26. La cicatrice

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Moscou



ASHA



La conversation que j'ai surprise, ou plutôt espionnée, m'a fait mal. Pourquoi cela me touche-t-il à ce point ? Je n'ai même pas pu en entendre la fin, je me suis simplement éclipsée comme une voleuse. Il n'y a ici que peu de personnes qui souhaiteraient vraiment ma présence, et comment leur en vouloir ? À leurs yeux, je reste la fille du meurtrier de leurs proches. Leur ressentiment est légitime, non ? Mais j'ai atteint un point où tout cela me semble lointain, presque irréel. Tout ce qui compte pour moi, c'est de retrouver ma famille.

À vrai dire, cette histoire n'a rien d'une simple tragédie, c'est un cauchemar éveillé. Je crois en mon père, fermement, et je sais qu'il n'aurait jamais commis une telle atrocité. Chaque détail de cette accusation me paraît insensé, sans fondement. Jamais ils ne parviendront à me convaincre que mon père ait fait une chose aussi horrible. Ce n'est certes pas un saint, mais j'ai confiance en lui.

Je suis arrivée à un stade où je n'arrive plus à trouver la paix.

Quand je croise mon reflet dans le miroir, mon regard est immédiatement attiré par ma cicatrice, ce trait imparfait qui me marque à jamais. C'est laid, sans détour. Cette cicatrice est tout ce que je vois, au point où elle semble me dévorer tout entière. L'envie de pleurer me serre la gorge, mais, paradoxalement, elle me rappelle Asuma. Lui aussi en porte une, par ma faute. Je m'efforce de sourire, murmurant que cette blessure nous unit, lui et moi. C'est étrange, mais même cette trace douloureuse semble nous lier d'une façon unique. Pourtant, je tremble à l'idée qu'il découvre un jour cette marque. Si Asuma savait que sa sœur jumelle porte une blessure... il ne se le pardonnerait jamais.

Soudain, mes pensées sont interrompues par un coup frappé à la porte.

— Asha, c'est moi, j'entre, me prévient Sierra.

— Oui, vas-y.

Elle entre dans ma chambre avec son air paisible. Cela me réconforte tellement de voir un visage amical, un visage heureux de me retrouver. Elle me prend la main et me guide doucement jusqu'au lit pour que je m'y assoie.

— Tu as l'air tendue, qu'est-ce qui se passe ? lui demandé-je.

Elle me fixe un instant sans rien dire, ce qui ne fait qu'augmenter mon anxiété.

— Tu sembles avoir oublié, dit-elle finalement en détournant le regard.

— Oublié quoi ?

Elle soupire, comme si elle cherchait les mots justes, puis décide d'aller droit au but.

— Je ne vais pas passer par quatre chemins, car je ne vois pas comment te l'annoncer autrement : le délai d'une semaine est écoulé, et ton mariage... c'est demain.

Demain ? Mon mariage ? Mon esprit vacille sous le choc. Comment ai-je pu oublier un événement aussi important ? Les tourments du moment ont effacé tout le reste.

— Sache que j'ai été la première à dire à mon frère que ce mariage était absurde, ajoute-t-elle en remarquant l'effroi dans mes yeux. Et pour ce que ça vaut, je ne te juge pas pour t'être glissée hier soir derrière la porte de mon frère pour l'écouter. Je pense que tu as compris qu'il ne te laissera pas partir. Quoi qu'il arrive, demain tu deviendras une Morozova.

Elle m'a prise en flagrant délit d'espionnage, quelle honte... Moi qui pensais être discrète ! Mais cela ne m'étonne pas vraiment, elle a toujours les yeux partout. Et elle a raison, je sais qu'Izek n'a ni l'intention ni le désir de me laisser partir. Il veut me garder près de lui, pour être certain d'obtenir un échange en cas de besoin, ou même de satisfaire sa vengeance. Une fois qu'il l'aura accomplie, il me jettera... ou pire.

Vendetta : L'Accord des EnnemisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant