Assise sur la chaise haute près du bar, la jambe tremblante, j'attends depuis quinze minutes l'arrivée d'Aaron. Je ne sais pas pourquoi c'est lui qui a répondu au téléphone de mon frère mais j'ai l'impression qu'il s'est passé quelque chose. Et pour cause, c'est le meilleur ami flippant de Jayden qui débarque d'un coup dans le bar en faisant claquer la porte d'entrée, me provoquant par la même occasion un léger sursaut.
Son visage est tordu en une expression de colère mêlée à l'inquiétude. Maintenant j'en suis persuadée, il s'est passé un truc grave. Je bondis immédiatement de ma chaise tandis que son regard se pose sur moi et me traverse d'éclair. Je crois ne l'avoir jamais vu aussi en colère et ce n'est pas peu dire.
La boule présente dans ma gorge ne cesse de grandir tandis qu'il s'approche de moi d'un pas vif. J'aperçois du coin de l'œil le barman ouvrir de grands yeux et se ratatiner sur lui-même, presque effrayé. Aaron aurait-il mauvaise réputation ou fait-il juste peur naturellement ?
Je me ratatine sur moi-même alors que sont regard se fait... Inquiet ? Ok, alors là, j'ai peur...
- Putain, marmonne-t-il en arrivant à ma hauteur, t'es malade ou quoi ? Tu pars sans prévenir personne alors que ton frère a plus besoin de toi que jamais !
J'ouvre grand les yeux. Comment ça, mon frère a besoin de moi ?
- Qu'est ce qui s'est passé ? demandai-je en sentant l'angoisse affluer dans mes veines, faisant pulser mon cœur plus vite que la normale.
Il passe une main dans ses cheveux puis attrape mon bras avant de me tirer vers la sortie. Je peine à suivre le pas tandis qu'il commence à m'expliquer.
- Ayem a été pris par inadvertance dans un règlement de compte et elle a pris une balle, dit-il d'un ton angoissé qu'il ne lui ressemble pas. Elle est hors de danger mais Eden enchaîne crise d'angoisse sur crise d'angoisse tant il flippe de perdre sa sœur et ton frère s'est enfermé dans sa chambre après avoir hurler sur tout le monde. Parce que non seulement sa meilleure amie était en danger de mort, mais en plus, sa petite sœur avait disparu !
Mes mains tremblent légèrement face au récit d'Aaron. Mon dieu... J'espère qu'Ayem va bien... Et Eden a dû avoir tellement peur... Il a l'air de beaucoup tenir à sa sœur. Logique, vous allez me dire.
Quant à mon frère... Je l'ai déçu une fois de plus. Je suis ridicule... Bien sûr que je savais que sortir pour me retrouver dans un bar peu recommandable allait le mettre dans tous ses états. Mais encore une fois, j'en ai fais qu'à ma tête... Quelle plaie je suis !
Ma gorge se serre tandis qu'Aaron me jette pratiquement dans sa voiture, l'air furieux. Il ferme la portière derrière moi et contourne la voiture pour monter côté passager. Mais au lieu de démarrer, il reste là, assis, planté sur son siège, à regarder le paysage.
- Heu... Aaron, ça va ? demandai-je.
Il ne répond pas immédiatement mais se tourne un peu vers moi.
- Je sais ce que tu penses de moi, mini Rivera... dit-il. Que je suis un connard impulsif...
- Un truc dans le genre, marmonnai-je.
Il me foudroie du regard comme par réflexe puis prends sur lui et ses yeux s'adoucissent.
- Je ne suis pas un monstre Angelina, continue-t-il en ignorant ma pique. On ne né pas mauvais, on le devient. Nous sommes tous le fruit de notre passé. Ayem, Eden, Miro, Jayden, Eva et Thiago, c'est ma famille. On a tous un passif. On gère notre vie à notre manière. La mienne n'est sûrement pas la bonne...
- Ça c'est sûr... murmurai-je.
Il souffle d'un air dépité.
- Tu vois, gamine, je ne suis pas trop fan des excuses, donc si tu pouvais la fermer, je pourrais continuer sans trop saigner de la gorge ! déclare-t-il.
Quelques secondes passent. Sale bipolaire.
- Écoute, reprend-t-il, maintenant, que tu le veuilles ou non, tu fais partie de la famille. Et dans la famille, on s'entraide toujours, quelques soient les merdes qu'il nous arrivent.
Je fronce les sourcils. Impossible de cerner ce type, il est incompréhensible !
- Donc je vais faire de mon mieux pour te sortir de tes troubles alimentaires, dit-il dans un murmure. Mais j'ai l'impression qu'il n'y a pas que ça... Je me trompe ?
Malheureusement non, tu ne te trompes pas... Y'a aussi l'automutilation, mes cauchemars, la phobie du sang mais bizarrement, l'addiction de voir le mien couler, et l'envie irrémédiable de me tuer chaque fois un peu plus en sautant des repas. Ma culpabilité me coupe l'appétit de toutes façons... Mais je ne peux pas dire ça. Je parie qu'il me ferait interner, ce connard impulsif...
- Je vais bien Aaron, j'ai juste un appétit de moineau...
- Bien sur, fou toi de ma gueule, rit-il sombrement. Si tu veux mon avis, la dernière fois que je t'ai surpris sans faire exprès dans la salle de bain, j'ai vu ton ventre. Et les cicatrices étaient bien trop nombreuses et bien trop fraîches pour que ce soit... L'accident de voiture...
Je ne répond rien, sentant l'angoisse monter en moi. Je retiens les larmes qui semblent vouloir couler sur mes joues et me mords les lèvres.
- Tu te trompes, murmurai-je d'une voix tremblante. Tu te trompes, je vais bien. Ça va, je vais bien...
Je vais mal. Je vais pas bien du tout, j'ai besoin d'aide...
- Je n'y crois pas du tout, répondit-il. Dis moi la vérité, ça commence à m'agacer ton déni.
Je vais mal. J'ai mal. À l'aide. Je ne noie. Je ne m'en sortirai pas seule.
- Je vais bien, j'ai juste un peu de mal à faire mon deuil, mais je vais guérir, comme tout le monde !
Je souffre, je pense à me détruire un peu plus chaque jour. J'ai peur. Je ne tiendrai pas longtemps. Je meurs de faim... Au sens propre.
- Je sais que c'est dur, gamine, mais il faut que tu arrêtes de mentir sur ton état d'esprit. Au cas où tu ne l'aurais pas remarqué, tu es vraiment nulle pour cacher tes émotions.
Une larme roule sur ma joue. Arrête de pleurer putain...
- Je veux juste... Je sais pas... marmonnai-je.
La seule chose que j'aimerais dire pourtant c'est... À l'aide.
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Angelina
RomanceAngelina a tout d'un ange, comme son nom l'indique. Aussi bien physiquement que mentalement. Une beauté sublime, une douceur exquise, un coeur en or et une vraie rêveuse. Adoratrice de romans, elle tente de fuir sa réalité dans la magie parfaite des...