Chapitre 22

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SAFIA

Le soleil commençait à percer l'horizon alors que je marchais d'un pas rapide et furieux dans les rues. Le visage d'Emilio, sa trahison, ses mensonges... tout cela tournait en boucle dans ma tête. Comment avait-il pu me faire ça, encore une fois ? Comment avait-il pu me cacher la présence de Loana, cette femme qui ne faisait que s'immiscer dans nos vies ?

Mes mains tremblaient alors que je sortais mes clés pour ouvrir la porte de notre maison. La rage me consumait, me rongeait de l'intérieur. J'étais prête à tout abandonner. Cette histoire avec Loana avait été la goutte d'eau, et maintenant, je ne pouvais plus faire comme si tout allait bien.

Dès que la porte s'ouvrit, un silence pesant m'accueillit. Mais alors que je me dirigeais vers l'escalier, j'entendis des petits pas précipités. Victoire, notre petite fille, descendait les marches en courant, un grand sourire aux lèvres. Dans sa petite robe blanche, celle qu'elle devait porter pour le mariage, elle ressemblait à une petite princesse.

« Maman ! » cria-t-elle en se précipitant vers moi, sa robe volant autour d'elle. « Regarde ! C'est ma robe pour le mariage ! Tu la trouves belle ? Je suis belle, hein ? »

Son enthousiasme était contagieux, et pour un bref instant, je ressentis une vague de douceur, un soulagement face à son innocence. Mais ce moment fut de courte durée, et la dure réalité me rattrapa. Je devais lui dire, d'une manière qu'elle pourrait comprendre.

Je m'agenouillai devant elle, lui caressant doucement les cheveux.

« Ma chérie, tu es magnifique, » murmurai-je avec tendresse. « Mais... tu sais, il y a eu un petit changement. Le mariage est... décalé. Ce n'est pas pour aujourd'hui. »

Ses yeux s'écarquillèrent, la tristesse éclipsant soudain son sourire. « Mais... pourquoi ? C'est quand, alors ? » demanda-t-elle, la voix tremblante.

Je me forçai à sourire, même si mon cœur se brisait. « C'est juste que... papa et maman doivent régler certaines choses avant. Mais ne t'inquiète pas, tu seras toujours aussi belle le jour du mariage. Promis. »

Elle hocha la tête, visiblement déçue, mais elle ne dit rien de plus. Elle s'éloigna lentement, le regard baissé, traînant un peu les pieds sur le sol. La culpabilité me rongeait, mais je savais que c'était la meilleure chose à faire. Je ne pouvais pas me marier dans cet état, avec toutes ces incertitudes.

Je venais tout juste de refermer ma valise, le cœur lourd, lorsqu'une voix que je n'avais pas du tout envie d'entendre s'éleva depuis l'encadrement de la porte.

« Tu fais une erreur, Safia. »

Loana. Mon sang ne fit qu'un tour. Elle était là, debout dans l'ombre, son regard fixé sur moi. C'était la dernière personne que je souhaitais voir en ce moment, après tout ce qui s'était passé. Je sentais la colère monter en moi, bouillonnante.

« Tu devrais partir, Loana. Ce n'est pas le moment, et surtout, ce n'est pas ta place ici, » dis-je d'une voix glaciale, mes mains tremblant légèrement.

Elle avança d'un pas, le visage dépourvu de son habituelle arrogance. Cette fois, il y avait quelque chose de différent chez elle, une forme de nervosité que je ne lui avais jamais vue auparavant. Cela piqua ma curiosité, mais je restais sur la défensive.

« Je sais que tu me détestes, et je comprends pourquoi, » commença-t-elle, croisant les bras. « Mais tu dois savoir que ce que tu penses d'Emilio est faux. »

Je haussai un sourcil, écartant une mèche de cheveux de mon visage, prête à lui dire de sortir de chez moi. Mais elle continua, la voix étrangement douce.

« Il t'aime profondément, Safia. Il n'a jamais cessé de t'aimer. »

Ses mots me frappèrent comme un coup en plein cœur. Ce n'était pas du tout ce à quoi je m'attendais de sa part. Loana, cette femme qui avait toujours représenté une menace dans mon esprit, m'avouait maintenant qu'Emilio n'avait d'yeux que pour moi. Cela n'avait aucun sens.

« Pourquoi tu me dis ça maintenant ? » demandai-je avec méfiance, cherchant à percer ses intentions. « Après tout ce que tu as fait, pourquoi venir me parler de l'amour qu'il me porte ? »

Elle soupira, visiblement mal à l'aise. « Parce que je n'en peux plus. Je ne peux plus prétendre, ni espérer qu'il me regardera comme il te regarde, toi. Je l'ai vu, Safia. Je l'ai vu dans ses yeux à chaque fois qu'il parle de toi, à chaque fois qu'il te regarde. Il t'aime. D'une manière que je n'ai jamais pu espérer obtenir de lui. »

Je restai silencieuse, choquée par ce retournement de situation. Mes mains se crispèrent sur la poignée de ma valise. Loana, celle que j'avais vue comme une rivale, était là, me disant des vérités que je n'étais pas prête à entendre.

« Il ne m'a jamais aimée, Safia, » continua-t-elle, sa voix plus douce, presque résignée. « J'étais juste... une distraction. Je pense que je le savais depuis le début, mais j'ai essayé de me convaincre du contraire. Mais tout est différent quand il s'agit de toi. Tu es celle qu'il veut. »

Ces mots résonnaient dans ma tête. Comment pouvais-je encore douter de l'amour d'Emilio après cela ? Mais en même temps, quelque chose en moi se rebellait, refusant d'accepter cette version des faits si facilement.

« Alors pourquoi ne m'en a-t-il jamais parlé ? Pourquoi m'a-t-il caché que tu venais chez nous ? » Mon ton était empli de douleur. « Comment suis-je censée lui faire confiance après toutes ces cachotteries ? »

Loana pinça les lèvres, visiblement gênée. « Je crois qu'il avait peur de te perdre. Qu'il pensait que si tu apprenais que j'étais venue, même si ce n'était rien pour lui, tu le quitterais. Il a mal géré la situation, Safia. Mais cela n'a rien à voir avec son amour pour toi. »

Je sentis mes jambes fléchir sous le poids de ses mots. Un tourbillon d'émotions contradictoires m'envahit. L'amour, la colère, la trahison, et maintenant, cette étrange sensation de vérité crue. Je ne savais plus où me situer dans tout ça.

Je relevai les yeux vers elle, sentant la dernière barrière de résistance en moi céder. « Pourquoi ? Pourquoi venir ici me dire tout ça ? »

Loana hésita, son regard vacillant. « Parce que je me suis fait des illusions. J'ai cru que j'avais une chance avec lui, mais il ne pense qu'à toi. Et j'en ai assez de mentir, à toi, à lui, à moi-même. Je ne peux plus continuer ainsi. »

Il y eut un long silence. Pendant un instant, je vis l'humanité derrière le masque de Loana. Elle n'était pas cette rivale invincible que j'avais imaginée, mais une femme tout aussi perdue que moi dans ses sentiments. Je la regardai se tourner pour partir.

« Loana... » Je l'appelai doucement avant qu'elle ne franchisse la porte. Elle se retourna, les yeux légèrement brillants. « Ce n'est pas une question de préférences ou d'amour. C'est une question de confiance. Qu'il m'ait aimée ou pas, il m'a caché des choses, et je ne sais pas si je peux pardonner ça. »

Elle acquiesça lentement. « Je comprends, » murmura-t-elle avant de quitter la pièce, me laissant seule avec mes pensées tourmentées.

Je m'assis lourdement sur le lit, mes yeux fixant la valise à moitié remplie. Le silence qui suivit son départ fut assourdissant. Cette conversation n'avait fait que raviver mes doutes. Certes, Emilio m'aimait, mais cela n'effaçait pas les mensonges, ni la peur qui grandissait en moi. Cette peur que même l'amour ne suffirait pas à surmonter ce qu'il avait brisé.

Je soupirai profondément, passant une main dans mes cheveux, me demandant si je pouvais encore croire à cette histoire d'amour que nous avions bâtie ensemble.

Il fallait maintenant que je prenne les enfants et que je retourne a ma vie seule. Pourrai-je lui pardonner un jour ?

FioreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant