Chapitre 27: Explications

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      Le dîner se déroula de la manière dont Victoria l'avait prévu. Froid et creux. Lord Newcastle, ignorant des tensions entre ses différents convives, essayait d'animer la conversation, sans grand succès.

      Après ce qui parut à Victoria deux heures de torture, ils eurent enfin le droit de sortir de table. Victoria avait clairement dit à sa mère, Lady Newcastle, que c'était à elle d'annoncer au prince où il dormirait. Elle se dédouanait de tout cela.

     Après le dîner, elle salua donc tout le monde, son père, sa mère, Willis, le majordome, et même le prince, et remonta directement dans sa chambre. Elle sortit son vieux journal intime et commença à y écrire toutes ses émotions de la journée. À peine dix minutes plus tard, on frappa à la porte. La jeune Lady cria à son interlocuteur d'entrer.

     Le prince Anthony entra, suivit de près par Lady Newcastle. Elle annonça qu'avant de les laisser, elle devait leur parler de quelques petites choses. Elle s'efforça de leur expliquer, sans jamais prononcer le mot tabou, qu'il ne fallait en aucun cas qu'il y ait de « rapprochements » entre eux. Elle ajouta même qu'il fallait attendre le mariage. N'en pouvant plus, Victoria coupa court à la conversation, en décrétant que cela n'était pas près d'arriver.

    Quand elle sortit enfin, le calme s'installa à nouveau dans la pièce. Victoria finit tranquillement d'écrire dans son journal, sans se soucier de ce que faisait son fiancé. Elle rompit finalement le silence en lui annonçant qu'elle allait se changer pour la nuit. Il ne répondit pas mais acquiesça.

     Elle passa dans la pièce d'à côté, se changea et quand elle revint, un peu embarrassée d'être ainsi vêtue devant lui, il n'avait pas bougé d'un pouce. Ses yeux s'éclairèrent d'une lueur inconnu en la voyant.

« -Vous pouvez y aller, Votre Altesse.

-Oui, bien sûr, bredouilla-t-il. »

     Victoria nota qu'il avait perdu de sa superbe, mais elle ne parvenait pas à comprendre pourquoi. Peut-être qu'il était simplement triste de leur dispute plus tôt dans cette journée. Ou bien, il était lui aussi mal à l'aise à l'idée de dormir avec elle.

      Lorsqu'Anthony revint dans la pièce, Victoria était déjà couchée du côté du lit qu'elle occuperait, comme elle l'avait décrété. Il commença à s'avancer, mais s'arrêta au milieu de la pièce, comme hésitant. La jeune femme prétendait être en train de lire, mais, en réalité, elle observait son manège du coin de l'œil. Il soupira.

« -Victoria. Il faut que nous crevions l'abcès.

-Je ne vois pas de quoi vous parlez Votre Altesse.

-Arrêtez de recommencer à m'appeler « Votre Altesse » à chaque fois que vous êtes en colère !

-Comment dois-je vous appeler alors ? « mon canari » ? « mon chéri d'amour » ? Je vous écoute, dites-moi ?

-Anthony. Anthony pour vous, je vous l'ai déjà dit. Je suis déjà « Votre Altesse » aux yeux du monde entier. Je veux être Anthony pour vous. Juste Anthony. Et je veux que vous soyez Victoria. Juste Victoria et Anthony. »

       En entendant ces mots, Victoria sentit son cœur fondre. Mais elle demeura de pierre. Il ne fallait en aucun cas qu'elle s'émeuve devant lui. Elle devait rester forte et faire bonne figure.

« -Soit Anthony. Mais je ne vois toujours pas ce dont vous voulez parler.

-Je veux parler de vos propos plus tôt aujourd'hui. De toute cette situation bloquée, où on ne se parle pas. Est-ce donc ainsi que vous voulez que notre mariage soit ? Je ne comprends pas votre attitude ! Vous avez dit m'aimer, je vous fais la surprise de venir ici, vous paraissez heureuse, et la seconde d'après, vous me détestez, vous détestez vos parents !? Expliquez-moi !

-Non.

-Comment ?

-Non. Vous avez dit vouloir crever l'abcès. Vous avez parlé. Je vous ai écouté. Maintenant, je n'ai toujours rien à vous dire, et vous n'avez rien à ajouter. Je suis fatiguée par cette journée, je voudrais dormir, s'il vous plaît. »

      Elle souffla la bougie posée sur sa table de chevet, et son fiancé n'osa rien ajouter. Il se glissa dans le lit, à ses côtés. L'obscurité et le calme régnaient dans la pièce quand Anthony murmura « je pensais que nous pourrions être heureux ensemble »


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