Désolation

56.

Après de longues recherches sur tous les réseaux sociaux possibles et après qu'Ace m'ai fait décrire Sony encore et encore au point que j'en vienne à douter de mes certitudes il finit par laisser tomber et capitule en soupirant :

— Ce mec est un fantôme ou il t'a donné un faux prénom, ce qui ne m'étonnerait pas.

— On peut sans doute contacter Sia non ?

— Au point où l'on en est, on est plus vraiment à ça près...

Ace pousse la tablette vers moi et après que je me sois connectée à mon compte facebook j'envoie une demande d'amie à Sia, à ma plus grande surprise elle l'accepte à peine quelques minutes plus tard. Celà me permet de lui envoyer un message et après avoir jouer le rôle de la copine voulant de ses nouvelles je lui propose qu'on aille prendre un verre ensemble. Là aussi elle accepte facilement et me propose un rendez-vous pour le surlendemain. Ace qui lisait par-dessus mon épaule tapote cette dernière en me glissant :

— Bien joué Alba.

Tout ça me paraît un peu trop facile, elle change son numéro sans me prévenir, mais là elle accepte sans soucis qu'on aille boire un verre comme si l'on était des amies de longues dates. Si bien que je finis par faire part de mes craintes à Ace :

— Et si c'est un piège ?

— On est pas dans un film hein, et je ne serais pas bien loin.

Je retiens un petit rire, on est pas dans un film mais ça n'a pas empêché ce mec de me suivre et de me droguer dans mon propre lit. Cependant comprenant qu'Ace préfère minimiser les choses je n'insiste pas plus que ça. J'ai besoin de lui il sera stupide qu'on se dispute maintenant.

Le reste de la journée s'écoule lentement jusqu'à ce que Seth m'appelle je décroche rapidement et alors qu'il commence à s'excuser pour la veille je le coupe et lui demande qui l'a prévenu hier pour qu'il change sa date de retour. Il m'explique alors d'une voix encore ensommeillée qu'il a reçu un appel de la part d'un ami de ma part et qu'il lui a tout raconté. Je reste perplexe avant de pousser un soupir de frustration quand il me dit que l'appel était en masqué. J'esquisse un résumé rapide de la situation et le préviens en même temps que je suis au courant pour ce qui a pu se passer avec son ex. Sa voix se tend un peu mais il me propose tout de même d'en parler lorsqu'il rentrera.

Ce n'est que lorsqu'il raccroche que je me rends compte qu'il n'a rien dit sur sa soirée de la veille, c'est stupide mais le peu que j'ai pu entendre me rend jalouse, sans compter que c'est sans doute à cause ou plutôt grâce à Sony qu'il a accepté de rentrer. Je me sens assez nulle sur ce coup-là si bien qu'à à peine dix-huit heures je profite de l'absence d'Ace pour trouver dans le bar une bouteille de vodka et en boire de longues gorgées. Ce n'est sans doute pas la meilleure chose à faire, mais ça a le mérite de m'aider à me détendre, puis peut-être que cela m'aidera à y voir plus clair. Ce n'est que lorsque la main d'Ace me secoue que je comprends j'ai dû abuser, je suis toujours dans le salon et il est plongé dans la pénombre à cause de la nuit, la seule lumière provenant de la télé. Je ne sais pas vraiment pourquoi mais Ace a l'air furieux et son regard pèse lourdement sur moi, assez pour que je finisse par détourner la tête.

— Qu'est-ce que tu fous dans cet état ?

— J'avais besoin de me détendre c'est tout, dis-je la voix un peu éraillée.

— Arrête de faire n'importe quoi sérieusement. Va te coucher.

Devant sa voix aussi tranchante que le fil d'un poignard je ne me fais pas prier et me redresse précipitamment ce qui me fait chanceler. Ace pousse un soupir et glisse sa main autour de mes hanches pour me soutenir. Ce simple contact me fait me raidir et brusquement je me retrouve submergée par les souvenirs de la nuit que j'ai pu passer avec Ace. Mon corps se met à trembler de manière incontrôlable et sans que je puisse lutter contre je me mets à pleurer. Inquiet il s'arrête et me fixe, on se retrouve alors immobile en plein milieu de l'escalier. Sa seconde main se saisit d'une des miennes et il lâche d'une voix un peu plus douce :

— Hé, ne panique pas. Je te jure qu'on va trouver une solution et que ça va s'arranger.

J'acquiesce tout en gardant le silence, un peu rassurée qu'il se méprenne sur la raison de ma peur. J'esquisse un geste pour monter la marche suivante et Ace me guide avec prudence jusqu'à la chambre de son frère où je me laisse tomber sur le lit.

Je suis stressée, terriblement stressée, mon rendez vous avec Sia n'est plus que dans quelques heures et si cette fois je n'ai pas eu de soucis pour savoir ce que j'allais porter je chercher vainement comment je pourrais aborder le sujet, parce que je me vous assez mal lui dire " Hé salut ton mec est venu chez moi en pleine nuit et il me menace. Tu vas bien sinon ?" L'anxiété me broie le ventre et sans Ace qui est parti s'installer dans un autre café de la rue je crois que j'aurais laissé tomber ce plan stupide. Cependant je ne peux plus vraiment reculer et c'est ainsi que je me retrouve en terrasse à attendre Sia en buvant quelques gorgées de mon Coca.

Sia arrive quelques minutes plus tard, elle semble particulièrement enjouée et mène la discussion ce qui m'arrange plutôt pas mal. Ce n'est que lorsqu'elle finit par remarquer mon air contrit qu'elle me demande :

— Quelque chose ne vas pas ?

— Oui... Heu... En faite en t'invitant j'avais une arrière pensée. J'ai besoin de parler avec toi d'un sujet un peu compliqué.

— Ça concerne Seth ?

— Non, enfin pas vraiment, mais je sais ce qu'il y a eu entre vous et je ne reviendrais pas là-dessus si c'est ce qui t'inquiète.

Elle hoche la tête l'air rassurée et s'allume une clope tout en me faisant signe de poursuivre. J'essaye de choisir mes mots avec soin avant de me lancer :

— Je crois que j'ai eu l'occasion de rencontre ton copain et ça s'est...

— Mon copain ?!

Devant son air surpris c'est à mon tour de l'être, l'incompréhension se transforme en gêne jusqu'à ce que Sia dise :

— Tu dois faire erreur... je n'ai personne en ce moment.

— Heu... tu ne connais pas un mec qui s'appelle ou se fait appeler Sony ?

— Non, dit-elle d'une voix sèche et sans appel.