Chapitre 15: Amila

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[/!\Avertissement: Ce chapitre peut contenir des scènes de violences susceptibles d'heurter, à lire avec précaution/!\]

Les journées au palais sont tellement plus légères. Le Général est en mission pour plusieurs jours, et je soupçonne la Princesse Olivia d'être à l'origine de son départ. Le Prince Damian m'a fait livrer des fleurs et des chocolats pour se faire pardonner, et me rendre ma liberté loin de son harem. Je me repose, dormant jusque tard dans la matinée, pour ensuite déjeuner en compagnie de la Princesse. Elle et moi sommes vraiment devenues de vraies amies, et je me livre à elle, autant qu'elle se livre à moi.

— Echec et mat ! s'exclame Olivia, victorieuse, en faisant tomber mon roi. Je soupire car elle a encore gagné. Elle est tellement plus maligne que moi à ce jeux.

— Je n'aurais pas dû placer ma tour en D6, j'aurais dû m'écouter la première fois, et prendre votre reine avec mon pion.

— Oui, mais regardez, ma tour était juste à côté de votre reine. Je vous l'aurais prise, avant de faire un autre échec à votre roi, avec mon fou. Elle me montre la position de mes pièces sur l'échiquier, en m'expliquant mes erreurs avec une pédagogie qui me donne envie de progresser.

— Je n'avais même pas vu que ma reine était en si mauvaise posture ! je fais la moue, me résignant à ne jamais être bonne aux échecs.

— Vous y arriverez, il faut de l'entrainement, et de la concentration. Au lieu de manger tous les macarons qui se trouvaient sur l'assiette, vous auriez pu mieux jouer, me taquine-t-elle.

— Vous faites exprès de faire amener des pâtisseries pour détourner toute mon attention ! je l'accuse en riant.

Nous jouons depuis des heures dans le jardin à l'avant du palais. Le soleil est encore haut dans le soleil, et je sirote ma limonade de citron pressé. Depuis que je suis arrivée, je n'avais pas passé d'aussi bon moment. J'apprécie tellement l'instant que j'en oublie mon misérable mariage. Celui-ci me revient immédiatement en mémoire quand une troupe de soldat arrive à dos de cheval, avec en tête, le Général Jankic. Il ne semble pas m'avoir vu, mais moi, je sens mon cœur se soulever en m'amenant une nausée qui m'avait pourtant laisser tranquille jusqu'à lors. Olivia voit mon visage se décomposer, et me prend la main avec compassion.

— Amila, vous n'avez qu'un mot à dire, et je rapporte son comportement à mon père, me murmure-t-elle.

Je secoue vivement la tête. Cela ne ferait qu'aggraver les choses. Je préfère rester passive dans mon mariage, me faire petite pour qu'il me laisse tranquille. J'avais presque oublié sa présence menaçante, et cela ne m'avait pas du tout manquer.

***

Je relis la lettre que m'a écrite Nina. Ma petite sœur a tellement grandi, elle me parle de mariage, et des souhaits qu'elle a soumis à notre mère. Elle souhaite épouser le Prince Damian. Je ne suis pas autorisée à raconter ma présence dans son harem, aussi suis-je obligée de rester évasive quant au questions de ma petite sœur à son sujet. Je n'ai pas eu de nouvelle de Violetta, et redoute le pire. Si le Général Jankic était un époux cruel, le Seigneur Muller était diabolique. Ma pauvre sœur nous est revenue tant de fois dans un état déplorable, sans que ma mère ne daigne intervenir pour la sortir de là. Il suffirait qu'elle lui rende sa dot pour la libérer, mais elle n'en fera rien. Je sens mes yeux s'embrumer et mon nez me pique. Je me retiens de pleurer.

Je suis de retour dans mes appartements après avoir passé ma journée la Princesse, et désormais, je redoute l'arrivée de mon époux dans notre chambre. Avoir passer autant de temps auprès d'elle m'a redonné le goût à la vie, et je sais qu'il va revenir gâcher ça. Je bois de la flamme pourpre, et me couche dans mon lit. Il n'est pas encore là. Je lis un livre que m'a prêté Olivia, sur l'histoire de notre Cité avant la Division. La plume est très ancienne, et certains mots de vocabulaire échappent à ma compréhension. Je les note pour en demander le sens plus tard à Elichias. Le Général n'est toujours pas là. Je m'autorise à espérer qu'il ne rentrera pas de la nuit. La lune éclaire la nuit, et je me décide à fermer mon livre et éteindre ma lampe à huile. Je pourrais fermer les rideaux de la porte fenêtre, mais les étoiles sont particulièrement brillantes ce soir. Je les contemple avant de sentir mes paupières s'alourdirent.

Je suffoque, et me débats avec énergie. J'ouvre les yeux, et le visage du Général est au-dessus du mien. Il a entrepris de me découvrir, et m'étrangle avec rage. Je lui griffe la main avec désespoir.

— Petite garce, tu t'es débrouillée pour me faire partir loin d'ici, pour une mission qui n'avait aucun sens, je le sais... Je t'ai vu avec la Princesse...

Je ne peux pas répondre, des taches brunes apparaissent devant mes yeux, à mesure que l'oxygène quitte mon cerveau.

— Et ses fleurs, venant du Prince, tu crois que je ne les ai pas vu ? Et la maudite fiole que bois pour ne pas me donner de descendance.

Il me donne un coup de poing dans les côtes, puis relâche ma gorge. Mon inspiration est sifflante et saccadée. Je tousse à en cracher mes poumons. Les larmes dégoulinent sur mes joues, je ne comprends toujours pas ce qu'il se passe. Il me replaque sur le lit en maintenant mes bras de part et d'autre de ma tête Je ne peux plus bouger, et commence à le supplier d'une voix rauque.

— Tu veux pas me faire de descendance c'est ça ? Il me gifle une joue, puis l'autre, avec tant de force que je ne sens plus les muscles de mon visage.

— Pitié... Je gémis, la voix brisée.

— De la pitié ? Tu penses que j'ai pitié d'une putain ?

Il commence à vouloir me retourner et soulever ma chemise de nuit, mais je résiste. Il me frappe encore une fois et je ne peux retenir un sanglot en me tenant le visage. Il réessaye mais je lutte de plus belle en lui donnant un coup de pied. Cela ne lui fait pas mal, mais une rage traverse son visage de vautour. Il plaque ses deux mains contre ma gorge, et appuie de tout son poids sur ma trachée. Il va me tuer, je dois faire quelque chose, que quelqu'un me vienne en aide.

Je sens des fourmillements dans mes doigts, dans mes bras. De l'air sec me traverse le corps, et m'anime. Tout se passe au ralentit. Mes bras se tendent devant moi, lentement, puis tout l'air vibre, je le vois physiquement, des petites vaguelettes onduleuses se forment quand mes mains entrent en contact avec son torse. Son visage se met à grimacer, puis ses yeux s'arrondissent sous la surprise. Je vois toute l'action défilé d'une lenteur surnaturelle. Son corps se soulève comme en lévitation, ses mains s'écartent de ma gorge et je peux enfin respirer. Même ma bruyante inspiration est lente. Il est éloigné de moi au fur et à mesure, puis soudainement, le temps reprend sa vitesse normal, et le Général est projeté avec force contre l'armoire en face de notre lit, la brisant en mille morceau. Je suis assise, les bras tendus devant moi. De la sueur dégouline de tout mon corps, et mes muscles sont parcourus de spasmes incontrôlés. Que vient-il de se passer ? 

La Saga des Trois Cités: T1 La Dévoreuse d'OmbresOù les histoires vivent. Découvrez maintenant