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Lorsque les pleurs qui secouaient mon corps finissent par se calmer Seth glisse sa main contre mon menton pour me faire redresser la tête. Il me détaille avec attention comme pour se rassurer avant de se pencher vers moi pour déposer un léger baiser sur mes lèvres. Il s'approfondit rapidement et le baiser a un goût salé à cause de mes larmes. Une partie de moi a envie de se dégager mais le reste de mon corps, de mon âme est en train de se dissoudre dans cet échange qui est en train de prendre une tournure passionnelle. Ce baiser devient un besoin vital, c'est absurde mais le contact des lèvres de Seth contre les miennes me paraît largement plus indispensable que respirer. Mon cœur, ma respiration, tout mon être s'affole. Mon corps est parcouru par des légers frissons mais mes neurones déconnectés les uns des autres m'empêchent de comprendre pourquoi. Mes mains s'accrochent aux fringues de Seth et je me colle un peu plus contre lui comme si je voulais me fondre en lui.

Lorsqu'on finit par se séparer je suis à bout de souffle et je peine à reprendre pied avec la réalité. Pourtant lorsque je retrouve toutes mes facultés l'effet est violent et semble se rapprocher de celui d'une déflagration qui me fait reculer de quelques pas. Je ne sais pas ce que je suis en train de ressentir, je n'arrive pas à faire le tri, à comprendre ce que j'éprouve mais lorsque je prends la parole ma voix est mal assurée :

— Je... On aurait pas dû faire ça...

Seth arque un sourcil d'étonnement et esquisse un geste vers moi avant de se raviser. D'une voix aussi fébrile que la mienne il me demande pourquoi.

— J'en sais rien mais c'est pas possible. Je suis venue avec Ace, c'est Noël en plus... et puis... tu m'as fait trop de mal. Je ne pourrais pas oublier...
— Laisse-moi essayer...
— Pour que tu m'abandonnes encore une fois après ? J'y survivrai pas si tu fais ça... je te jure que ça me tuera...

Il tressaille sous mes mots comme s'il prenait brusquement conscience de l'impact que son départ avait eu sur moi. Pour la première fois depuis plus de deux mois Seth prend le temps de me détailler, de vraiment me voir et lorsqu'il a finit son analyse il porte une main devant sa bouche l'air choqué devant ma perte de poids. Il fini par se ressaisir et m'attire vers lui dans un geste autoritaire et comme une poupée désarticulée je me laisse faire.

— Laisse-moi réparer ça. Je sais que tu en as envie autant que moi... tu crois que j'ai pas morflé moi aussi ? Y a pas une nuit où je n'ai pas rêvé que tu revenais, une seconde où j n'ai pas regretté, ou j'ai pas haïs mon égo. Tu ne sais pas à quel point je me suis senti mal le jour où tu as abandonné, où tu as cessé de tenter de me joindre.

Sa voix est un souffle chaud contre mon oreille et son aveu me fait frémir. Je ne peux cependant pas oublier la fois où je l'ai vu flirter avec cette fille, ni ce qu'Ace m'a confié, c'est d'ailleurs la seule chose qui m'empêche de lui pardonner sur le champ comme une idiote. Seth me garde enlacé contre lui, l'instant me paraît magique tellement j'ai rêvé et souhaité retrouver cette place. Malgré tout je me risque à briser le moment et lui demande :

— Et pour toutes les filles ?
— Lorsque tu as cessé de m'envoyer des SMS j'ai cru que tout était fini. Alors j'ai cherché en vain à t'oublier...
— C'est un peu facile non ?

Il reste silencieux avant d'ouvrir sa veste pour soulever son haut sous mon regard assez dubitatif. Il se saisit de ma main et pose mes doigts froids contre la peau chaude de sa hanche. Sous son regard encourageant je caresse sa peau du bout des doigts, rapidement je rencontre un léger relief, comme si la peau avait boursouflé. Ma surprise grandie un peu plus mais je n'ose pas prononcer un mot comme si une parole pouvait réduire ce moment à néant. Seth a dû percevoir mon trouble car de sa main libre il fouille dans sa poche pour en sortir son briquet avant de me le tendre.

Je m'en saisis maladroitement, une part de moi n'a pas envie de l'allumer je ne plus certaine de vouloir savoir. Face à moi Seth reste immobile comme en attendant un mot de ma part, un verdict. Je prends alors sur moi et déclenche la flamme qui vacille quelques secondes avant de s'immobiliser. Avec stupeur je découvre des dizaines de lignes rosées qui ont fait gonfler la peau. Je retire mon doigt du déclencheur du briquet pour faire mourir la flamme. Je ne sais pas quoi dire alors je me contente de lui glisser son briquet dans sa poche avant de me hisser sur la pointe des pieds. Mon instinct me pousse à l'embrasser, un baiser aussi léger qu'une caresse. Comme une acceptation à des excuses silencieuses. Aucun de nous n'ose dire quoi que ce soit, le silence étant plus équivoque que n'importe quel mot.

Le charme du moment est rompu et je me détache brusquement de Seth lorsque Ace nous rejoint l'air inquiet.

— Qu'est-ce que vous foutez dehors depuis tout ce temps ? Il lance un regard mauvais à son frère avant de me rejoindre en m'ordonnant presque, rentre princesse et laisse le.

Je n'ai aucune idée de ce que je dois faire. Je ne peux pas vraiment laisser Seth comme ça vu ce qu'il vient de se produire mais l'intonation glaciale dans la voix d'Ace me pousse à ne rien dire. Je suis seule dans une ville que je ne connais pas vraiment alors je ne peux pas non plus fuir la confrontation. J'opte alors pour essayer de calmer les choses.

— On discutait... Ça ne sert à rien de rester là, on se les gèle, venez.

Je les entraîne à l'intérieur et me laisse tomber sur le canapé. Ace fait de même tandis que Seth reste debout en croisant les bras. Je ne sais pas ce qui va se passer à présent mais je suis sûre que ce réveillon sera mémorable. On se regarde en chiens de faïence, personne ne parle jusqu'à ce que Seth mette les pieds dans le plat en me demandant :

— Choisis. C'est à toi de le faire Alba.

J'ouvre la bouche pour protester avant de me raviser. Je jette un regard à Ace qui pour une fois approuve son frère d'un hochement de tête. Bordel. Je ne sais pas quoi faire, quoi dire. Je me prends la tête dans la main et ferme les yeux en essayant de remettre de l'ordre dans mes pensées. Leurs regards sur moi me rajoutent une pression supplémentaire et ne m'aident pas vraiment. Mon regard passe de Seth à Ace et d'Ace à Seth et j'ai l'espoir improbable qu'il se passe quelque chose. Au final je finis par m'affaler un peu plus dans le canapé et je lâche dans un murmure :

— J'en sais rien... Laissez moi la nuit pour que je ne fasse pas un truc absurde d'accord ?

Les deux garçons échangent un regard avant d'acquiescer. Celui d'Ace reste fixé sur moi l'air déçu.

— Je te laisse la chambre, je prendrais l'autre m'annonce t-il avant de se lever et sortir en claquant la porte.

Je lance un regard désolé à Seth avant de me lever à mon tour pour rejoindre la chambre. 

DésolationOù les histoires vivent. Découvrez maintenant