Chapitre 8 : Eden

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En découvrant la position de mademoiselle Dean, j'eus envie de rire. Elle était contorsionnée, des bouts de tissu et de dentelles éparpillés un peu partout autour d'elle, tenant à bout de bras une esquisse de modèle de soutien-gorge qui ne tarderait pas à s'effondrer si je ne me dépêchais pas de répondre à son appel à l'aide.

Me contentant d'un sourire en coin pour masquer mon amusement, je saisis un bol d'épingles posé sur une des tables proches de l'entrée et m'avançai vers la rousse. Il me sembla alors la voir se raidir au fur et à mesure que je m'approchais jusqu'à se tendre comme un piquet en me sentant à quelques centimètres d'elle.

Posant le bol à côté d'elle, je saisis une épingle pour me pencher par-dessus son épaule. Une légère odeur de violette me parvint lorsque mon visage se rapprocha de ses cheveux, laissant les miens frôler son épaule. Du coin de l'œil, je la vis frissonner à ce contact et les paroles de Taylor me revinrent en mémoire.

Non, elle ne m'a pas tapé dans l'œil. Je suis juste capable de reconnaître que c'est une belle femme.

J'insérai l'épingle dans le mannequin de manière à figer la disposition de la dentelle comme elle l'avait probablement imaginé, mes doigts se plaçant sur les siens pour venir maintenir les morceaux de tissu. Ce simple toucher ne dura que quelques secondes avant qu'elle n'ait un mouvement de recul, sa main se détachant quelque peu du mannequin.

— Ne lâchez pas, m'écriai-je, tentant de rattraper les morceaux de dentelle qui commençaient déjà à tomber. Tout va se défaire.

Son souffle se fit plus fort tandis que ses mains rattrapèrent le tissu dégringolant pour venir le replacer sous mes doigts.

— Excusez-moi, souffla-t-elle doucement, chuchotant presque.

Mon cœur se serra. Avait-elle peur de moi, pour ne pas oser parler ainsi ?

— Cessez de vous excuser, je ne suis pas un monstre, murmurai-je suffisamment fort pour qu'elle m'entende, quelque peu blessée qu'elle se sente si menacée.

Elle se tourna vers moi et planta son regard vert d'eau dans le mien, frottant ses lèvres entre elles comme si elle se retenait de dire quelque chose.

— Non, vous n'êtes pas un monstre, admit-elle finalement. Vous n'êtes pas non plus imbue de votre personne et vous ne semblez pas vous prendre pour quelqu'un de supérieur. Je... J'étais complètement bourrée et en colère alors j'ai dit n'importe quoi. Mais je me trompais totalement. Alors, je vous demande une fois de plus de m'excuser parce que je me sens vraiment pathétique.

C'était la première fois que quelqu'un s'excusait sincèrement de m'avoir fait du mal et cela me toucha bien plus que je n'aurais pu le penser. Ses mots apaisait la douleur qu'elle avait ravivé quelques jours plus tôt. Mais je ne souhaitais pas voir l'air coupable sur son visage une minute de plus. Je m'assis donc sur la chaise à côté d'elle et concentrai mon regard sur le mannequin.

— Ne parlons plus de cette histoire, mademoiselle Dean...

— Alix... Vous pouvez m'appeler Alix si vous le souhaitez, me coupa-t-elle en se recalant devant son modèle.

— Eh bien, oublions cette histoire, Alix, repris-je en souriant. Voulez-vous bien m'expliquer pourquoi vous travaillez sur ce modèle ?

Son mouvement des lèvres refit surface et je compris que la réponse ne me plairait pas forcément.

— À vrai dire, j'ai passé la matinée et une partie de l'après-midi à me demander comment améliorer le modèle que vous m'avez confié. Mais, j'en ai conclu qu'il n'était pas sauvable alors... Alors j'ai décidé de vous proposer un nouveau modèle bien plus en accord avec votre image de marque, annonça-t-elle en se redressant, cachant si bien sa nervosité qu'elle aurait pu passer inaperçue si ses lèvres ne s'étaient pas pressées l'une contre l'autre avant de parler.

Eden & DentelleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant