Deus Treize...

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La condition humaine...

Je suis un jeune homme, triste, et, avec des ailes,
Qui sont, bien malgré moi, accrochées à mon dos,
Ces vieilles reliques du corps des éternels,
M'accablant, d'un poids, dont je ne peux dire mot...

Sauf, qu'il me donne, cet air baroque et voyou,
Si poignant, que la lune, sous son manteau gris,
S'est émue, de ce Quasimodo, homme-loup,
Fuyant, le peuple aveugle, et, son violent mépris...

Mes épaules, chaque jour, souffrent ce fardeau,
Plient, mais, ne rompent pas, et, moi, étrange absent,
Souvent, j'imagine que je suis un Héraut,
Le poète-prophète d'un absurde temps...

Oui, j'y pense, parfois, tendu et silencieux, Écrasé, sous les cieux mortifiants de ma vie,
Contemplant, depuis mon clocher moyen-âgeux,
Ces milliards de fourmis communiant dans leur nuit...

Sur les croisées d'ogives de ma cathédrale,
Déjà, leur ombre, emporte, celle immortelle,
Du boiteux, qui a forgé, le mythe-métal,
Dans ce feu à tropes, dont je suis sentinelle...

Ainsi, fut submergé, l'artisan de l'Etna,
Qui, pour tout Orphée, était bouclier d'Achille,
Depuis lors, l'abasie, est le chemin de croix,
De ces sonneurs de cloches, bossus en péril...

Et, désormais, sans le fils de Poséïdon,
Qui, s'est effondré, comme un Colosse de Rhodes,
Dans un fracas, d'apocalypse, et, d'oraison,
Je n'ai plus, l'ombre, me cachant des fils d'hérode...

Ma laideur, morne étincelle, est, là, en veille,
Découvrant, enfin, ma si sinistre gargouille,
Dont le regard, est, le seul, faisceau noir-vermeil,
A percer, le secret, de l'ombre sans dépouille...

Ainsi, tout ce qui défile devant le feu,
Se réverbère, sur les parois, où, hiberne,
Le peuple de fourmis, qui, psychotique et pieux,
Assiste au théâtre d'ombres dont il s'aliène...

Seul, là-haut, le poète, en son ciel adiaire,
Sait, qu'il peut, être, en se libérant de ses chaînes,
Ce Demi-dieu, domptant le feu et ses chimères,
Jusqu'à ce que ses ailes poussent et l'emmènent...

Mais, chose inouïe, quand je me suis approché,
Le feu originel, a fait glisser, de moi,
Mon ombre, devenue, cette libre entité,
Où, j'ai senti, mon Alter-égo, aux abois...

Lui, l'Autre, qui, s'initiait, à ce feu du ciel,
Par quoi, digne Promethée, je souffle la vie,
Sur le mur d'illusions, pour offrir aux mortels,
Quelques visions, pour les guider, hors d'ici...

Ô frères, fuyez vers le printemps de lumière,
Sortez des enfers, antre du mauvais génie,
Fuyez, car je suis, l'Arès, d'un Zeus en colère,
Et, je sens venir, la foudre, et, la prophétie...

Je me vois, enchaîné, ô antique Caucase,
Sur tes flancs, ô montagne, où va saigner ce coeur,
Qu'Héphaïstos, armé du courroux qui m'écrase,
Livre, avec mon foie, au vieil aigle exécuteur...

Je suis l'éffronté d'un ordre de légende,
Ce géniteur des civilisations humaines,
Tiré d'un limon, où mon sang n'est qu'une offrande,
Une plume d'ange aux vertus liliputiennes...

Mais qui est l'Héracles qui me délivrera ?
Moi, qui, sur la paroi, est prisonnier des fers,
Où, l'ombre-rapace, dévore, cru, mon moi,
Qui, lui, vous crie : ô frères, voyez ma misère...

Mes ailes sont celles d'un aigle infortuné,
Se mutilant, depuis son maudit roc à pic,
En regardant le grand désert à traverser,
Soudain, tel un vain Hermès, lucide et tragique...

Je ne suis pas le berger de ce requiem,
Juste un Protée terrien, oracle au feu informe,
Assis, au bord du monde, écrivant des poèmes,
À ses frères, que des Dieux mystérieux, endorment...

Je n'offre, rien, que les entrailles de mes nuits,
Que ce foie, que ce coeur, consumés par moi-même,
Et, mon âme, elle, n'est qu'un deuil infini,
Observant, le déni, où les hommes s'enferment...

Déchu, je ne m'envole qu'à la nuit tombée,
Pour m'infliger les souffrances qui vont m'affranchir,
Et, ainsi, m'enlaidir pour que mes doigts brisés,
Puisse purger les bienfaits de ce sang de martyr...

Ô Dieux, ô Muse, ô Miroir de malédiction :
Suis-je un beau cadavre, en prière, sans autel,
Pendant que les hommes, broyés par les saisons,
Marchent vers le royaume d'Hades des mortels ?

Ange embaumé, j'hurle, défunt funereus :
Ai-je commis un crime ? Vas-tu porter le crêpe ?
Dis-moi, ô ma Lune, entends-tu l'homme ferus,
Abandonné de tous, errer, seul, dans la steppe ?

Corps nu, s'enfonçant, seul, dans ton antre de soie,
À la merci du sort, dont les erreurs d'hier,
Aujourd'hui, encore, font resurgir en moi,
L'Oedipe aux yeux crevés, le captif de l'hiver...

Oui, j'ai haï, ce Dieu, qu'on nomme Notre Père
Oui, après le dit-crime, j'ai souillé ton lit,
Ô Amour, ô Passion, ô toi qui est la Mère,
De terribles beaux vers enfants de tragédie...

Ô frères, vous pouvez bien, dehors, m'insulter
Le regard, plein de haine, et, de crachats de boue,
Des profondeurs émues, vos voix de prisonniers,
Me parlent, confessant, l'échec, et, l'espoir fou...

Vous avez traversé le grand désert du Sinaï,
Enjambé Gibraltar, conquis le coeur d'Afrique,
Les trois milles kilomètres de la Muraille,
Et, poursuivi, fiévreux, jusqu'au lointain Klondike...

Quel Dieu avez-vous trouvé ? A-t-il répondu ?
Jésus, Mahomet, Yahvé, Bouddha, et, Brahmā... :
À lequel, votre âme, s'est-elle dévolue,
Quand, vous vîtes, la vie, et, son sinistre éclat ?

Cette abîme, où, créatures abandonnées,
Les Hommes -ces derniers animaux domestiques-,
Se sont inventés, maîtres, et, identités,
Pour légitimer l'ignorance maléfique...

Le néant de soi, est, le plus impie, des cultes,
Dès lors, l'ange mis au ban du foetus primaire,
N'a vu, en cette caverne, qu'un feu occulte,
D'où naissent, les fléaux, ces Sphinx de la matière...

Le pire, ici, est que, l'égo, est Dieu et Foi,
Aussi, le monde est-il plein de ces fous,
Qui n'écoutent plus, assassinant, de plein droit,
Ceux, qui, n'ont, pour ce stérile esprit, que dégoût...

Aucun ne se souvient du langage profond,
Ni de leur délivrance, par le Prométhée,
Qui, n'est plus, qu'une légende, qu'une illusion,
Dont le sens, s'est perdu, dans cette inanité...

Orphelin, cherchant l'Amour comme unique frère,
Le poète, est l'Atlas de ce Monde désolé,
Où, ces hommes-fourmis, sont, d'odieux, va-t-en guerre,
Piétinant les cendres de l'immortalité...

En cette terre dévastée, et, sans vertu,
Il n'y a plus, pour le poète, que l'errance,
Car, depuis, qu'ange canonique, il n'est plus,
Il lui faut trouver, en l'homme, la piété...

(C)Ténébrio, le 03 décembre 1996, à 23H25...

Inner seasons...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant