L'allemand affichait un sourire diabolique, un sourire qui prévoyait un mauvais coup, quelque chose de terrifiant. Face à lui, Édouard ne pouvait plus bouger, son souffle coupé par sa collision avec le muret et les mains de Viktor qui l'écrasaient.
- Surprise ! persifla ce dernier, en soufflant son haleine chargée de tabac au visage de sa victime. Vous ne pensiez tout de même pas que je baisserais ma garde, si ?
Édouard voulut répondre mais un acolyte de Viktor lui bâillonna la bouche.
- Ce n'est pas à vous de parler, de toute façon vous n'auriez rien à dire pour votre défense cher ami, railla une fois de plus le fiancé. Figurez-vous que j'ai une histoire passionnante à vous raconter.
Édouard décida de rester tranquille. « Autant écouter ce qu'il a à dire, j'aviserai ensuite », pensa-t-il.
- Hier, moi et mes hommes avions préparé un attentat contre un restaurant, La note de musique. Ce nom vous dit quelque chose ?
Le jeune homme secoua la tête machinalement, pour recevoir un poing dans la mâchoire de la part de son interlocuteur, brusque et inattendu.
- Bien sûr que si, essayez de vous en rappeler ! Je suis sûr que vous vous souvenez y être allé avec Jeanne.
Édouard ne réagit pas.
- Je n'ai pas mangé de champignon hallucinogène, lança Viktor, perdant patience. Jeanne est tout de suite venue me voir hier à l'entrée, alors que je ne savais même pas qu'elle était à ce restaurant. Comme je savais qu'il y avait des bombes au sous-sol, je l'ai bien sûr emmenée plus loin en voiture. Mais elle était très piquante dans ses remarques, elle cachait quelque chose...
Il leva la main, comme si il attendait les roulements de tambour qui accompagneraient son annonce.
- Elle était avec... vous. Vous qui avez sans manquer de scrupule prévenu tout les convives du restaurant, dont les Résistants que nous voulions toucher. Et comme si ce n'était pas suffisant, vous avez désactivé les explosifs !
Il n'y avait plus vraiment d'amusement dans la voix de Viktor. mais de la colère, une fureur exprimée sur un ton trop pacifique qui inquiétait Édouard.
- Et là vous allez me dire que je n'ai aucune preuve pas vrai ? poursuivit l'allemand. Sauf que j'en ai plus que vous ne pouvez le croire, et tout ça à cause de ma chère fiancée.
Édouard voulut donner un coup de pied dans l'abdomen de Viktor, mais l'allié de son agresseur l'arrêta d'un coup dans les côtes. Victor approcha son visage du sien.
- Votre réaction ne fait que renforcer ma conclusion, petit juif innocent, susurra-t-il. Vous auriez aimé que Jeanne ne figure pas dans mon récit, pourtant elle mérite d'y être, parce qu'elle m'a trahi, oui ! Elle m'a fait croire alors que l'on venait de m'informer que l'attentat avait échoué, qu'elle rentrait chez elle pour ne pas assister à ça. Au début je l'ai crue, jusqu'au moment où je suis passé devant chez elle et que je vous ai vu, main dans la main, en train de discuter sur le trottoir en vérifiant que personne ne vous voyait... excepté moi bien entendu.
Édouard commençait à avoir le souffle court, son rythme cardiaque s'accélérant au fur et à mesure que Viktor dévoilait ses révélations.
- Viktor, finit-il par déclarer, j'admets les faits mais s'il vous plaît, ne mêlez pas Jeanne à ça, rien de tout cela n'est sa faute !
- Je ne ferais bien sûr rien à ma fiancée ! En revanche à vous... (il avait les yeux braqués sur Édouard, le manipulant rien que par le regard). À vous, je ne peux que faire ce que j'avais prévu, vous envoyer à la Gestapo pour que vous soyez déporté dans un camp, sans même passer par un juge.
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Les mots d'Édouard
Ficción históricaDepuis la mort de son père, c'est son fils Édouard qui doit reprendre la ferme familiale. Mais le jeune homme n'a qu'une envie : fuir ses souvenirs d'enfance pour gagner la grande ville et devenir écrivain reconnu. C'est finalement en ayant dépassé...