chapitre 28

144 12 19
                                    

J'enroule mes mains de bandage, presque mécaniquement. Jay m'a amené à la salle de boxe qui, cette fois, est bondée de monde. Normalement, c'est toujours Aaron qui m'emmène, mais il ne m'adresse plus un mot depuis hier. Je ne comprends toujours pas pourquoi.

J'ai beau me repasser la scène mille fois dans ma tête, je ne trouve pas le moment où j'ai fauté.

J'ai donc pris la décision de venir m'entraîner, histoire de me changer les idées. D'autant plus que je suis assez fière de moi. Aujourd'hui, à midi, j'ai mangé non sans mal du thon, des oeufs durs et de la salade verte. Ce n'est pas grand chose et j'ai failli vomir à chaque bouchée. Mais c'est un début je crois...

Finalement, c'est encore plus compliqué que ce que je ne pensais. Impossible de me débarrasser de mon aversion pour la nourriture. Eva dit que c'est normal, qu'il me faudra du temps. Ayem et Miro sont du même avis.

J'attache mes cheveux en queue de cheval et secoue la tête en faisant rouler mes épaules. Aller, c'est parti.

Je sors des vestiaires tandis que le brouhaha de la salle me frappe en plein fouet. Je préférai de loin lorsque l'on était seuls avec Aaron, c'était drôlement plus calme !

Je me mets face à un sac de frappe, faisant craquer mes articulations. Je dépose mon téléphone au sol après avoir lancé une playlist dans mes écouteurs bluetooth. La musique résonne contre mes tympans, me donnant un bon coup d'adrénaline.

Je commence à frapper, doucement d'abord, puis de plus en plus fort. Mes mains me font souffrir mais peu importe. Je cherche simplement à extérioriser ce que je ressens à cet instant. Mes muscles me tirent. Je n'ai plus vraiment l'habitude.

Soudain, un grande main se pose sur mon épaule, exerçant une pression assez forte sur celle-ci pour m'arracher un gémissement de douleur. Qui est l'abruti qui ... ?

Je me retourne brusquement et fusille du regard la personne en face de moi. Soit un homme d'une bonne vingtaine d'années, les cheveux bruns, avec trois têtes de plus que moi et taillé comme un bulldozer.

- Quoi ? demandé-je de ma voix la plus séche et la plus mauvaise possible.

L'homme affiche un air hautain qui ne me plaît guère. S'il pouvait s'abstenir d'avoir une tête de con par la même occasion...

Il me regarde de haut en bas, puis me pousse sur le côté.

- Tu peux aller jouer ailleurs, le squelette ? dit-il d'une voix moqueuse. Laisse les grands s'entraîner et va donc soigner ton anorexie, c'est moche, et ça me dégoûte.

Bon. La suite des évènements n'est presque pas de ma faute. Je lui envoie mon point en plein dans le nez, et j'entends son cartilage se briser sous mes doigts. Le gars hurle alors comme un enfant en proie à un cauchemar. Il se tient le nez, qui saigne comme jamais, et essaye de m'assener un coup à son tour.

Coup que j'esquive. Je brandis mon point douloureux à nouveau et l'écrase contre la mâchoire du type, qui crie de plus belle. Même moi, j'en suis étonnée. Comment moi, après des semaines à ne pas manger, puis-je tenir tête à cet... Énergumène ?

Mais j'aurais dû me douter que l'adrénaline finirait par s'estomper. Mon corps tangue brusquement sous mes efforts et me retiens au sac de frappe derrière moi.

Au bout de quelques secondes, le malaise se dissipe et j'en profite pour attraper mon téléphone et mes écouteurs tombés au sol avant de déguerpir direction les vestiaires.

Cependant, une main s'enroule autour de mon bras, le retenant douloureusement prisonnier. Je suis contrainte à m'arrêter.

Le type qui me retient se trouve être effrayant. Son crâne est rasé, sa musculature est presque aussi intimidante que ses nombreux tatouages qui recouvre la quasi-totalité de son corps.

Il doit bien faire un bon mètre quatre-vingt quinze, ce qui n'a rien de rassurant, tandis que son regard bleu glace me transpercent d'un air presque démoniaque.

Je l'avoue, il me terrifie. Mes jambes se mettent à trembler.

- Tu serais pas la fille Rivera ? demanda-t-il d'une voix rauque, presque inhumaine.

Je fronce les sourcils et hoche positivement la tête, la gorge trop nouée pour parler. Son regard s'assombrit un peu plus, si même c'est possible, tandis que sa poigne sur mon bras se resserre.

- Lâchez moi, vous me faites mal ! hurlé-je en essayant de me dégager.

Plusieurs personnes se retournent vers nous, ce qui oblige l'homme à me lâcher. Si Satan avait un visage, ça serait sûrement le sien...

À peine m'eût-il lâché que je pars en courant dans les vestiaires. Les mains tremblantes, je cherche dans la liste de mes contacts le nom d'une personne qui serait susceptible de m'aider. Jay.

Ça sonne. Une fois. Deux fois. Trois fois. Quatre fois.

- Angelina ? résonne une voix qui est tout sauf celle de mon frère.

Aaron.

- Où est Jay ?! hurlé-je, plus paniquée que jamais.

- Il est parti faire un jogging en oubliant son portable, dit-il. Mon ange, que se passe-t-il, tu es en danger !?

Il semble presque aussi paniqué que moi.

- Aucune idée, murmuré-je. Mais ce qui est sûr, c'est que j'ai besoin que quelqu'un vienne me chercher tout de suite. Je... J'ai peur...

J'entends une porte claquer dans le combiné.

- J'arrive mon ange,  ne bouge pas surtout, dit Aaron. Reste en appel avec moi, ne raccroche pas surtout !

J'acquiesce en passant un main sur mon visage, le cœur battant à tout rompre.

Soudain, la porte des vestiaires s'ouvre brusquement, me faisant sursauter. Le type à la tête de Satan apparaît dans l'encadrement, me faisant frissonner.

Je ne bouge plus du tout. Je reste immobile comme une statue. Doucement, il referme la porte derrière lui, puis tourne la clé dans la serrure. Je suis prisonnière. Mon cœur menace de lâcher et ma tête tourne plus que jamais. Je tremble de la tête au pied, terrifiée.

- Angelina Maria Rivera, murmure Satan de sa voix grave. Si tu savais depuis le temps que l'on te cherche...

Je lâche soudainement mon téléphone qui s'écrase au sol dans un grand bruit. Je recule de quelques pas avant de demander :

- Qui êtes vous ?

Il ricane.

- Tu n'as pas besoin de le savoir, dit-il.

Mes mains tremblent tandis que je cherche une issue. Mais c'est peine perdue. Je ferme les yeux.

Cette fois je ne suis pas sûre d'en sortir vivante...

Angelina Où les histoires vivent. Découvrez maintenant