevoir les anciennes conversations que les deux amis avaient eues il y a un mois seulement, bien qu'elles semblaient dater de plusieurs siècles. Enfin, il arriva à la dernière page noircie d'encre. Le message de Leta était là, le plus long, sans doute, qu'elle n'ait jamais écrit.

Salut, Norbert.

Tu dois sûrement dormir, tu verras ce message demain matin. Mais moi, je suis incapable de trouver le sommeil, et j'avais vraiment besoin de te dire tout ce que j'ai sur le cœur. Enfin, te l'écrire, car j'ai été trop lâche pour te le dire en face.

Je suis désolée. Je n'aurais vraiment pas dû réagir comme ça, et encore moins te faire la tête pendant un mois. Je ne sais pas ce qui m'a pris, mais j'ai honte de m'être comportée comme une gamine de cinq ans, surtout vis à vis de toi, qui est incapable de faire du mal à une mouche (ou au contraire un grapcorne).

Je comprendrais si tu ne voulais pas me pardonner. Vraiment. Je le mériterais. Mais il faut que tu saches que tu m'as terriblement manqué pendant tout ce temps où on ne s'est pas parlés. J'aimerais tellement que tout redevienne comme avant, que je puisse effacer ce que j'ai fait. Avant, quand on était les meilleurs amis du monde, complices en toutes circonstances. Avant, quand on se comprenait mieux que personne. Avant, quand il n'y avait que nous deux contre le reste du monde, nous deux, loin des autres. Loin de tous.

Ce que tu as dit à Eniris m'a beaucoup blessé, mais je sais que ce n'est pas une excuse. En plus, tu n'y étais pour rien. C'est vrai, on n'en avait même pas parlé, et même si c'était le cas, ça aurait été ton droit de le cacher aux autres. Après tout, c'est comme ça qu'on a toujours fonctionné. Toi et moi.

Mais ça m'a fait du mal, car j'aurais aimé qu'on soit ensemble. J'aurais aimé te l'entendre dire, te voir fière d'être avec moi, te voir m'aimer. C'est vrai, tu m'as déjà dit que tu m'aimais. Mais je l'ai attendu tellement longtemps que j'ai eu du mal à y croire. Et maintenant, j'imagine que c'est trop tard, et c'est ma faute. Entièrement ma faute. Et je te connais, ne t'avise pas à penser le contraire : rien de tout ceci n'est arrivé à cause de toi, d'accord ?

Enfin bref, je crois qu'il est temps d'arrêter d'écrire et d'assumer les conséquences de mes actes. Demain, je viendrai te parler, je te le promets. Et si tu n'as pas envie de m'écouter, je comprendrai. Mais sache que je serai toujours là pour toi, No, même si j'ai fait une erreur sur ce coup-ci. Et je serais très heureuse de venir avec toi et Eniris demain.