Chapitre 28 : Chercher

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Après avoir traversé tout Paris, je suis enfin devant la résidence de Cyrians. J'entre et monte les escaliers. Je retrouve l'appartement en question, je sonne et attends. Il n'y a visiblement aucun mouvement de l'autre côté de la porte. J'insiste un peu, mais rien. Il n'est pas là, ça aurait été trop simple. En redescendant, je croise la concierge.

                — Bonjour Madame. Excusez-moi, le jeune homme qui habite au troisième, il s'appelle Cyrians, vous savez quand il rentre ?

                — Ah... Vous savez, il s'absente souvent pour son travail. Je m'occupe de garder son courrier quand il part. Parfois il part une semaine, parfois plusieurs mois... C'est très variable, et il ne sait jamais à l'avance. Il a de la chance que j'accepte de m'occuper de tout comme ça. Vous savez, y en a qui le ferait pas... Mais bon, il est bien gentil...

                — D'accord, merci. S'il rentre prochainement, pourriez-vous lui dire qu'Émeline est passée ? S'il vous plait. Bonne journée Madame.

J'aurais dû me douter qu'il ne serait pas chez lui. Aussi insaisissable que Tristan, c'est un point que les Arnétikos et les Thétikos doivent avoir en commun. Tentative vaine et désespérée, je décide d'aller jeter un œil dans les différents endroits que nous avons fréquentés ensemble. Qui sait, je le trouverai peut-être quelque part.

                En réalité, j'ai beau arpenter Paris, je ne le trouve pas. Ni sur le banc où nous avions mangé nos glaces, ni dans les allées de la bibliothèque Sainte-Geneviève, ni nulle part ailleurs. Je dois me rendre à l'évidence : il a autre chose à faire. Peut-être est-il retourné au Sri Lanka ? Il est possible que les Perpetrator l'aient renvoyé à la poursuite du traître.

En attendant, je dois me débrouiller seule et supporter son absence. Je n'ai qu'une crainte : qu'il ne revienne pas vers moi. Ou qu'il ne réapparaisse que trop tard. Je dois tenir bon, je dois gagner du temps face à Tristan. Je dois résister à la Conversion sans pour autant être condamnée à l'Élimination. Je vais devoir être habile. Tandis que j'avance en direction de mon appartement, l'âme en peine, j'aperçois Tristan qui marche devant moi. Je parie qu'il rôde encore près de chez moi, et peut-être même qu'il s'apprête à monter pour me rendre visite. Je décide de le surveiller de loin. Et ça ne rate pas : il entre dans ma résidence. Je vais attendre de le voir ressortir parce que je n'ai aucune envie de lui parler. Je m'assois sur un banc. Je n'ose pas prendre un livre dans mon sac, de peur de ne pas le voir repartir.

Le temps passe, je m'impatiente rapidement. Il tarde à redescendre, je vais aller le chercher. Je vais le prendre sur le fait, et il va entendre parler de moi. Pour qui se prend-t-il ? On ne rentre pas comme ça chez les gens. Je prends l'ascenseur et entre dans l'appartement. J'appelle, en insistant sur le fait que je sais qu'il est là, que je l'ai vu entrer. Rien, personne. Je fais le tour, il n'y à rien. Isa est au travail, elle m'a laissé un petit mot sur le réfrigérateur, comme d'habitude. Je suis exaspérée, il joue encore avec mes nerfs, il est forcément là. J'observe le moindre objet susceptible d'avoir changé de place, mais je n'observe pas d'anomalie, à mon plus grand désarroi. Et quand Isa rentre, je dois me rendre à l'évidence : il n'est pas là.

J'essaie d'évacuer cette histoire de mon esprit et de passer à autre chose. Je discute avec Isa, elle me raconte brièvement sa journée. En me couchant, je ne peux pas m'empêcher de m'interroger. Il est forcément quelque part. Se pourrait-il qu'il ait le don de se rendre invisible ? Ou de se transformer en objet ? Non, je ne pense pas. Se pourrait-il qu'il m'obsède à tel point que je me mette à le voir partout, alors qu'il n'est pas là ? Je suis sure de l'avoir aperçu dans la rue, mais après tout j'ai pu me tromper, confondre avec quelqu'un d'autre, tant il occupe mon esprit. J'ai peur de devenir folle. Je m'endors soucieuse.

STATERA MUNDIOù les histoires vivent. Découvrez maintenant