Chapitre 9c

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Plusieurs personnes descendaient les marches du Bastion. Au bout du couloir, le chef des Hautes-Forges fit son apparition, flanqué de l'officier impérial et de deux villageois. Avec un sourire malsain, l'officier brandit une missive, une expression triomphante éclairant son visage.

— Écoutez-moi bien, annonça-t-il. Le dirigeable est prêt, et j'ai reçu des nouvelles du fort militaire voisin. Le colonel nous envoie quelques renforts. Quant à votre magnifique carcasse de métal, les pièces seront expédiées à Lanval dès demain matin. J'y ai des amis qui se feront un plaisir de les retoucher.

— Vous partez ce soir, décréta Gabriel.

Aïmar se leva brusquement et s'approcha de son contremaître.

— Je dois mal entendre, n'est-ce pas, Gabriel ?

Gabriel s'arrêta, le regard noir, déconcerté par l'audace d'Aïmar.

— Bien sûr que non, répliqua-t-il avec fermeté. Nous avons accepté l'accord de l'Imperium. Ils nous promettent une somme d'argent substantielle. Cela relancera l'activité des Hautes-Forges. Ce n'est pas notre problème, cette histoire, et nous n'avons pas à nous en mêler.

— Tu te moques de moi, là ? Merde, ils vont les massacrer !

— Aucune importance. De toute façon, ils auraient été tués, avec ou sans notre intervention dans la forêt.

Aïmar était sidéré. Hors de lui, il se planta devant son contremaître et, malgré leur différence de taille, leva le regard avec une détermination féroce.

— Ressaisis-toi, bon sang ! s'écria-t-il. Où est notre prétendue neutralité ? En acceptant cet accord pourri, tu prends parti, Gabriel ! Tu es du côté de ces salauds d'impériaux ! Et tout ça pour de l'argent ?!

Mais Gabriel ne se laissait pas intimider par des élans moralisateurs. Il demeurait impassible, bien qu'une lueur sombre et inexplicable ait soudainement traversé son regard.

— Je ne mettrai pas en péril la sécurité de mes hommes et la liberté de la Contrée Libre pour trois malheureux dont je ne sais rien.

Aïmar agrippa les vêtements de son contremaître, indifférent aux quelques têtes et aux quarante kilos supplémentaires que Gabriel avait sur lui. Il aurait voulu le frapper encore et encore, le ramener à la raison... Mais Gabriel ne faiblit pas. Il fit signe aux deux villageois à ses côtés, qui se précipitèrent pour attraper Aïmar avec force.

— Coffrez-le, ordonna-t-il sèchement. Sinon, il risque de faire des bêtises cette nuit.

Les villageois acquiescèrent et traînèrent Aïmar en maintenant ses bras derrière son dos. Le garçon hurla et se débattit comme un condamné à mort, mais les gaillards compensaient largement sa force.

— Ne fais pas ça ! cria Aïmar à travers le couloir de la prison. Je t'en prie, Gabriel, ne fais pas ça !

***

  — Ah, donc vous êtes de ce genre. Une brute prête à mettre ses hommes aux fers dès qu'ils osent le contredire, observa Joon avec mépris.

Gabriel se tourna vers lui, les yeux noirs de colère.

— Je ferai tout pour protéger mon pays. Tu devrais pourtant comprendre, n'est-ce pas ? Votre peuple a passé des siècles à se cacher pour survivre, à oublier ses allégeances.

Il s'abaissa, se penchant vers Joon avec un regard empli de haine. Ce dernier recula, inquiet que Gabriel n'ouvre la porte de sa cellule pour le finir lui-même.

— Je n'oublie pas ce que les tiens ont fait, cracha Gabriel. Quand les Swartsh étaient en danger, vous n'avez pas levé le petit doigt pour les aider, alors que vous leur devez tout. Tu ne l'as pas dit à Aïmar, ça, j'en suis sûr.

Joon déglutit avec difficulté, paralysé par les paroles cinglantes de cet homme massif qui le toisait de toute sa hauteur.

— Les nuages n'ont fait qu'enflammer votre stupide orgueil, et voilà le résultat aujourd'hui. Alors pourrissez dans vos geôles, ou périssez sous la torture. Ça m'est égal. Plus personne ne sera impliqué dans vos histoires. Et encore moins Aïmar.

L'officier haussait les sourcils, visiblement surpris. Il ne s'attendait certainement pas à ce que l'homme qui l'avait arrêté pendant son affrontement avec Joon finisse par s'allier à lui.

— Où est le dernier prisonnier ? demanda-t-il en se tournant vers Gabriel.

— Nous l'avons mis au deuxième sous-sol. Il est plus âgé que ces deux gamins. Je ne veux pas prendre le risque qu'il insuffle des idées dangereuses à ses camarades. Donc, isolé et sous surveillance renforcée, il ne risque pas de manigancer quoi que ce soit.

Ils s'évanouirent dans l'ombre du couloir. Bientôt, le silences'installa de nouveau dans le Bastion. Joon restait figé, cloué au sol. Sarespiration était hachée, chaque souffle laborieux marqué par l'effort decontenir la tempête qui grondait en lui. Il oscillait entre une colère sourdeet une vague de tristesse qui montait, menaçant de submerger ses yeux delarmes.

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Lumarave I [Fantasy]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant