Il n'est pas si mal que ça ton immeuble

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Pourquoi les humains n'ont-ils pas de minuscules essuis-glaces pour leurs yeux?

Dans la catégorie des questions bizarres que Charles peux se poser, celle-ci est en tête de liste. Les gouttes d'eaux intempestives brouillent sa vue et le trempe de la tête au pied...

Ça doit être le déluge... suppute le jeune homme tout en continuant de courir.

D'un coup, une odeur de cannelle emplie ses narines, cette senteur sucrée lui rappelle quelque chose et l'endroit devient soudainement familier à ses yeux, pourtant il n'a absolument aucune idée d'où il se trouve.

Il accélère une nouvelle fois essayant du mieux qu'il peut de ne pas perdre le contact visuel avec l'homme qu'il poursuit.

Jusqu'à ce que brutalement, Éric s'arrête devant un immeuble, et qu'il compose rapidement le code d'entrée. Il claque la porte au nez du brun, qui bouillonne intérieurement malgré la température ambiante, et monte les escaliers d'un pas pressé.

En soupirant de dépit, Charles se cale dans une petit coins sous préau espérant se protéger un peu mieux. Alors que l'orage se met à gronder, une idée qu'il aurait aimé avoir plus tôt lui vient à l'esprit et il se jette littéralement sur l'interphone, cherchant dans un élan d'espoir le nom d'Éric affiché quelque part.

Nom après nom, aucun Éric en vue. Peut-être aussi car il n'y a, sur la liste, que les noms de famille des habitants. Sans plus penser à son manque de sens de l'observation, le jeune homme trouve rapidement le nom de son... fugitif.

Il tape comme un fou sur le bouton au risque de le casser sans que pour autant quelqu'un ne réponde.

Soudainement. Et contre toute attente, un léger grésillement typique de ces machines là résonne alors qu'une voix parle. Sans grand enthousiasme il doit bien l'admettre...

" Qu'est ce que tu veux?

- Monter, enfin pour le moment juste me sécher, explique innocemment Charles.

- Rentre chez toi, soupire le bond à l'autre bout du fil.

- Je ne sais même pas où je suis, idiot...

- Demande à un passant et va dormir, je suis occupé... "

Charles explose littéralement de rire, partagé entre l'hilarité que lui provoque l'excuse minable du barman et l'énervement de se voir refuser l'accès à sa demeure.

" Aller! S'il te plait mec! Il pleut, il fait froid et je sais pas où je suis ni où aller! supplie Charles véritablement frigorifié."

Depuis son appartement, Éric se résoud, tout de même pas sadique au point de laisser le jeune homme attraper un truc grave.

" Monte."

Et le verrou s'enclenche dans un petit bruit métallique, laissant enfin Charles se réchauffer dans le hall tempéré. Une odeur de violette embaume et rend vivant l'immeuble endormi, en tout cas plus vivant que le siens. Les mûrs sont recouverts de petites fissures et de dessins abstraits, mais la plus grande partie est d'un vert délavé égal à la couleur du regard du brun.

Il se rend vite compte que l'appartement exacte lui est inconnu, il commence donc à faire le tour du rez-de-chaussé, maudissant le peut d'indications quand à la demeure qu'il cherche. L'absence de noms sur les portes n'aide pas spécialement non plus.

Après une bonne dizaine de minutes à toquer un peu partout, arrivé au deuxième étage une porte s'ouvre enfin sur l'appartement d'Éric qui le fait entrer.

C'est un petit deux pièces pas vraiment plus petit que celui du brun, aux murs parsemés d'un sublime papier peint bleu recouvert d'une demi douzaine de tableaux en tout genre, de l'impressionnisme le plus souvent. Une table centrale du même bleu que celui des murs, entourés de chaises métalliques blanches. Aucun canapé en vue, mais un énorme fauteuil d'inspiration grunge trône avec majesté dans un coin près d'une petite table basse de même style que la principale.

" C'est sympa ici! lance Charles les yeux grands ouverts observant les alentours.

- Je dois avouer que c'est pas mal, répond calmement le blond regardant, amusé, l'air incrédule de son invité devant son bordel organisé. Et bien rangé n'est ce pas?"

Charles ne répond pas, obnubilé par la grande collection de croquis d'Éric, accrochés au mur avec les tableaux àv la craie grasse. L'excellente qualité du dessin laisse deviner son prix.

" Tu as sincèrement du te ruiner pour tout ces gribouillages... Combien? Une bonne centaine d'euros?"

Éric lui lance un regard amusé, sans avoir bougé d'un yota depuis tout à l'heure.

" 12 euros, déclame-il une certaine fierté dans la voix. Pour le tableau Ikea en haut à droite."

Le brun regarde son interlocuteur avec suspicion, s'attendant à le voir exploser de rire d'une seconde à l'autre. Cependant, l'air sérieux d'Éric le contraint à le croire.

" Tu dessines? s'exclame l'observateur légèrement secoué, ce n'est peut-être rien mais en tout cas c'est bizarre aux premiers abords.

- Et ouais! répond le jeune homme avec sincérité. Mais je pense pas que tu sois venu pour parler peinture."

L'ambiance redeviens soudainement froide. Et chacun protagonistes se fixe tour à tour avant de jeter un coup d'oeil de droite à gauche ou de s'avachir sur le fauteuil comme Éric à cet instant.

" Pourquoi pas? demande paisiblement l'invité en prenant place sur une chaise en métal. Qui, malgré leurs évidente utilisation décorative sont extrêmement désagréables.

- Parce que je crois être amoureux de toi. soupire Éric en mettant les bras derrière sa nuque et en relevant la tête au plafond."

Foule SentimentaleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant