trois ✵ famille

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- Aris ? Lança soudainement Duke alors que je finissais ma grenadine.

Je grognai et me retournai vers mon frère qui se préparait un café. Je n'aimais pas quand Duke m'appelait ainsi, avec cette vieille voix sournoise et remplie de sous-entendus.

- Quoi ? Lâchai-je avec impatience.

- J'ai remarqué qu'une fille de ta classe était très jolie et je suppose que ça serait intéressant pour elle de sortir avec un mec en prépa. Allez, s'il te plaît... Tu pourrais lui parler de moi ? Demanda-t-il en essayant d'animer un peu de compassion en moi.

Je me moquai de lui juste après, le trouvant vraiment con et inintéressant.

- Mec, il n'y a pas écrit « Conseiller Meetic » sur mon front. Allez casse-toi. Répliquai-je toujours avec ce sourire moqueur sur les lèvres.

Ma mère rentra dans la cuisine pile à ce moment. Prête comme d'habitude à nous raconter une anecdote de sa journée.

- Les gars du boulot se plaignent sans cesse parce que je ne veux pas leur faire d'augmentations. Ils me saoulent. Râla-t-elle en soupirant avant de poser les sacs de courses sur le comptoir.

Duke s'était empressé de l'aider à ranger et j'étais sorti prestement de la cuisine. Ce mec était vraiment un trop bon fils. C'était clair que ça ne servait à rien d'essayer de rivaliser.

Il était dans une prépa réputée, ses bonnes notes explosaient au lycée et même celles de prépas étaient les meilleures. Il était serviable, facile à vivre, ouvert d'esprit, incroyable orateur et écoutait les conseils de ses parents. "Ferme-la". Voilà ce que j'avais toujours eu envie de crier pendant les dîners de familles où on vantait sans cesse ses notes. Mais au fond, je n'en avais pas le courage.

Aris, c'est-à-dire moi, était le gars faible, l'enfant raté. Je montai les escaliers les yeux perdus dans le vide.

Mon père me rentra dedans dans le couloir du premier étage. Il poussa une injure discrète avant de s'excuser sans me lancer de regard. Grossier, oui, il l'était.

Ma chambre semblait calme ce soir-là, tout aurait pu être différent. Une fille jolie à qui avouer ses sentiments, même rencontrer la femme de sa vie qu'on verrait à un croisement de rue.

Non, moi j'avais préféré rester dans mon lit,  regarder le plafond, fumer une clope la fenêtre ouverte, avec le son des voitures sur le chemin et les longues minutes qui filaient.


Trente minutesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant