Double jeu ?

Chapitre 5 : Jour J

Je ne sais toujours pas pourquoi les filles ont disparu, Cassandre m'a assuré qu'elle n'était pas au courant. Je scénarise les pires images dans ma tête, je veux savoir et je suis déterminée. Je me lève tôt ce matin, j'ai besoin de me vider l'esprit avant cette fameuse soirée. Je quitte ma chambre pour aller à la restauration, j'ai besoin d'un bon café.

Les tables de petit-déjeuner sont dressées, je me rapproche du buffet pour faire mon choix. J'aperçois Jamie, assise à une table, elle parait abattue. Elle regarde son café en tournant la cuillère, perdue dans ses pensées. Elle lève la tête et nos regards se croisent, elle se lève et se dirige vers moi.

— Bonjour la nouvelle, dit-elle d'une voix arrogante.

Je ne suis pas surprise de son intonation, elle ne m'inspire pas confiance.

— Bonjour Jamie, moi, c'est Éva. Je balaie la salle du regard. Nous ne pouvons pas communiquer, dis-je en chuchotant.

— Je sais, mais il n'y a personne. Connais-tu ta mission pour ce soir ? Évidemment que tu le sais, dit-elle en croisant les bras et en levant les yeux au ciel, sur un ton exaspéré.

— Pourquoi me dis-tu ça, sur ce ton ?

— Tu ne devines pas ? Tu arrives ici comme prisonnière, tu discutes avec Gary et tu te retrouves avec un des meilleurs clients. Les nouvelles commencent en bas de l'échelle, et toi, tu grimpes les échelons sans effort.

Elle s'énerve de plus en plus, elle décroise les bras et rapproche son visage du mien, je me fige sur place.

— Je..., je ne comprends pas, je n'ai rien fait.

— Tu penses vraiment que je vais te croire ?

Je commence à bouillir, je ne comprends pas son comportement envers moi. Elle ne me connaît pas, mais elle fait ses propres déductions.

— Ouvre bien tes oreilles Jamie ! Si j'avais eu le choix, je t'aurais laissé le client et je serais rentrée chez moi. Je suis enfermée comme toi et je n'ai pas demandé ce qu'il m'arrive. Maintenant, si tu n'es pas contente, je t'invite à toquer à la porte de Gary pour te plaindre.

Elle me regarde avec des yeux bien ronds, elle est étonnée par ma réaction. Au fond, je me surprends moi-même, mais j'ai besoin de me vider l'esprit et non de me rajouter des tracas. Je la contourne pour quitter la pièce.

— Rappelle-toi qu'ici tu n'es rien, PRI... SONNIÈRE, lance-t-elle. Je me retourne avec un léger sourire.

— Alors nous sommes deux ! Et je quitte la pièce.

Elle a réussi à m'agacer cette garce. Je prends mon café sur la terrasse de ma chambre, au moins ici je suis tranquille, enfin le plus souvent. Je réfléchis à cet échange avec Jamie, elle est vraiment sur les nerfs. Je n'ai eu aucun privilège, contrairement à ce qu'elle pense, je subis comme les autres. Pourquoi pense-t-elle que j'ai eu un traitement de faveur de la part de Gary ? Je n'ai même pas réussi à négocier ma liberté. Je n'ai pas toutes les réponses, mais je les trouverai, tôt ou tard. Je repense à la soirée de ce soir, nous devons connaître le thème dans la matinée, au grand salon avec Carole. Je sens l'angoisse évoluer en moi, mes muscles se crispent, je suis forte, mais terrorisée. Je ne sais pas ce qui va se passer, je réalise les pires scénarios dans ma tête, j'imagine de gros porcs qui posent les mains sur moi. Je déglutis, j'ai envie de vomir, je n'arrive pas à me calmer, je ne veux pas être violée. J'ai un délai grâce à ce fameux client, mais qu'attend-il de moi ? Et s'il voulait me louer pour me violer avec tous ses amis, je ne m'en remettrais pas, ce serait trop dur. Il pourrait m'acheter pour me vouer au métier de prostituée à domicile, il pourrait m'user et me tuer à petit feu, mais je pourrais tenter de m'enfuir. C'est tellement absurde, je suis déjà piégée, mon sort est entre les mains d'un sadique et d'un dragon. Je termine mon café et je pose la tasse sur le guéridon, devant la baie vitrée. Il est temps d'aller chercher les informations, qui répondront à certaines de mes questions, pour la soirée de ce soir. Je passe aux toilettes avant de mettre un gilet, et je sors pour enquêter.