chapitre 43 Raven

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J’ouvre les yeux, et je suis dans une chambre d’hôpital. La lumière crue du néon me brûle les paupières, et une douleur sourde martèle mon abdomen. Tout se mélange dans ma tête, les bruits, les images, les sensations. J’ai l’impression d’être revenue d’un long voyage, mais un voyage flou, où les souvenirs se brouillent et se dissipent comme de la fumée. Je prends une grande inspiration, essayant de rassembler les fragments éparpillés de ce qui m’est arrivé.

Le médecin entre dans la chambre, le visage grave mais rassurant. Il m’explique calmement que j’ai été touchée par une balle, et que l’opération s’est bien déroulée. Il me parle des jours où j’ai été inconsciente, mais ses mots glissent sur moi comme de l’eau. Je n’écoute qu’à moitié, mon esprit s’enfuit vers d’autres souvenirs, des morceaux de ce qui s’est passé. Je revois des bribes : Jack – ou Nathan, plutôt –, son sourire froid, la douleur qui traverse mon corps quand il appuie sur la gâchette. J’essaye de me rappeler chaque détail, mais tout est flou, comme si ma mémoire se protégeait elle-même.

Soudain, on frappe à la porte, et je me tourne, curieuse. Quand mes yeux se posent sur les deux silhouettes qui entrent, mon cœur rate un battement. Ma mère, Serena, et mon père, Peter. Je cligne des yeux, comme si je peinais à croire ce que je vois. Ils sont là, devant moi. Je ne m’attendais pas à les voir, surtout après notre dispute. Ma mère s’approche en pleurant, des larmes dévalent de ses joues, mais son sourire est doux, réconfortant. Elle s’assoit à côté de moi, caressant ma tête, comme elle le faisait quand j’étais petite.
- Mary nous a appelés dès qu’elle a su,  dit-elle d’une voix brisée.  On a pris le premier avion pour venir.

Je hoche la tête, reconnaissante qu’elle soit là, même si je ne peux m’empêcher de ressentir un certain malaise. Mon père s’approche à son tour. Peter Black, cet homme d’affaires toujours occupé, celui avec qui j’ai tant de mal à m’entendre, se tient devant moi avec un sourire que je ne lui avais pas vu depuis longtemps. La dernière fois que nous nous sommes vus, nous nous étions disputés à propos de mon départ pour New York. Mais aujourd’hui, il est là. Il s’incline et dépose un baiser sur mon front. Un frisson me parcourt. Sa présence m’apaise d’une certaine manière, même si je ne sais pas trop comment interpréter ses gestes.

Je n’ai pas le temps de me poser plus de questions qu’un cri aigu résonne dans la pièce. Lola fait irruption, son visage rayonnant malgré les larmes qui embuent ses yeux. Elle se précipite vers moi, attrapant ma main comme si elle avait peur de me voir disparaître.
- Raven ! Oh, Raven, j’ai eu tellement peur,»dit-elle d’une voix étouffée, avant de me tirer dans une étreinte.
Je ferme les yeux, sentant sa chaleur, reconnaissant sa présence. J’ai failli mourir, et maintenant, je me rends compte que j’ai encore tant de personnes qui tiennent à moi.

Quand je rouvre les yeux, je vois le reste de ma famille. Mary, Daniel, Victor… et enfin Alec. Mes yeux s’accrochent aux siens, et je sens une vague d'émotions me submerger. Il s’approche, dépose un baiser sur mon front, et je sens ses mains trembler légèrement contre ma peau. Victor,  adorable, pointe un doigt vers Alec.
- Voldemort va te tuer, dit-il, comme si c’était la chose la plus évidente du monde.
Je ne peux m’empêcher de rire, suivie par Alec et même mon père, qui esquisse un sourire. J’ai l’impression que cette simple phrase allège l’atmosphère, dissipant les restes de la tension qui pesait dans la pièce.

Le médecin revient et interrompt notre moment, expliquant que j’ai besoin de repos. Un à un, ils quittent la pièce. Mais avant qu’Alec ne parte, je serre sa main pour le retenir.
- Reste avec moi,  murmuré-je, sentant une peur sourde m’envahir à l’idée d’être seule.
Il acquiesce d’un signe de tête et s’assoit près de moi, sa main glissant dans la mienne. Le silence s’installe, un silence réconfortant, qui me permet de reprendre mes esprits.

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- Alec,  dis-je, brisant le silence.  Que s’est-il passé ?  Les souvenirs reviennent par vagues, mais j’ai encore du mal à assembler les pièces du puzzle.

Alec prend une grande inspiration, son regard se perdant un instant dans le vide.
- Après que tu aies été blessée, Daniel a tiré sur Nathan. C’est… c’est fini maintenant. Il marque une pause, cherchant visiblement ses mots.  On a appris qu’il souffrait de bipolarité et de troubles dissociatifs. C’est pour ça qu’il se faisait appeler Jack.

Je hoche la tête, absorbant cette nouvelle information. Cela éclaire d’un jour nouveau tout ce qu’il a fait. Même si cela n’excuse pas ses actes, je comprends maintenant d’où venait cette violence imprévisible, cette manière dérangeante de changer d’identité.
- Je me suis toujours demandé pourquoi il passait du bon gars à l’homme terrifiant.

Alec serre un peu plus ma main, sa voix se fait plus douce.
- Personne n’aurait pu prévoir ça, Raven. Ce n’est pas ta faute. Son regard se pose sur moi, empli de tendresse.  Je suis tellement heureux que tu sois là, avec nous.

Je détourne les yeux un instant, émue, avant de replonger dans son regard.
- Merci, Alec. Pour tout.  Il m’offre un sourire qui me réchauffe de l’intérieur, et une idée me traverse l’esprit.  Le concours…

Il sourit, l’air un peu embarrassé.
- Jérémy, le copain de Lola , va essayer de convaincre son père de faire une exception. Je n’ai pas réussi à te faire inscrire, mais on ne baisse pas les bras.

Je souris, touchée qu’il ait pensé à moi même dans un moment pareil.
- Merci d’avoir essayé. Un silence s’installe entre nous, et je sens le poids de mes émotions qui me fatigue. Alec, je t’aime.  Les mots sortent sans effort, portés par la sincérité du moment.

Il sourit, ses yeux brillants d’un éclat que je ne lui avais encore jamais vu.
- Moi aussi, Raven.  Il se penche pour déposer un baiser sur mes lèvres, un baiser tendre et rassurant.

Je me laisse aller, sentant mes paupières s’alourdir.
- Reste avec moi, le temps que je m’endorme,  chuchoté-je, ma main se refermant doucement autour de la sienne.

Il acquiesce, s’installant plus confortablement. Sa main reste fermement ancrée dans la mienne, et je me laisse glisser dans les ténèbres du sommeil, rassurée par sa présence, prête à affronter les jours à venir.

RedemptionOù les histoires vivent. Découvrez maintenant