•• Chapitre 11.5 : Le Jugement des Anciens

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La neige continuait de tomber doucement à l'extérieur, recouvrant le domaine du clan Gojo d'une couche blanche et silencieuse. À l'intérieur du dojo, le froid de l'hiver semblait s'infiltrer par les parois de bois, mais l'atmosphère était encore plus glaciale à cause du poids des secrets et des émotions non dites. Mei, vêtue d'un kimono blanc, entra doucement, les pieds nus touchant à peine le sol de tatami usé. Son visage, d'ordinaire si ferme et résolu, était marqué par une vulnérabilité inhabituelle. Ses yeux rougis trahissaient les larmes silencieuses qu'elle avait versées, pleurant des vérités trop lourdes à porter seule.

Au fond du dojo, le grand-père de Satoru était allongé sur un futon, son corps frêle enveloppé dans une épaisse couverture. Ses cheveux blancs épars encadraient un visage marqué par les années et la sagesse. Bien que ses yeux soient recouverts d'un voile d'aveuglement, il semblait voir au-delà de l'obscurité, percevant des vérités que seuls les anciens pouvaient comprendre. En entendant les pas légers de Mei, il releva lentement sa couverture, se redressant avec une lenteur calculée, comme s'il avait attendu ce moment depuis longtemps.

"Ne pleure pas, jeune fille," murmura-t-il d'une voix rauque mais douce, pleine d'une compassion infinie. Ses mains tremblantes s'étendirent vers elle, et Mei s'approcha, prenant sa main dans la sienne, sentant la chaleur rassurante de sa peau ridée contre la sienne. Il serra sa main avec une force surprenante, ses doigts osseux fermement ancrés dans la sienne.

"Tout va bien se passer," continua-t-il, son ton empreint de la sagesse de quelqu'un qui avait vu bien plus que ce qu'il ne pouvait partager. "Je suis désolé, au nom de tous les Gojo," reprit-il, sa voix chargée de regret et de honte. "Les anciens... Ils ont été corrompus par la peur. La peur de ne plus avoir d'héritier pour porter le nom et le fardeau du clan. Il fut un temps, bien avant que tu ne viennes au monde, où les Gojo étaient faibles, écrasés par les autres clans. Nous étions vulnérables. Puis Satoru est arrivé... et tout a changé. Il est devenu notre plus grande force... mais aussi notre plus grande faiblesse. Maintenant qu'il est scellé, nous sommes de nouveau plongés dans l'incertitude."

Le vieil homme fit une pause, cherchant ses mots, et Mei baissa les yeux, ses pensées traversées par l'image de Satoru. Elle se sentait déchirée, prise entre son devoir envers le clan et son désir de mettre fin à tant de souffrances inutiles. La tristesse et la frustration bouillonnaient en elle.

"Je ne veux plus que les enfants souffrent," dit-elle enfin, sa voix brisée par l'émotion. "Plus de complots, plus de souffrance. Je veux... je veux que tout cela cesse." Ses yeux, derrière lesquels brillaient des larmes, cherchaient dans les traits fatigués du grand-père une réponse qu'elle ne savait pas formuler elle-même.

Le grand-père resta silencieux un moment, absorbé par la profondeur de ses propres pensées. Puis, avec une tendresse qui contrastait avec ses paroles directes, il serra la main de Mei plus fermement. "Tu es Gojo Mei," dit-il d'une voix qui ne tremblait plus. "Cheffe du clan Gojo. Fais ce qui doit être fait. Ordonne, et agis. Ne laisse plus jamais ce genre de tragédie se produire. Le clan a besoin de renouveau, et ce renouveau, c'est toi."

Mei hésita, son esprit tourmenté par le poids des responsabilités qui pesaient désormais sur ses épaules. "Mais... les anciens ne veulent pas d'une femme comme cheffe," murmura-t-elle, sa voix vacillante, ses doutes refaisant surface malgré sa détermination apparente.

Le vieil homme eut un léger sourire, presque imperceptible. "Quelle importance?" répondit-il doucement. "Tu es la cheffe maintenant. Montre-leur qu'ils ont tort. Exécute tes décisions, ne laisse pas les peurs des autres dicter ton avenir. Fais ce que tu dois faire, Mei. Ne permets plus jamais que de telles tragédies se reproduisent."

Ces mots pénétrèrent profondément dans l'esprit de Mei. Elle sentait une force nouvelle croître en elle, alimentée par la confiance que le vieil homme lui témoignait. Elle se redressa lentement, retrouvant sa posture droite et fière, comme une reine prenant conscience de son royaume. Elle savait maintenant ce qu'elle devait faire. Avec une détermination renouvelée, elle prit le masque blanc, lugubre, posé à côté d'elle et le plaça sur son visage, recouvrant son expression troublée derrière le calme impassible du masque.

𝐋'𝐡𝐞́𝐫𝐢𝐭𝐚𝐠𝐞 𝐝𝐞𝐬 𝐦𝐚𝐮𝐝𝐢𝐭𝐬 (𝐒𝐚𝐭𝐨𝐫𝐮 𝐆𝐨𝐣𝐨 𝐱 𝐎𝐜)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant