Chapitre X

238 32 12
                                    

Je m'éveillai tranquillement, dans mon grand lit, à l'aube, complètement sereine et reposée. La veille, après avoir arpenté les rues d'Aulance à la recherche des objets nécessaires à ma préparation, je m'étais couchée au crépuscule pour être en pleine forme le lendemain. Une grande journée de préparation m'attendait, ce soir, ce soir allait être mon soir. Le jour du bal était enfin arrivée et j'étais on ne peut plus excitée à l'idée d'y participer. J'avais donné des directives très précises à Yrille pour cette journée. Elle devait me faire monter plusieurs seaux d'eau chaude pour mon grand bain et je ne fus pas déçue quand, me rendant dans mon salon, je vis un bassin avec de l'eau fumante. J'y versai un produit très onéreux, d'une texture épaisse et transparente, que j'eus acheté la veille à Aulance et ne perdis point de temps pour me déshabiller et pénétrer à l'intérieur de ce cocon de douceur. J'avais l'impression de me sentir transportée, d'être sur un nuage. Le produit, qui produisait énormément de mousse, allait rendre mon teint de porcelaine encore plus éclatant et retirerait toutes imperfections – même si je doutai qu'il y en eût – de mon magnifique corps. J'y restai submergée pendant des heures, Yrille, de ce fait, devant constamment réchauffer mon bain et rajouter du produit. Je ne devais tout de même pas attraper la mort à quelques temps du bal ! Il était midi et le soleil atteignait son zénith lorsque je me décidai à sortir. Ce jour-ci j'avais aussi décidé de jeûner, je ne devais pas être boudinée pour pouvoir entrer dans ma robe. Que diraient les autres s'ils me voyaient aussi grasse que cette baleine de Nalla ? Je leur souhaitai tout le malheur du monde à son mari et à elle, je les détestai du plus profond de mon être. Ils ne m'avaient « rien fait » en somme mais je n'y pouvais rien, c'était une aversion viscérale que je leur portais. La cuve enfin retirée de mes appartements, j'enveloppai mon corps d'une tunique de soie pour ne point abîmer ma précieuse peau.

Je jetai un rapide coup d'œil par ma fenêtre. Je voyais quelques personnes en contre-bas en train de flâner et de prendre des bains de soleil. Quels idiots ! Ils perdaient leur temps à se prélasser au soleil alors que le bal se rapprochait à grande vitesse. Je remerciai le ciel de n'être point aussi sotte qu'eux. Je me mis face à ma coiffeuse et mon travail d'embellissement commença enfin. Yrille, assise derrière moi, brossa mes cheveux avant d'y appliquer une multitude d'huile aux senteurs sucrées et exotiques. En plus de les embaumer d'une odeur captivante ces huiles rendraient ma chevelure aussi lumineuse que la plus brillante des étoiles. Ma domestique finit par me les rincer et les brossa une énième fois, il ne me restait plus qu'à attendre qu'ils séchassent. Je n'avais plus besoin de son aide, du moins pour l'instant, et je pris dans un coffret absolument tout le matériel dont j'eus besoin, je voulais être parfaite et j'avais vraiment de quoi l'être. La veille j'avais fait le tour des boutiques de fards les plus coûteuses. J'avais dépensé – ce que je trouvais être – une toute petite somme pour ceux-ci, environ cinq mille écus, cela n'était vraiment pas grand-chose. Je commençai à m'appliquer crème sur crème, puis vint le tour des poudres et, enfin, celui du rouge à lèvres. J'avais pris tellement de temps pour me maquiller que ma chevelure avait fini de sécher et, quelque peu méfiante au départ, je laissai finalement Yrille s'occuper de ma coiffure. Je fus absolument stupéfaite du travail qu'elle eut fourni, cette femme avait véritablement des doigts de fée et avait sublimé mes cheveux, déjà bien assez ravissants à la base. A ce moment, ma domestique marquait de gros points et montait en grade dans mon estime, je n'aurais peut-être pas à me débarrasser d'elle finalement. Le crépuscule débutait à peine lorsque nous avions fini. Ma coiffure était fin prête, mon visage maquillé et mon corps semblable à du satin. Je m'aspergeai aussi d'un parfum à l'excellente odeur de rose. Il ne me restait plus qu'à mettre mon corset et ma robe lorsque je fus interrompue par quelqu'un qui frappa à ma porte. Ma servante se dépêcha d'aller ouvrir, le temps m'était comptée et je n'avais pas une seule seconde à perdre. Je vis Athus pénétrer dans mes appartements à bout de souffle.

CourtisaneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant