Entre la vie et la mort

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William Becker plissa les yeux à deux reprises avant d'écraser de toutes ses forces la pédale de freins. Il était tellement absorbé par la visite qu'il venait de rendre à sa mère qu'il s'était engagé sans réfléchir.

Sa pauvre mère, par ce grand froid elle s'ennuyait à mourir dans son grand appartement sur Ridgmount Street, ce n'était pas de toute gaieté de cœur qu'elle restait cloitrée dans son superbe cinq pièces. William lui avait apporté quelques livres et un peu de réconfort avant de prendre congé. Il avait sauté dans sa voiture sans se douter de ce qui l'attendait.

La circulation était plutôt bonne, aucun agent ne vint lui barrer la route et le forcer à emprunter un autre chemin. Il était encore inquiet en arrivant au niveau du carrefour, la voix de sa mère lui brouillait la vue. La réalité reprit sa place quand un vrombissement de moteur le fit sursauter.

Sur sa droite, une Citroën avait déboulé à toute allure et dans un terrible claquement, était allée renverser une silhouette qui traversait la rue. La forme noire percuta violemment le capot du bolide. Plaquée contre le pare-brise elle fut projetée en arrière avec une force inégalable avant de retomber lourdement sur un lit de poudreuse qui n'amortit pas sa chute.

Le conducteur de la Citroën ne ralentit pas son allure et poursuivit sa route, laissant un corps inanimé sur la route.

Seul témoin de la scène, William sortit de son véhicule et couru jusqu'au lieu de l'accident. Il s'accroupi et constata qu'il s'agissait d'une femme, une très belle femme, si elle n'avait pas toutes ces marques au visage. Mon dieu, comme elle a du avoir mal, cela à du être un sacré choc.

Elle a perdue connaissance, murmura t-il. William passa sa main sur le corps inanimé, un liquide chaud lui coulait sur les doigts. Désespérément, il chercha le pouls de la jeune femme, son index tâtait désespérément le haut de la gorge à la recherche du moindre petit battement.

Le pouls était faible et irrégulier. Une lueur d'espoir l'envahit, elle a encore des chances de survivre. Tout n'est pas perdu. Maudissant contre le chauffard, il se releva en tentant de reprendre ses esprits.

Tremblant de peur, il sortit son téléphone portable, sachant qu'il lui faudrait mettre en œuvre toutes les minutes qui allaient s'écouler pour tenter de sauver cette inconnue.

Maggie avait prit soin d'emprunter le passage piéton, mais il fallait croire que cela ne suffisait pas. Avant qu'elle n'ait le temps de tourner la tête, une forme blanche fit exploser ses jambes et la souleva brusquement du sol. Comme si un aimant puissant la tirait inexorablement vers lui. Flottant entre la lumière et les ténèbres, elle se sentit projetée en arrière. Par réflexe, elle tendit les bras en avant pour se projeter. Une douleur lancinante lui traversa le bras droit et elle tomba en arrière, dans le vide.

Elle heurta le sol avec une telle force qu'elle cru que sa tête allait être pulvérisée comme une vulgaire pastèque. La neige glacée lui apparue comme une poudre brûlante qui lui dévorait le visage. Ses joues saignaient, elle aurait voulu ouvrir les yeux mais ses paupières semblaient cousues. Elle aurait voulu se toucher le visage mais ses mains refusaient de lui obéir.

Elle sentit couler sur ses joues un liquide chaud, la douleur qui l'empêchait de bouger semblait venir de l'intérieur. Maggie avait beau faire tout son possible, elle ne parvenait pas à reprendre ses esprits. Elle perçu des bruits non loin d'elle, mais ils étaient si frêle qu'elle croyait s'enfoncer dans les entrailles de la terre.

Une voix d'homme lui parlait.

« Elle a perdue connaissance »

Maggie aurait voulu lui répondre, ouvrir les yeux et se redresser. Ses jambes semblaient être enduites de béton, aucun geste ne lui était permit. Elle sentit juste une main chaude chercher son pouls, elle tenta de lui dire qu'elle respirait mais sa bouche ne lui répondait plus.

Il faut que je parle !

Ses efforts demeuraient vains. Elle sentit la main de l'inconnu se retirer vivement, la vue du sang a du l'effrayer. De léger bruit s'en suivirent, une légère sonnerie, semblable à celle d'un portable. Maggie sentit son cœur faible s'emballer, son sauver contactait sans doute les secours.

Je suis sauvée.

La sonnerie dura peu de temps. Elle finit par mourir et ce silence angoissant revint. Plus une voix, pas un seul bruit de pas. La main de l'inconnu ne revint pas chercher son pouls, il ne lui prit pas non plus la main pour la rassurer, pas un seul mot rassurant ne lui parvint.

Juste des pas. Des pas qui s'éloignaient d'elle.

Comprenant tardivement que l'inconnu prenait la fuite, la laissant pour morte au milieu de la route, elle se mit à pleurer. Ses larmes perlaient sur ses joues tachées de sang. Ses lèvres ne remuaient pas, mais au fond d'elle-même, elle criait à l'adresse de l'inconnu.

« Ne me laissez pas...je vous en supplie...ne me laissez pas... »

Personne ne pouvait l'entendre. Pourtant elle continuait.

« Ne me laissez pas...je vous en supplie...ne me laissez pas... »

C'était sans espoir.

« Revenez...Revenez.. »

Elle faisait tout ce qu'elle pouvait pour ne pas sombrer dans l'oubli. Sans répit, la fatigue la harcelait, l'obligeait à tout oublier. Se laisser emporter, c'était la mort assurée. Dormir c'est mourir. S'y abstenir c'est survivre. Plaquée au sol comme une poupée désarticulée, elle ne savait même pas si elle s'était cassé quelque chose. Une vague de frisson la parcourue, était-elle paralysée ?

Les bruits de pas avaient cessés. Cette fois c'était sur, il n'y avait pas d'autre explication. La personne qui venait de tâter son pouls, qui avait allumé son téléphone et s'était ensuite ravisé n'était autre que son agresseur. En l'examinant, il avait sans doute comprit qu'elle avait peut de chance de survivre.

Il n'y avait sans doute plus rien à faire à par prendre la fuite. Maggie se sentait abandonnée sous ce déluge de neige qui lui mordait les joues et la recouvrait. Pourra t-elle se trainer au sol quand ses jambes lui répondront ?

A quoi bon, elle ne peut plus rien faire.

Si ce n'est qu'attendre.

Attendre la mort.


N'avoue jamaisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant