Eden & Dentelle

Chapitre 12 : Eden

— Aller, répond ! priai-je à voix haute.

En sous-vêtements dans les toilettes du Carrousel du Louvre, je secouais la tête en me maudissant d'en être arrivée là. En apercevant ses mains tremblantes et son air paniqué je n'avais pas hésité plus longtemps avant de lui céder ma propre robe. Maintenant, c'était moi qui me retrouvait en difficulté.

— Allo ? tinta la voix de ma meilleure amie.

— Oh merci, soupirai-je tandis qu'un frisson parcourait mon corps qui faisait face au changement de température.

— Eden ? Qu'est-ce qui se passe ? s'inquiéta Taylor en entendant mon soulagement.

— Dis-moi que t'es venue?

Taylor devait assister au défilé mais avec son travail nous n'étions jamais à l'abri d'un imprévu tel qu'un tatouage plus long à réaliser que d'ordinaire ou une peau qui ne marquait pas bien.

— Oui, je suis dans le public. Pourquoi ?

— Il faut que tu me rejoignes dans les toilettes des coulisses, m'écriai-je en décollant le téléphone de mon oreille pour voir l'heure.

La présentation des stylistes était sur le point de se terminer.

— Euh... D'accord, fit-elle d'un ton perplexe.

— Fais vite, c'est urgent.

Ne me voyant pas au bord du rideau, le présentateur lancerait probablement les vidéos préparées en cas de problème. L'équipe de communication nous préparait toujours des vidéos bateaux pouvant se glisser à différentes étapes du défilé, nous faisant gagner de précieuses minutes. À ce stade, Olivier montrerait au public les vidéos des anciennes collections. Il interrogerait probablement Carla, la plus ancienne styliste d'Eden & Dentelle, lui demandant de comparer les anciennes collections aux nouvelles. Il se tournerait ensuite vers Jules pour confronter leurs avis, faisant durer cet instant le plus longtemps possible. Puis, afin que le public ne se rende pas compte que c'était une diversion, Olivier se concentrerait sûrement sur Alix pour finir. N'ayant aucun défilé à son actif, il tenterait de recueillir ses impressions sur son premier défilé, ses difficultés, ses peurs, ses réussites. Et c'est là que ça risquait de coincer. Débiter calmement un discours préparé et répondre aux questions imprévues d'un présentateur devant des centaines de personnes ce n'était pas la même chose et Alix n'était absolument pas préparée à ça.

Un gros bruit me fit sursauter avant que je n'entende le bruit caractéristique d'une personne qui court avec des talons.

— Faut vraiment que tu penses à revoir la sécurité, annonça la voix de Taylor, essoufflée. Je suis passée beaucoup trop facilement.

Sa présence en quelques minutes m'arrangeait mais démontrait également que n'importe qui pouvait entrer dans les coulisses et que l'auteur du sabotage pouvait être extérieur au staff présent. Cela pouvait être n'importe qui, bien que mes soupçons étaient portés sur une personne en particulier.

La porte de la cabine grinça lorsque j'en sortis légèrement pour lui montrer le problème. Ses yeux s'écarquillèrent en voyant ma tenue, ou plutôt mon absence de tenue. Une personne entra soudain dans les toilettes et je reclaquai la porte pour ne pas être vue.

— Madame Castel ! C'est à vous !

— J'arrive, il faut que monsieur Fournier lance les vidéos, ordonnai-je tout en tirant mes cheveux, mes mains tremblant tellement que je devais leur trouver quelque chose à tenir.

— C'est déjà fait. Madame Gagnon évoque son arrivée dans l'entreprise et les collections auxquelles elle a pu participer.

C'était bien ce que je pensais et Olivier ne parviendrait pas à gagner infiniment du temps. Il fallait que Taylor se dépêche et, pour ça, cette femme devait partir.