La Légende du Dranix

Chapitre 1 : La leçon

- Ewan, concentre-toi... »

Le jeune garçon jeta un coup d'oeil furtif vers son interlocutrice, puis recommença à griffonner sur la table en bois d'un air nonchalant, le visage écrasé sur sa main droite. Il soupira, avant de répliquer :

- Mais je me fiche de ça... Parle-moi plutôt de combats et de batailles, Laïsa ! »

Ce fut au tour de la jeune femme dénommée Laïsa de pousser un soupir, regardant son élève d'un regard attendri. Tous deux se trouvaient dans la maison du père d'Ewan, et ce dernier avais requis de Laïsa qu'elle s'occupe de l'éducation de son fils, du moins pour cet après-midi. Cela n'était pas une plaie en soi, mais la jeune femme n'aimait pas recevoir d'ordres, surtout quand ils venaient de quelqu'un comme Davannel. Mais elle considérait Ewan comme son frère, aussi mettait-elle tout son cœur à lui apprendre ce qu'elle savait.

Laïsa secoua la tête, faisant balancer sa tresse de droite à gauche et de gauche à droite, avant de revenir sur sa question première :

- Ewan, fais un effort. Alors, quels sont les rois et reines des Quatre Royaumes ? »

Quelques secondes passèrent, puis, résigné, Ewan se redressa sur sa chaise, le dos bien droit. Il croisa ses bras sur la table, comme l'aurait fait n'importe quel élève sage et discipliné, attentif à donner la réponse la plus précise possible. Il s'éclaircit la voix en toussotant un peu, et prit un ton guindé en prononçant sa réponse :

- Hmm, je dirais Korbhe, Leyan, Carmen et Hargon, très chère. »

La jeune professeure éclata de rire, avant d'applaudir le garçon :

- Tu vois, quand tu veux, tu peux être doué ! »

Sans se vexer le moins du monde de cette pique, Ewan éclata d'un grand rire sonore. Ensemble, les deux amis partirent dans un rire, avant de reprendre leur sérieux. L'heure était à la leçon, et non aux plaisanteries. L'atmosphère ainsi détendue et studieuse, Laïsa en profita pour continuer à questionner son élève, en espérant qu'il ne reparte pas dans l'une de ses bouderies habituelles :

- Et qu'appelle-t-on le Pilier des Mondes ? »

Les yeux d'Ewan se levèrent vers le ciel, et un nouveau soupir s'échappa de la bouche du garçon. Laïsa savait que l'étude était quelque chose que son ami n'aimait pas : il était davantage un aventurier, un casse-cou. Et il n'avait pas besoin de quelques heures de cours pour savoir tout cela, puisqu'il connaissait déjà l'histoire des Quatre Royaumes. Seulement, l'un comme l'autre savait que Davannel était de ces hommes bornés et fiers, qui ne supportaient pas d'avoir tort, et surtout qu'on leur apporte la preuve de leur bêtise. Aussi devaient-ils continuer ce simulacre de cours, si jamais lui venait l'idée de les interrompre à l'improviste.

Le garçon se donna quand même la peine de répondre, mais sa voix était plate, comme s'il récitait sans grande conviction le passage d'un livre :

- C'est Eole, la capitale du Monde du Vent, car il paraîtrait que l'ensemble des Quatre Mondes tient en équilibre grâce à cette ville. Laïsa, on ne pourrait pas passer à autre chose ? Quelque chose de plus distrayant, parce que là, je crois que je vais... »

Avant même de finir sa phrase, Ewan se redressa sur sa chaise et en tomba d'un coup, d'un geste théâtral. Il était maintenant allongé sur le plancher, levant ses deux jambes avant de les laisser retomber lourdement. Il porta alors une main à son cœur et toussa comme s'il allait rendre son dernier souffle :

- ... Mourir d'ennui. »

Un sourire se dessina sur le visage de la jeune femme, qui aida Ewan à se relever. Le garçon reprit doucement sa place, le pas lent, comme si retarder le moment de s'asseoir était en soi une victoire. Il recommença à mettre son visage sur ses mains, et marmonna vers sa professeure :