La Saga des Trois Cités: T1 La Dévoreuse d'Ombres

Chapitre Complémentaire 1: Violetta

Je me réveille à nouveau dans ce petit pavillon de chasse. Mon corps est encore marqué par le poison que m'a injecté Bron alors que j'étais inconsciente dans notre chambre. Le bout de mes doigts peinent à reprendre leur couleur habituelle. Je dégage les draps et libère mes jambes, non sans faire attention à Serraza qui dort encore profondément en boule sur le bout du lit, ses trois queues lovés autour d'elle. Mes jambes sont engourdies, et je me rattrape maladroitement au mur alors que j'essaye d'ouvrir la porte. Le jour n'est pas encore levé, et je suis assoiffée. Un autre effet secondaire du poison...

J'arrive à saisir la poignée et à l'actionner. La cuisine est plongée dans la pénombre. Hivik a laissé une cruche en terre cuite posée sur la table. Chancelante, je m'y rends lentement, en me tenant à tout qui me semble solide. Je tire une des lourdes chaises et je m'y assoie en prenant appuie sur la table. Je n'ai pas de verre, mais la soif est telle que je saisie la cruche à deux mains et la porte directement à ma bouche. Mes bras tremblent sous son poids. J'en bois quelques gorgées avant de la lâcher malgré moi. Elle se brise en mille morceaux sur le sol du chalet. Je me fige, complétement confuse.

Hivik surgit soudainement, une dague à la main, et il me surprend. J'en tombe de ma chaise et percute le sol et les morceaux de la cruche me coupe la peau.

— Je suis désolé, me dit-il, d'une voix couverte de culpabilité, je n'ai pas vu que vous étiez levée...

Il se précipite sur moi et m'aide à me redresser avec une telle facilité. J'ai presque l'impression de ne rien peser. Mes jambes, encore trop faibles, se dérobent. Il me rattrape et me soulève en passant son bras sous mes genoux, et l'autre dans mon dos.

— Je suis désolée pour votre cruche...

Ses yeux noisette se posent sur les paumes de mes mains, recouvertes de sang. Il serre sa mâchoire, et me porte jusque dans le salon. Il me pose sur le sofa où il dormait et allume la lampe à huile pour m'analyser plus en détail.

— C'est de ma faute, je devrais vous laisser de l'eau à portée de main. Ne bougez pas Ma Dame, je vais chercher de quoi vous nettoyer et bander ces plaies.

Mon corps tremble à nouveau. Il ne fait que ça ces derniers jours. J'ignore si le poison me laissera des séquelles, ce que je sais en revanche, c'est que je ferai payer Bron. Je repense à Amila, à ce qu'elle a fait pour me sauver. Ma petite sœur a des pouvoirs, elle est incroyable. J'ai davantage peur pour elle à présent. Elle représente tout ce que les hommes puissants de ce monde veulent voir disparaitre.

Hivik revient avec une bassine d'eau et un linge propre. Il se met à genoux devant moi et me prend mon bras avec douceur. Il entreprend de me nettoyer en prenant soin de ne pas me faire de mal. Je le regarde avec attention, contemplant les veines de ses mains caleuses à la peau bronzée tenir le linge humide, et essuyer le sang qui brille sur mon bras trop pâle. Des mains puissantes qui ne sont que douceur sur moi. Je n'ai jamais connue ça. Mon cœur chavire doucement, apaisé, en observant chaque geste délicat qu'il effectue en essuyant mon bras. Il commence ensuite à bander mes plaies, méticuleusement. Il lève ses yeux vers moi, et me fait un sourire compatissant. Je me surprend saisir une de ses mèches brunes qui retombait sur son visage et à la faire glisser sur mes doigts. Il se fige, et sa respiration s'accélère sous la tendresse de mon geste. Je lui souris.

— Merci Hivik...

Il me répond d'un même sourire, se relève et emporte la bassine à présent remplie d'un mélange d'eau et de sang.

— Vous pouvez dormir ici, je vais aller chasser tôt ce matin. Je vais vous faire une nouvelle concoction pour le poison.

Je m'allonge sur le sofa et observe sa silhouette s'agiter dans la cuisine. Il ramasse les morceaux brisés de sa cruches, et commence à préparer mon antidote. Je cille une fois, deux fois, mes paupières se font lourdes, et je me rendors.