Destins (livre 1)

Chapitre 29

-Vous croyez qu'elle va s'en remettre ? interrogea Aurore.

-Bien entendu, ce n'était pas son père, juste un homme qui l'a éduqué pendant des années, répondit Silver.

-T'es vraiment un connard, répliqua Soul.

-C'était ironique, pauvre idiote.

Les deux dresseurs se jaugèrent furieusement. Blue regarda le fond de la grotte, attristée. Depuis la nouvelle d'hier, la jeune fille refusait de parler à qui que ce soit et s'isolait. Elle n'acceptait que la compagnie d'Aquali. Les cheveux détachés, elle était recroquevillée sous sa couverture. C'était tout ce qu'on pouvait voir d'elle. Pleurait-elle seule ? Blue ne saurait le dire. La force avec laquelle Ludvina avait accueilli la nouvelle l'avait impressionnée : pas une larme, pas un cri. Juste un visage pâle, stoïque. Et un renfermement soudain. Blue avait tentée de l'approcher, mais sa tentation n'avait été soldée que par des hochements de tête frénétiques. Même Mortimer n'avait pu lui parler.

-Je déteste voir les gens comme ça, grommela Green les bras croisés.

-On ne peut rien y faire, lui dit Red. Peu importe ce qu'on lui dira, ça n'ira pas vraiment mieux. Il faut seulement rester près d'elle et la garder à l'œil.

*****

Ludvina ouvrit un œil. Il faisait nuit noire. Les torches avaient été éteintes, tout le monde dormait paisiblement. Doucement, la dresseuse se débarrassa de sa couverture et se leva, déjà habillée. Aquali la regarda avec une once de reproche, que la jeune fille ignora. Ils avaient longuement discuté ces deux derniers jours, et sa décision était prise, peu importe les conséquences que cela apporterait. Le tout était de ne pas se faire remarquer, et de ne mettre personne en danger. Elle jeta un coup d'oeil à l'entrée de la grotte : c'était Soul qui avait le premier tour de garde. Pourtant, malgré le sérieux de son poste, la dresseuse s'était endormie.

Ludvina se dirigea vers les sacs de ses compagnons, bénissant cette occasion. Elle fouina dans l'un d'eux et en tira une pokéball. Précisément celle qu'elle cherchait. La dresseuse chaparda ensuite un autre sac, plus petit cette fois-ci, dans lequel elle fourra quelques baies, du pain et de l'eau, ainsi que trois ou quatre produits Soin.

Ses chaussures montantes à la main, elle gagna la sortie de la grotte. Dehors, l'air était lourd, chargé d'odeur de cendres et de pourriture. Ludvina s'éloigna prestement de l'abri. Une fois assez loin, elle enfila ses chaussures, chargea son sac sur l'épaule, puis se mit à courir. Le repos et l'entraînement des derniers jours lui avaient fait un bien fou, elle progressait rapidement. Aquali la suivait, le bruit de ses pattes résonnant doucement sur le sol.

Une fois qu'elle jugea la distance entre eux et le Mont Sélénite correcte, Ludvina ouvrit la pokéball. Un pokemon massif surgit hors de la sphère rouge. Une fois matérialisé totalement, il poussa un grognement et battit des ailes. La jeune fille posa une main sur son cou massif, le flattant.

-Pardon de te réveiller si tard, Scorvol. Mais j'ai besoin de toi. Peux-tu me conduire jusqu'à Johto ? C'est urgent.

Scorvol lui jeta un regard soupçonneux, ne voyant personne d'autre dans les alentours. Son regard se posa sur Aquali, qui lui fit un signe de patte rassurant. Le pokemon se décida alors à laisser Ludvina grimper sur son dos, chose qu'elle fit rapidement. Elle ordonna à Aquali de retourner dans sa pokéball. Fin prête, elle talonna les flancs de Scorvol pour lui signaler le départ.

Le pokemon déplia ses ailes et les secoua pour les dégourdir. Puis, sans une once d'élan, il décolla avec force, secouant dangereusement sa cavalière.

Le début du vol fut pénible : l'air brûlant cinglait la peau de Ludvina à mesure de l'ascension. N'ayant pas noué ses cheveux, ces derniers lui fouettaient le cou et le visage. L'air devint de plus en plus lourd, suffocant.