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Wildflower - Billie Eilish

Chaque jour était une bataille, une lutte intérieure.

Attal n'avait pas menti, il venait tous les matins à 8h, et tous les soirs à 19h.

Jordan restait de marbre, la colère et la haine toujours plus que présentes.

Il ne voulait pas de cette aide, il n'en avait pas besoin. Il n'était plus cet enfant désespéré, implorant pour avoir de l'amour et de l'intérêt.

Il n'en avait plus besoin, il avait appris à vivre seul, à se relever seul, Attal n'allait pas changer cela.

Pourtant lorsqu'à 19h30, Attal n'avait toujours pas toqué, Jordan sentit une pointe de tristesse dans son cœur, il se sentait comme abandonné par son rival qui avait pourtant promis.

Il s'agissait de leur routine, d'un rendez vous-quotidien qui rythmait ses journées depuis 6 jours maintenant.

Il soupirait toujours lorsqu'à 8h il était obligé de se lever pour dire à Attal de s'en aller, mais paradoxalement cela lui arrachait un sourire, cela lui donnait une raison de se lever chaque matin. Il en était venu a apprécier ces moments là.

-« Vous êtes en retard, Attal. »

-« Oui, j'ai des responsabilités, vous savez à Matignon. Je ne suis pas un adepte de la natation au parlement moi, si vous voyez ce que je veux dire. »
Les petits piques étaient caractéristiques de leur relation d'adversaires politiques.
Jordan ne put s'empêcher d'esquisser un léger sourire.

-« Un point partout. »

-« Alors vous allez me laisser entrer ce soir ? Ou je vais devoir repasser demain matin ? »

-« Demain matin je serais peut-être plus disposé, ou peut-être dans 2 jours, je ne sais pas. » il s'agissait d'un petit jeu entre eux, qui arrachait quelques sourires sincères à Bardella.

-« Non plus sérieusement, Attal arrêtez de perdre votre temps. Je m'époumone depuis une semaine à vous dire que je n'accepterais jamais votre aide, que je vous déteste, mais vous persistez. Cela devient fatiguant. »

-« Fatiguant ? Pour qui ? Je ne suis pas fatigué, et je ne le serais jamais. »

La persistance du premier ministre commençait à. agacer Jordan qui s'impatientait.
Cette assurance, cette confiance cela l'énervait. C'est comme si Attal savait qu'un jour il parviendrait à entrer dans cet appartement et dans la tête de Jordan, cela faisait bouillonner de rage Bardella qui ne pouvait se résoudre à accepter l'aide de son rival.

-« Attal je vous déteste tellement que cela me consume. Vous vous sentez si nul que cela, au point vous avez besoin d'aider les autres pour donner du sens à votre misérable existence ? Mais qui vous dit que ce n'est pas plutôt vous qui avez besoin d'aide ? Vous avez eu l'air d'avoir vos propres démons lors de la crise d'angoisse à laquelle j'ai assisté la dernière fois. Occupez-vous plutôt de cela, votre tristesse se lit sur votre visage. »

Attal était habitué aux remarques mesquines de Jordan, il les encaissait, sans rien dire, conscient que c'était sa souffrance qui parlait. Que c'était sa colère qui le maintenait en vie, il l'acceptait.

-« Au moins je ne me réfugie pas dans l'alcool et la drogue pour donner un sens à ma misérable existence. » Il en jouait, conscient que cela permettait à Jordan d'extérioriser sa douleur.

Jordan attrapa Gabriel par son col et le plaqua contre le mur, fou de rage.

-« C'est la vérité, n'est ce pas Bardella ? »

Jordan bouillonnait, tentant tant bien que mal de ne pas se laisser dépasser pas sa colère, de ne pas ressembler à Peter, de ne pas être lui.
Ses pupilles étaient dilatées, ses mains tremblaient de rage, ses pensées s'embrasaient.

-« À quoi jouez-vous Attal ? »

-« Mais à rien Monsieur Bardella. »

La condescendance d'Attal rendait Bardella furieux. Il le plaqua davantage contre le mur, prêt à l'écraser, à n'en faire qu'une bouchée, à en finir avec cet homme une fois pour toute. Il luttait.

-« Allez-y, frappez moi. » cela sonnait comme un défi, le poussant dans ses retranchements.

Mais Bardella ne voulait pas être lui, il ne voulait pas se transformer en ce monstre qui l'avait hanté, il ne pouvait pas et par dessus tout il ne le voulait pas. Cela voudrait dire s'abandonner complètement à son beau-père qui lui avait déjà tant pris.

La panique le gagnait rien qu'à l'idée de lui ressembler. Une larme, puis deux se mirent à perler sur ses joues silencieusement, comme un torrent de souffrance s'abattant sur le jeune homme.

Il lâcha Gabriel, comme englouti par la culpabilité et par la honte. Son visage enfoui entre ses mains, sanglotant il marmonna
-« Pourquoi persister à m'aider alors que je suis qu'un monstre ? »

-« Oh vous savez, l'arène politique devient rapidement ennuyante sans un adversaire de taille à affronter. »

-« Pourquoi êtes vous bon ? Et moi mauvais ? »

-« Vous n'êtes pas mauvais Bardella, seulement brisé. »

-« Mais je vous déteste, et vous semblez être complètement indifférent à ma haine, pourquoi ? Comment faites-vous ?
Vous avez en vous cette bonté, qui me rend furieux. »

-« Vous pouvez me rejeter, me haïr autant que vous voulez, si cela vous aide à garder la tête hors de l'eau alors je l'accepterais. Je peux être votre repoussoir, votre mouton noir si c'est ce dont vous avez besoin. Mais je peux également être l'épaule sur laquelle vous reposer. Ou l'oreille qui écoutera vos peines. Je serais n'importe quoi, tant que cela vous aide d'une manière ou d'une autre. Je serais là Jordan. »

« on ne blesse que ceux qu'on aime »Où les histoires vivent. Découvrez maintenant