Interlude

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Printemps 485, Troisième Ère

Quelque part dans Porthcawl,

Province d'Orinford, Royaume de Brinadean

Du bruit montait du rez-de-chaussée de l'auberge dans un fracas qui dérangeait la nuit paisible. Armand se réveilla en sursaut, le souffle court. Qui pouvait bien provoquer un tel tumulte en plein centre-ville, à cette heure avancée? Encore vêtu de sa chemise de nuit, il sortit du lit et jeta un coup d'œil prudent à travers les rideaux défraîchis de la fenêtre. Rien. Les rues, plongées dans une obscurité silencieuse, ne révélaient aucun signe de vie.

Il recula lentement, son rythme cardiaque s'accélérant un peu plus vite. S'approchant de la porte en bois massif de sa chambre, il y colla son oreille. Des voix. Des ordres secs résonnaient en contrebas. Le bruit des bottes frappant le sol, des pas précipités, une agitation qui ne laissait plus de place au doute. Les soldats du Conclave...

Son estomac se noua tandis que son cœur battait plus fort, un tambour de peur mêlé d'une adrénaline brûlante. Ils étaient là, à leur recherche, prêts à tout pour les capturer. Chaque seconde écoulée ne faisait que s'étirer dans un flot d'incertitude ; que faire, bon sang que faire ? Armand se figea, la gorge sèche.

C'est alors que la porte dérobée sur le mur opposé, invisible dans la pénombre, s'ouvrit sans un bruit. Une silhouette familière apparut dans l'encadrement : Haldrich. Le visage tendu, il posa un doigt sur ses lèvres, exigeant le silence immédiat.

— Il faut partir, murmura Haldrich, la voix à peine audible, mais pressée. Habillez-vous rapidement et suivez-moi.

Haldrich fouilla dans un sac et tendit à Armand des vêtements simples, loin du luxe auquel il était habitué. Mais le garçon n'en avait cure ; les jours d'élégance et de raffinement étaient derrière lui. Il obéit sans dire mot, se débarrassant de sa chemise de nuit d'un geste nerveux, puis enfila le vieux haut délavé que Haldrich lui avait donné. Le tissu râpé, troué par endroits, portait les marques du temps et des mites. Le pantalon, plein de reprises et de coutures grossières, lui tombait légèrement sur les hanches, et les chaussures de toile, trop larges, glissaient presque à chaque pas. Enfin, il enfila une longue veste à capuche noire, usée jusqu'à la trame.

Une fois vêtu, Armand se rapprocha de la fenêtre pour observer son reflet. Ce n'était plus un jeune noble qu'il voyait. Devant lui, un gamin au visage marqué par l'inquiétude, vêtu comme un fils d'ouvrier ordinaire, une silhouette banale et sans histoire. Exactement ce qu'il devait faire croire, à présent.

— Nous allons passer par l'extérieur, expliqua Haldrich en jetant un dernier coup d'œil autour de la chambre, rassemblant précipitamment leurs maigres affaires. Il faut quitter cette auberge avant qu'ils ne montent. Direction le port, et vite.

Son ton était ferme et Armand devinait l'urgence dans sa voix. Haldrich ouvrit la fenêtre de la salle de bain, puis y passa une corde usée.

— Vous vous souvenez de vos leçons d'escalade, non? ajouta-t-il en attachant solidement la corde. C'est le moment de les appliquer.

Vêtu lui aussi pauvrement, Haldrich se glissa sans un bruit par la fenêtre, s'agrippant à la corde avant de descendre agilement le long du mur pour atterrir dans la ruelle en contrebas, sombre et étroite. Armand, moins assuré, jeta un coup d'œil en bas. Il inspira profondément et s'élança à son tour. Ses mains tremblaient, et ses pieds glissaient par moments contre la pierre mouillée, mais il réussit à descendre sans trop de mal. Haldrich le réceptionna juste avant que ses pieds ne heurtent violemment les pavés humides.

Lumarave I [Fantasy]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant