Chapitre 36 : Ressasser les morts (Cole)

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Ces derniers jours, Heather n'avait cessé de m'obliger à aller sur la tombe de mes parents. Idée que je trouvais totalement absurde. Pourquoi irais-je voir des personnes que je n'avais jamais aimées ?

Si seulement elle n'était pas aussi convaincante...

Elle m'avait posé un ultimatum : on y allait ou c'était privé de sexe jusqu'à ce que je cède. Elle ne me connaissait que trop bien sur certains points.

Nous avions décidé de prendre deux jours entiers pour y aller. De San Francisco à Los Angeles, nous en avions au moins pour six heures de route, prendre une pause dans un hôtel ne nous ferait pas de mal.

Pendant le trajet, Heather s'amusait à changer constamment de chaîne dès qu'une musique ne lui plaisait pas. Des fois, elle appréciait certaines musiques, tellement qu'elle en dansait sur son siège. Je jetais un bref regard vers elle et m'empêchais toujours de rire.

Il avait beau être sept heures du matin, elle était en pleine forme. Des fois, elle tentait également de discuter avec moi. Cependant, j'étais incapable de lui dire clairement ce que je voulais dire.

— Tu t'es déjà rendu sur leur tombe ? me demanda-t-elle.

— Non.

Elle n'osa rien demander de plus à propos de mes parents. Elle se sentait déjà gênée de l'avoir fait.

Entre quelques feux, nous échangions quelques brefs baisers, parfois un peu trop langoureux, quitte à nous faire klaxonner par les autres conducteurs quand le feu passait au vert. Un doigt d'honneur n'était pas de refus.

Je redémarrai aussitôt, plutôt enthousiaste d'être acclamé par leurs hurlements tandis que Heather se cachait avec ses mains tout en riant à gorge déployée.

— Tu es fou ! s'exclama-t-elle entre quelques rires.

— N'est-ce pas ce que tu aimes chez moi ? plaisantai-je.

Je la regardai brièvement. Elle était embarrassée et ne répondit rien.

J'avais parfois l'impression d'agir comme un gamin avec elle, comme si j'oubliais tout ce qui m'était arrivé, comme si j'oubliais quel âge j'avais.

*

Le trajet devenant pesant après cinq heures de route, nous décidâmes de faire une pause pour manger. C'était plutôt elle qui voulait, elle était la seule à avoir faim. En réalité, mon estomac me jouait encore des tours.

Elle me conduisit de force, me prenant par le bras, au McDonalds le plus proche. Ça faisait des années que je n'y étais pas allé. À vrai dire, je mangeais tellement peu.

— Tu veux vraiment manger ici ? lui demandai-je.

— Oui.

— Tu veux vraiment de la malbouffe alors que je peux te payer un bon restaurant ? ironisai-je.

Elle me donna une légère tape affective sur mon épaule. Et son petit sourire malin me fit rire.

— Tu es superficiel, me sermonna-t-elle.

— Ouais et alors ? lâchai-je dans la plus grande indifférence.

Elle secoua sa tête pour sous-entendre que je disais n'importe quoi accompagné d'un soupir agacé.

— Après tout, je ne sors pas avec les moches, ajoutai-je en continuant dans la même attitude.

— C'est une insulte et un compliment à la fois. Comment suis-je censée le prendre ?

— Par derrière, la provoquai-je.

Elle posa sa main sur ma bouche pour que je me taise, mais je l'enlevai aussitôt. Elle savait que mon obscénité n'avait aucune limite avec elle. Elle voulait me faire croire qu'elle m'en voulait, sauf qu'elle n'arrivait pas du tout à masquer son sourire.

La Décadence des Flamants - Tome 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant