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Tu gardes dans tes yeux la volupté des nuits,
O Joie inespérée au fond des solitudes !
Ton baiser est pareil à la saveur des fruits
Et ta voix fait songer aux merveilleux préludes
Murmurés par la mer à la beauté des nuits.

Tu portes sur ton front la langueur et l'ivresse,
Les serments éternels et les aveux d'amour,
Tu sembles évoquer la craintive caresse
Dont l'ardeur se dérobe à la clarté du jour
Et qui te laisse au front la langueur et l'ivresse.

Renée Vivien, 1902

Nina en resta bouche bée. Elle trouvait ce poème magnifique. Et assez juste : « dont l'ardeur se dérobe à la clarté du jour ». Ces vers semblaient avoir étés créés spécialement pour elle...

Nina reposa son coude sur la table, l'œil rêveur, en songeant à ce qu'elle avait ressenti ce matin. C'était un mélange indescriptible de chaleur, d'incomparable élan d'attirance... envers Ian. Ian ! Il fallait qu'elle se ressaisisse. C'était impossible. En plus, elle connaissait son abominable secret.

Nina reporta son attention sur les questions.

1) Que pouvez-vous dire de la métrique de ces vers ?

2) Sont-ce des alexandrins ou des octosyllabes ?

3) Citez trois exemple de mesure de vers (alexandrins, octosyllabe...)

Nina soupira bruyamment. C'était mieux de lire un poème que d'essayer de le disséquer.

Chloé releva la tête de sa leçon et loucha sur les vers.

- Tu veux de l'aide ? proposa-t-elle.

- Ouais, je veux bien ! je n'y comprends rien du tout...

Chloé sourit et la jeune fille sentit une réelle affection dans son regard. Elle était sincère. Et ses yeux étaient bruns - normaux, en somme. Pas de quoi s'inquiéter. Elles se penchèrent un peu plus sur le poème. Les minutes défilèrent, puis les heures, jusqu'à ce que Kate relève ses yeux rougis de fatigue de son manuel et s'exclame :

- Mince, il est sept heures !

Il n'y avait plus un chat dans la bibliothèque, qui allait fermer. Les filles se dépêchèrent de ranger leurs affaires et se saluèrent gentiment. Nina flottait comme sur un nuage : enfin, elle avait des amies, autres que Kate. Les deux filles montèrent en bavardant gaiement : Nina avait oublié sa mauvaise humeur du matin. Elles décidèrent, pour cette fois, de rester dîner à la cafétéria le soir et s'installèrent à une table de deux.

- C'était plutôt chouette, ces révisions ! fit la jeune fille.

- Hum..., dit Kate, tu ferais mieux de t'y habituer ! c'est souvent comme ça, au Manoir.

- Je m'en doute. Je dois t'avouer que je n'aurais jamais cru me sentir bien ici. C'était un peu trop...

- Perdu ? suggéra gentiment Kate en avalant tout rond sa fourchette de pâtes italiennes.

- Exactement ! approuva Nina.

Repues, les deux filles terminèrent leurs desserts respectifs et montèrent dans leurs chambres. Au détour d'un couloir, Nina croisa une jolie blonde aux yeux surlignés d'eye-liner. Addie.

- Salut ! fit celle-ci avec un sourire qui semblait amical.

- Hum, salut, répondit maladroitement Nina.

Kate s'était arrêtée et contemplait la première avec de grands yeux, béate d'admiration. Une fois que la louve eut disparue derrière le couloir des filles, son amie s'exclama :

NINA KELLER (1) : L'Héritière et le mordu (Réecriture)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant