Chapitre 15 : Eden

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J'avais passé la semaine à transmettre une partie de mes activités à Nicolas, délaissant les responsabilités que j'avais prise avec l'équipe artistique. Étant en période assez creuse, manquer quelques réunions n'étant pas bien embêtant tant que je gérais les démarches administratives. J'avais donc pris soin de le faire de chez moi tous les soirs, traitant mes mails jusqu'au moment du coucher malgré mes yeux tombants de sommeil.

Il était grand temps que Nicolas arrive car la charge de travail de PDG et de directrice artistique n'était plus supportable en étant seule et je cachais de gros cernes tous les matins depuis deux mois sous une tonne de maquillage. Heureusement pour moi, mon ancien camarade de classe avait de l'expérience et commençait déjà à être autonome sur certaines tâches simples, m'aidant à diminuer ma charge de travail.

C'est pourquoi dès lundi, je reprendrai les réunions avec les stylistes et ne pourrais plus éviter Alix comme je l'avais fait cette semaine. La plupart du temps occupée avec Nicolas, je n'avais pas eu grand effort à faire pour ne pas la croiser, si ce n'était marcher rapidement dans les couloirs histoire de ne pas avoir à lui adresser la parole. Par miracle, je ne l'avais croisée qu'une fois et elle n'avait pas cherché à m'interpeller. Tant mieux. Je n'aurais pas su quoi lui dire.

Après le baiser que nous avions échangé le week-end précédent, je ne savais plus quoi penser. Lorsque je l'avais convoquée dans cette salle de réunion, je n'avais pas conscience de ce qui m'animait. J'étais très en colère contre elle et voulais lui remonter les bretelles pour avoir osé ramener elle-même une journaliste. Mais elle m'avait fait prendre conscience que je n'étais pas énervée à cause de la presse mais à cause de sa proximité avec cette femme. Et je devais l'avouer, elle avait eu totalement raison. Cela m'avait rendu folle de jalousie.

La jalousie. Une émotion qui ne m'était pas familière. En dehors de ma relation avec mon frère qui n'était basée que sur ça, je n'avais jamais été jalouse de cette manière, ni avec Chloé, ni avec celles d'avant.

Or, je ne pouvais le nier, la voir avec cette blonde m'avait rendue jalouse. Et cela me glaçait le sang. Ce soir-là, j'avais pris conscience que j'étais en train de lui donner un grand pouvoir. Un pouvoir bien trop dangereux. Que je n'avais donné qu'une seule fois. La fois de trop. Une boule se noua dans ma gorge en songeant à cette période de ma vie. Ma vue se brouilla et je secouai la tête pour penser à autre chose.

Non, je ne pouvais pas lui donner ce pouvoir. Celui de me détruire, si tant est que cela puisse encore être possible.

Mon téléphone vibra dans la poche de mon pantalon, me sortant de mes pensées.

- Oui ? répondis-je machinalement.

- T'arrives dans combien de temps ? Papa a promis à maman que tu viendrais alors j'espère que nous fait pas un faux plan, Eden, s'énerva mon frère.

- Je suis juste devant la maison, j'arrive, soupirai-je avant de raccrocher, déjà agacée du repas de famille organisé par mon père.

Si ma relation avec ma mère avait toujours été compliquée, celle-ci ne s'était pas améliorée quand j'avais refusé deux mois plus tôt de virer la fameuse rousse qui lui avait si mal parlé. Je lui avais donné comme argument qu'Alix était une styliste exceptionnelle et que je ne pouvais prendre le risque de voir ses créations sortir chez des concurrents. Ce qui n'était pas totalement faux. Mais ce n'était pas la principale raison de mon refus. En réalité, j'avais adoré la voir prendre ma défense et remettre ma mère à sa place. C'était quelque chose que peu de gens osaient faire, en dehors de ma grand-mère.

Alors quand ma mère s'était pointée chez moi le lendemain matin, tambourinant à ma porte telle une folle dans un hôpital psychiatrique, pour me demander de licencier immédiatement la jeune femme qui lui avait manqué de respect, je lui avais dit non sans une hésitation. Et ça, ça n'était pas passé. Elle avait alors entrepris de me descendre une fois de plus auprès de Liam qui m'en voulait déjà énormément pour le renvoi de Diane et mon père s'était encore retrouvé au milieu de toutes ces histoires.

Eden & DentelleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant