chapitre 7 Raven

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Je suis plutôt satisfaite de cette première journée. Je me suis concentrée, pris des notes, et le concours de fin d'année m'intéresse énormément. Depuis toute petite, je rêve de lancer mon propre commerce, et ici, à New York, cette possibilité semble enfin à portée de main.

En quittant l'université avec Lola, je sens qu'elle pourrait devenir une amie précieuse. Elle est pleine de vie, bavarde, mais dans le bon sens du terme. Nous échangeons nos numéros, et je souris malgré moi. Peut-être que ma nouvelle vie commence vraiment bien ici. Pourtant, une angoisse grandit dans ma poitrine. J'ai un rendez-vous avec une psychologue cet après-midi, et je n'ai toujours pas retrouvé mon carnet. Ce carnet contient mes pensées les plus sombres, mes émotions les plus enfouies, et je ne sais pas ce qu'il est devenu. Cela m'obsède.

Le bâtiment où se trouvait le cabinet était moderne et lumineux. L'intérieur était aménagé avec soin, les couleurs douces et les plantes disposées ici et là contribuaient à une atmosphère apaisante. Pourtant, rien de tout cela ne parvint à calmer mes nerfs. Une femme à l'accueil me fit signe de m'asseoir en m'indiquant que Madame Clarke arriverait sous peu. Je pris place dans la salle d'attente, et presque instantanément, mon genou gauche se mit à trembler. C'était une habitude que je n'arrivais pas à contrôler lorsque j'étais stressée.

Je repensai aux nombreuses séances de thérapie que j'avais eues à Paris. Les visages de mes anciens thérapeutes me revenaient en mémoire, surtout les regards sceptiques des hommes qui semblaient ne rien comprendre à mes angoisses. Je n'avais jamais réussi à m'ouvrir à eux. Peut-être étais-je incapable de faire confiance à des hommes, ou peut-être étaient-ils simplement trop distants pour moi. Cela avait fini par créer des tensions avec mes parents, qui ne comprenaient pas pourquoi je changeais si souvent de thérapeute.

Perdue dans mes pensées, je fus ramenée à la réalité par l'ouverture de la porte. Une femme entra dans la salle d'attente. Elle était grande et élégante, avec des cheveux blonds soigneusement attachés en un chignon discret. Son sourire était accueillant, et je sentis une pointe de réconfort dans son regard bienveillant.

— Bonjour, Raven. Je suis Madame Clarke, enchantée de vous rencontrer, dit-elle en tendant la main.

Je me levai un peu trop rapidement, et une légère maladresse s'empara de moi. Je lui serrai la main, sentant mes doigts trembler. Elle ne sembla pas y prêter attention, et son sourire ne vacilla pas.

— Bonjour, murmurai-je, la voix à peine audible.

Elle me guida dans son bureau, un espace lumineux et chaleureux. Le mobilier moderne contrastait agréablement avec les coussins colorés et les tableaux apaisants accrochés aux murs. Je m'assis en face d'elle, tentant de masquer mon malaise. Madame Clarke commença à me poser quelques questions sur mon parcours et mes expériences avec les précédents psychologues. Je répondis de manière évasive, expliquant que les séances à Paris avaient été éprouvantes, que je me sentais toujours mal à l'aise. J'omis de mentionner que la présence masculine m'avait toujours mise mal à l'aise, une peur que je n'avais jamais su contrôler.

— Je comprends, dit-elle d'une voix douce. Sachez qu'ici, vous êtes dans un espace sûr. Vous pouvez parler librement, à votre rythme. Il n'y a aucune pression.

Ses paroles me rassurèrent un peu. Peut-être que cette fois-ci serait différente. Peut-être que je pourrais enfin dire ce que j'avais sur le cœur. Mais alors que je commençais à me détendre, sa question suivante fit remonter toutes mes angoisses.

— Vous avez un carnet, n'est-ce pas ? Un journal où vous notez vos pensées. J'aimerais beaucoup y jeter un coup d'œil, si vous l'avez avec vous.

Mon estomac se noua. Je pris une profonde inspiration, cherchant une excuse.

— Je l'ai oublié chez moi, répondis-je en esquissant un sourire nerveux. Je le ramènerai la prochaine fois.

— Ce n'est pas grave pour aujourd'hui, répondit-elle, compréhensive. Mais essayez de ne pas l'oublier la prochaine fois. C'est un outil précieux pour comprendre ce que vous ressentez.

Elle me fixa un instant, notant quelque chose dans son carnet. Je sentais mon malaise grandir, mais sa voix me rassura à nouveau.

— Raven, pour aujourd'hui, parlons de ce qui vous amène ici, à New York. Qu'est-ce qui pèse le plus sur vous en ce moment ?

Je réfléchis un instant. Cette question semblait si simple, mais elle ouvrait un gouffre de pensées et de souvenirs douloureux. Après un moment de silence, je finis par parler, ma voix à peine plus forte qu'un murmure.

— J'ai quitté Paris... avouai-je. C'était trop lourd là-bas. Trop de souvenirs. Je... je n'arrivais plus à respirer.

Je vis un éclair de compréhension dans son regard. Elle ne dit rien, se contentant d'attendre que je continue. Les mots vinrent lentement, au départ.

— Je fais des cauchemars, dis-je finalement. Presque toutes les nuits. Ils me réveillent, et je... je ne sais pas comment les arrêter.

Elle hocha la tête doucement.

— Vous avez fait le bon choix en venant ici, dit-elle d'une voix apaisante. Parler de ces cauchemars, même un peu à la fois, peut aider à les comprendre. Et peu à peu, cela peut réduire leur impact.

Ses paroles résonnèrent en moi. Je lui racontai alors mes peurs, ma méfiance envers les hommes, et cette sensation d'être constamment en danger. Elle m'écouta sans m'interrompre, notant quelques détails de temps à autre. La séance se termina plus vite que je ne l'aurais pensé. Lorsque je sortis, je ressentis un mélange de soulagement et de confusion.

En sortant, mon téléphone vibre. C'est Lola.

-Raven ! Tu dois absolument venir à la soirée de ce soir ! Tout le monde va y être, et ça va être génial ! Allez, viens, s'il te plaît !

Je soupire. Une soirée ? Maintenant ? Après tout ça ? Je n'en ai vraiment pas envie. Rien que l'idée d'être entourée de monde me donne la chair de poule.

-Lola, je ne pense pas que ce soit une bonne idée... je suis fatiguée,lui réponds-je d'une voix hésitante.

-Allez, juste une heure ! Ça va te faire du bien, tu es à New York maintenant, tu dois en profiter ! C'est le moment de tout recommencer ! insiste-t-elle, presque implorante.

Je soupirai. Après cette séance, je n'avais pas vraiment envie de faire la fête, mais elle insista tellement que je finis par accepter. Peut-être que sortir, même un peu, serait le début d'un changement. Ce soir, peut-être, je pourrais laisser derrière moi quelques fantômes de Paris et commencer à vivre enfin.

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